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Bolivie : Le gouvernement instaure la loi martiale dans le département de Pando

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La Bolivie continue à faire face à l'agitation sociale, alors que des foules d'opposants au gouvernement occupaient des institutions gouvernementales dans la ville de Santa Cruz, et que de nouveaux affrontements avec les partisans du gouvernement dans les régions du Pando [1] ont fait 15 morts. Résultat, le gouvernement a instauré la loi martiale dans ce département.

Le Président Evo Morales a même exigé l'expulsion de l'ambassadeur américain Phillip Goldberg, l'accusant de conspirer avec l'opposition. A la suite de quoi le gouvernement américain a demandé à son tour l'expulsion de l'ambassadeur bolivien à Washington, Gustavo Guzman. Le président vénézuélien Hugo Chavez, en signe de solidarité, a aussi demandé l'expulsion de l'ambassadeur américain dans ce pays [2] (en espagnol).

De nombreux blogueurs écrivent sur ces événements, et beaucoup d'autres prennent des photos et des vidéos spectaculaires. Dans sa galerie de photos Flickr, Julio Ricardo Zuna Cossio [3] offre des photos de première main de l'occupation des institutions à Santa Cruz. Fernando de Vecino Barrio (en espagnol) a lui aussi des photos exclusives des destructions subies par les bâtiments publics. [4]

[5]

Photo des troubles à Santa Cruz. Prises par  Julio Ricardo Zuna Cossio [6], reproduction autorisée

A travers les rumeurs et les récits, il est souvent difficile de reconstituer ce qui s'est vraiment passé dans chaque ville. Renzo Colanzi écrit à la première personne pour raconter ses expériences pendant les moments tendus et incertains à Santa Cruz [7] (en espagnol). En outre, il a reçu des SMS à propos de possibles affrontements et des récits d'arrestations :

A la una de la mañana fui llamado por un primo que me indico que se dirigía a la Plaza 24 de Septiembre debido a que le habían dicho que un grupo de masistas venia enfrentarse. Como vivo a pocas cuadras me dirigí a la Plaza, pero no ocurria nada en el lugar. (…) En la Plaza ya se sabía de esta camioneta y que también había una vagoneta Land Cruiser, que estaba realizando el mismo acto con cualquier grupo de jóvenes que era encontrado por las calles del centro.

A une heure du matin, j'ai été appelé par un cousin qui m'a raconté qu'il se dirigeait vers la place du 24 Septembre parce qu'on lui avait dit qu'un groupe de partisans du MAS (le parti du gouvernement) allait attaquer. Comme j'habite à quelques rues de là, je suis allé vers la place, mais il ne s'y est rien passé. […] Sur la place, on était déjà au courant de cette camionnette (qui avait intercepté des gens) et qu'il y avait également un Land Cruiser qui en faisait autant avec tous les groupes de jeunes qui se trouvaient au centre-ville.

Cette incertitude affecte surtout lourdement ceux qui n'ont pas participé aux marches, protestations ou affrontements. Karen Heredia de Santa Cruz évoque les mesures de précaution prises dans de nombreuses familles [8] (en espagnol) :

Me toco ir luego en la tarde al mercado, ahí veía a la gente comprar como si mañana no hubiera tal. Creo que hasta ayer, todo me parecía surreal hasta que escuche la charla de dos señoras, mientras la casera les vendía comida en lata. Ellas contaban como cada una de ellas se preparaban para lo peor, en este caso una guerra Civil. Argumentos a favor, argumentos en contra…

Lo que dijo una de ellas termino la discusión de quien tenia la culpa:

“Bueno, sea como sea, quien tenga la culpa, lo cierto es que no hay gas, no hay plata para comprar mas comida, gasolina ni diésel y ahora todos los días estamos con la pena de que nos maten, no se puede vivir así”

C'était mon tour d'aller au marché, et j'y ai vu des gens faire des provisions comme si demain n'existait pas. Je crois que jusqu'à hier, tout me semblait surréaliste, jusqu'à ce que j'entende deux femmes bavarder pendant que la commerçante leur vendait des conserves. Elles disaient comment elles se préparaient au pire, en l'occurence à la guerre civile. Le pour, le contre…

Elles ont terminé la discussion en se demandant à qui la faute :

«Quels que soient les coupables, ce qui est sûr, c'est qu'il n'y a pas de gaz, pas d'argent pour acheter plus de nourriture, d'essence ou de diesel, et maintenant tout le monde a peur qu'ils nous tuent, on ne peut pas vivre ainsi.» 

Les principaux points de désaccord entre le gouvernement central et les départements de Pando, Beni, Santa Cruz et Tarija, ce sont les revenus des hydrocarbures (IDH selon les initiales en espagnol), qui ont été réduits et canalisés vers un autre programme gouvernemental d'allocations pour les personnes âgées, ainsi que le projet de constitution que le gouvernement veut soumettre à un référendum national. Les gouverneurs de ces départements veulent que les statuts d'autonomie qui ont été adoptés lors d'un référendum controversé soient inclus dans cette constitution. 

Les forces armées restent un facteur essentiel dans la résolution de cette crise. Miguel Centellas de Pronto* écrit [9] (anglais) :

Une autre question concerne l'armée. Jusqu'à présent, l'armée s'est essentiellement tenue en-dehors de cela, malgré des attaques en bande contre des installations militaires (qui ont fait quelques blessés parmi les appelés et les sous-officiers). En revanche, les affrontements ont concerné pour la plupart des groupes civils tels que l'UJC (autonomistes) et les groupes pro-MAS. L'armée aidera-t-elle finalement à restaurer l'ordre ou à garantir le dialogue politique ? Evo peut-il compter sur l'armée pour soutenir son gouvernement ? Jusqu'à présent l'armée a fait clairement savoir qu'elle n'a pas l'intention d'utiliser la force brute sans ordres écrits exprès du Président (ils ne veulent pas êtres tenus responsables des morts et blessés qui en résulteraient).

Toutefois, un récent communiqué des Forces Armées, reproduit [10] dans Al Minuto (en espagnol) a fait allusion à une opération pour reprendre les bâtiments occupés.  

Mario Duran [11] a contribué à cet article en proposant des liens.