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Afghanistan : Kalagush à l'heure de l'armée américaine

Catégories: Afghanistan, Guerre/Conflit, Médias citoyens, Photographie, Politique

 Parun, «capitale» de la province du Nouristan, photo reproduite avec l'aimable autorisation de l'utilisateur  de Flickr Saleem Nuristani [1].

Il n'est pas le journaliste «embarqué» habituel : Andrew Klavan a passé quelques jours [2] (en anglais, de même que les liens suivants) à la base d'opération avancée (FOB) de l'armée américaine à Kalagush et a publié son récit dans le magazine américain City Journal [2]. C'est très bien écrit : malgré les inévitables références à Kipling (encore qu'elles aient beaucoup plus de signification ici, car c'est le cadre d'une célèbre nouvelle de Kipling et de son héros dans la réalité [3]), il explique bien les défis auxquels sont confrontés les Américains en Afghanistan :

Cette soi-disant capitale provinciale  était en grande partie une invention de l'imagination du gouvernement afghan. Tandis que nous portions nos paquetages [en marchant] sur la piste solitaire, nous sommes tombés sur une «ville» : un assemblage de bâtiments de bric et de broc à moitié achevés et de cabanes en bois avec des ouvriers locaux oisifs qui [nous] fixaient d'un oeil torve depuis les porches. Rory, qui avait pris l'habitude d'exprimer à haute voix mes pensées muettes, marmonnait à mon intention «Deadwood» (note de la traductrice : une série télévisée américaine) au moment où je pensais «Tombstone» (NdlT : un western)…

La mission principale consistait à faire oeuvre de pionnier sur un nouveau site FOB. Rapprocher l'Equipe provinciale de reconstruction (PRT) du gouvernement provincial rendrait la supervision des nouveaux projets beaucoup plus facile. L'ennui, c'était que le site choisi appartenait à un petit village voisin appelé Pashki. Quatre mois auparavant, les anciens de Pashki avaient accepté de vendre le terrain au Ministère afghan de la Défense. Mais à présent, ils craignaient que la présence américaine n'attire les attaques des talibans.

Cela vaut la peine de lire en entier [ce récit], même s'il faut sauter tous les passages où le journaliste explique comment il compte écrire un scénario sur ce thème, ne serait-ce que pour le donner à “ces libéraux de Hollywood” qui haïssent l'Amérique. La question du déplacement de la PRT n'a de sens que d'un point de vue : la PRT de Kalagush se trouve pratiquement dans la province de Lagman (voir, par exemple, ce billet de BABEAA [4]) et beaucoup de gens du coin se considèrent de Laghman. La PRT doit se transporter par les airs à Parun pour faire affaire avec le gouvernement provincial, sinon, elle est obligée d'endurer un voyage insupportablement lent de deux jours et de centaines de kilomètres, à cause des vallées escarpées.

Mais à part cela, déplacer la PRT n'a absolument aucun sens. 

La base d'opération avancée de Kalagush, avec l'aimable autorisation de l'utilisateur flickr Hayat Nooristani [5].

Pour reprendre l'expression si appropriée de Klavan, qualifier Parun de “capitale” de quoi que ce soit est plus un souhait que la réalité. A part le fait élémentaire que les provinces en Afghanistan n'ont pas de capitales comparables à celles des Etats aux USA, Parun, au Nouristan, est une [capitale] particulièrement inefficace. Dans sa conférence à l'Université de Boston [6], David Katz, un haut fonctionnaire des Affaires étrangères, attaché à la FOB de Kalagush, a fait remarquer que Parun est inaccessible non seulement de fait depuis Kalagush, mais pratiquement aussi depuis le reste du Nouristan. Déplacer la base de Kalagush d'une zone accessible, même si elle est contestée, à une zone inaccessible ne paraît pas très raisonnable.

Quoi qu'il en soit, l'article de Klavan est un merveilleux instantané de toutes les défis auxquels sont confrontés les Américains lorsqu'ils pénètrent dans des communautés isolées d'Afghanistan. Et des nombreux défis politiques qui attendent le gouvernement – ou plutôt, les deux gouvernements – dans leurs efforts pour bâtir des institutions durables qui puissent finalement contribuer à la paix.