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Egypte : La condamnation du blogueur Kareem fait les gros titres

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Egypte, Cyber-activisme, Droit, Droits humains, Liberté d'expression, Politique, Relations internationales, Religion, Technologie

Une fois de plus, l’épreuve [1] du blogueur égyptien emprisonné Kareem Nabeel Suleiman [2] fait les gros titres et mobilise des blogueurs du monde entier.

Une cour d’appel d’Alexandrie a confirmé hier la condamnation à quatre ans de prison de Kareem pour insultes à l'islam et au président égyptien Hosni Moubarak, sur son blog personnel.

Le blogueur égyptien Ibn Al Dunya [3] [En] a aussitôt rapporté l’information :

« Une cour d’appel d’Alexandrie a confirmé la condamnation à quatre ans de prison de Abd Al Karim Nabil Sulaiman (connu sous le pseudonyme de Kareem Amer) qui a été prononcée le 22 février denier par le tribunal de Muharam Beq. Un des avocats de la défense de Kareem, Gamal Eid, par ailleurs directeur exécutif de Arabic Network for Human Rights , a confié à l’agence France Presse :

« Ce verdict n’a pas été atteint sur la base de la loi. C’est un verdict religieux semblables à ceux de l’Inquisition ».

Hossam El Hamalawy, dans The Arabist [En] complète l’information [4] :

« Une cour d’appel d’Alexandrie a confirmé la condamnation à quatre ans de prison du blogueur Kareem Amer, pour le crime de « blasphème contre l’islam » et « injure au président Hosni Moubarak”.

“De plus, la cour a accepté que la plainte Hessba d’un avocat fondamentaliste contre Kareem soit instruite et jugée. Hessba, interprétée par les théologiens du régime, donne le droit à tout citoyen musulman de porter plainte ou de se porter partie civile dans un procès si il ou elle estime que « l’islam est attaqué » (Oui, cela est en train de se passer dans l’Egypte de Moubarak, que les Etats occidentaux aiment à décrire comme « laïque »)” écrit-il.

Writing in Arabic [5],[Arabe] le blog de l’ égyptien A’ala Abdulfattah, affirme que le jugement original était illégal car il s’appuyait sur des articles de lois qui ont été depuis amendés.

Pendant ce temps, Giraldus Cambrensis, qui blogue sur Western Resistance [En], appelle à la suspension de l’aide américaine à l’Egypte [6] tant qu’elle ne protègera pas la liberté d’expression.

« Il faut remarquer que durant les vingt cinq dernières années, l’Amérique a dépensé des milliards de dollars en soutien du peu reluisant régime politique égyptien, via le programme USAID. Si l’Amérique est aussi indignée par le manque de démocratie dans des pays tels que l’Irak, peut être alors que les citoyens américains devraient intervenir auprès de leurs représentants. Tant que Hosni Moubarak n’accordera pas la liberté d’expression à ceux qui le critiquent, alors, l’argent de USAID devrait être gelé en attendant que la liberté d’expression, une condition sine quae non de la démocratie, soit respectée en Egypte », note le blogueur.

Ben H, du blog The Daily Transit [En], écrit que bloguer contre l’Islam ou l’Etat au Moyen Orient est s'aventurer sur un territoire dangereux [7].

« Cette affaire désolante est peut-être la première en Egypte, mais ce n’est pas la première dans la région et ce n’est pas non plus la sentence la plus dure. En 2005, le gouvernement iranien a condamné le blogueur Arash Cigarchi à 14 ans de prison, selon Human Rights Watch. Un reportage de la BBC sur cette condamnation dit que Cigarchi a été accusé « d’espionnage et de soutien aux contre-révolutionnaires étrangers ». Traduction : il a critiqué l’arrestation d’autres journalistes en ligne. Ceci a déclenché une réaction en chaîne qui a provoqué d’autres critiques et d’autres arrestation, dont une condamnation à trois ans de prison pour le clerc Mojtaba Lotfi et de dix-huit mois pour Mojtab Saminejab (source : Reporters sans frontières).

Les blogs sont devenu le sommet de l’expression personnelle libre, libérée des contraintes des coûts de production, des publicitaires, du temps, ou (pour le meilleur et pour le pire) des notions d’objectivité, mais tout cela peut être écrasé par un gouvernement intolérant et aux abois. Nous devrions être très vigilants dans nos propres nations, et offrir notre soutien a ceux qui se battent. Mes meilleurs vœux à Kareem pour son jugement en appel, et la liberté aux voix emprisonnées d’Iran » écrit-il.

De son côté, Reporters sans frontière a publié un communiqué [8] condamnant l’Egypte comme un ennemi de l’internet.

« A travers Suleiman, ce sont tous les internautes égyptiens qui sont visés. Une épée de Damoclès est maintenant suspendue au-dessus de leur tête. Nous craignons que d’autres arrestation et des fermetures de sites interviennent prochainement, car les autorités ont vraisemblablement décidé de mettre les internautes au pas », a déclaré l’organisation.

Lors de l’audience, le juge a par ailleurs déclaré recevables les plaintes déposées par des avocats intervenant à titre personnel contre le blogueur et qui demandaient réparation pour les “insultes” proférées par ce dernier envers l’islam. Il a annoncé qu’Abdel Kareem Nabil Suleiman passerait prochainement devant un tribunal civil qui pourra le condamner à payer des amendes aux avocats plaignants» ajoute le communiqué.

L’association précise que le jugement tombe 24 heures après qu’un juge égyptien ait déposé plainte contre vingt et un autres sites Internet égyptiens accusés d’attaquer Moubarak. Selon le communiqué :

“Le 11 mars, Abdel Fattah Mourad, président de la Cour d’appel d’Alexandrie, a porté plainte contre le gouvernement égyptien, demandant la fermeture de 21 sites qui “portent atteinte au président de la République”. D’après des sources locales contactées par Reporters sans frontières, le site de l’organisation Arabic network for human rights information [9] ainsi que les blogs Baheyya [10] et Gharbeia [11], très populaires dans le pays, compteraient parmi les sites incriminés”

“Reporters sans frontières rappelle que l’Egypte, qu’elle considère comme un “ennemi d’Internet [12]“, a été chargée par l’ONU d’organiser un Forum sur la gouvernance d’Internet en 2009 [13]“.

[14]Amira Al Husseini [14]