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Brésil : Les nouveaux médias ont organisé la solidarité durant les inondations

Catégories: Amérique latine, Brésil, Action humanitaire, Catastrophe naturelle/attentat, Cyber-activisme, Environnement, Média et journalisme, Médias citoyens, Réfugiés, Technologie

(Tous les blogs cités sont en portugais) Les inondations provoquées par trois mois de pluie ininterrompue dans l'état de Santa Catarina [1] ont fait 117 victimes à ce jour [3 décembre] et 45 385 personnes ont du être évacuées. Sur une population de 5,9 millions de personnes, 1,5 million ont été affectées directement ou indirectement par les inondations. Douze villes ont décrété l'état d'urgence. La pluie qui a continué durant la semaine a ralenti les opérations de secours dans les zones inondées et compromet aussi la distribution de médicaments et nourriture.

Photo prise le 24 novembre à Itajaí par l'utilisateur de flickr magrufloriano [2] et mise en ligne sur le groupe Flickr “SOS Santa Catarina [3]“, créé pour informer sur les opérations de secours. Voir la galerie photos [4] complète ici.

Il ne s'agit pas de la première inondation dans l'état de Santa Catarina [5], mais c'est la première catastrophe naturelle qui frappe le Brésil à l'heure de l'Internet. Alexandre Gonçalves [6], tout en reconnaissant que cela n'a pas arrêté la pluie, écrit que les blogs et réseaux sociaux en ligne ont effectué une mission d'information en temps réel et sont devenus de véritables “numéros d'urgence” pour ceux qui étaient sur les lieux de la catastrophe.

Primeiro, porque aumentaram as opções para a população suprir sua necessidade por informação. Em outros tempos, dados oficiais da Defesa Civil, só pelo rádio ou pela TV. Agora, é só acessar o site e conferir os boletins mais recentes [7]. Também fica mais fácil acompanhar o noticiário [8], sem esperar pelo plantão na TV nem pelo jornal do dia seguinte. E segundo, como era de esperar, muitos internautas se mobilizaram para prestar serviço, trocar informações, expressar opiniões, publicar vídeos e fotos sobre a tragédia (veja, por exemplo, o resultado de uma busca por “enchente, chuva, santa catarina” no BlogSearch [9]). Em Blumenau, cidade mais atingida pelas enchentes, onde rádios e TVs tiveram cortes de energia e ficaram fora do ar, um grupo de blogueiros se reuniu num blog coletivo [10] para publicar notícias sobre os estragos na cidade. Os blogueiros e outros moradores de Blumenau também passaram a postar sobre a situação no Twitter – veja o que já foi publicado [11]. Foi lá que vi o link para o vídeo abaixo, que mostra desmoronamento na rua Hermann Huscher.


(Video de carolanton sur YouTube)

D'abord, parce qu'ils ont diversifié l'offre d'informations dont avait besoin la population. A une autre époque, il n'y aurait eu que les informations officielles de la sécurité civile à la radio ou à la télévision. Maintenant, il suffit de visiter un site [7]pour être au courant des dernières informations. Il est aussi plus facile de s'informer [8], sans avoir à attendre les infos à la télévision ou le journal du lendemain. Deuxièmement, comme prévu, les internautes se sont mobilisés pour aider, échanger des informations, exprimer leur opinion, présenter des vidéos et photos sur la catastrophe (voir, par exemple, les résultats de recherche pour les mots clés “inondation, pluie, Santa Catarina” sur BlogSearch [9]). A Blumenau, une des villes les plus durement touchées par les inondations, la télé et les stations de radio ont cessé d'émettre, alors, un groupe de blogueurs a pris la relève dans un blog collectif [12]pour donner des informations sur les dégâts en ville. Les blogueurs et d'autres habitants de Blumenau ont également publié des mises à jour sur le service de micro-blogging Twitter – voir ici [11]. C'est là que j'ai trouvé le lien de cette vidéo d'un glissement de terrain dans la rue Hermann Huscher.

Le blog collectif mentionné plus haut est Notícias de Blumenau [12] [nouvelles de Blumenau], également appelé Alles Blau, ouvert le 24 novembre par une douzaine de blogueurs. Ce blog a publié des informations, aidé à rechercher des personnes et relayé les besoins [13] de différents refuges. Il vend aussi en ligne des t-Shirts [14] pour collecter des fonds :

Buscamos parceiros para produzir essas peças gratuitamente ou a preço de custo, para reverter a receita líquida em doações para a Defesa Civil de Santa Catarina.

Nous avons recherché des partenaires pour les fabriquer gratuitement ou à prix coûtant, pour lever des fonds destinés à la sécurité civile de Santa Catarina.

Guilherme Valadares sur son blog Papo de Homem [15] [Paroles d'homme] a lancé une chaîne de solidarité. Chaque blogueur fait don de 100 réals (environ 34 €), publie la photo du reçu, et se lie à trois autres blogs, qui doivent faire la même chose. Voici ses instructions :

1. Fez seu post, doa R$100 – deixa de ser mão de vaca, é R$100 mesmo, imagina se fosse você que tivesse perdido tudo. Se o seu amigo for universitário quebrado e chorão, aí sim deixa doar R$50. Só não deixa ficar de fora.
2. Chama mais 3. Se eles fizerem corpo mole, pode chamar os caras de imbecis. Todo mundo tem grana pro bar, pra balada, pra comprar porcaria. Não adianta vir com papo de biba.
3. Linka o Alles Blau [12], que vai catalogar todos os participantes.
Conta para Doação
Banco do Brasil
Agência: 3582-3
Conta Corrente: 80.000-7
Fundo Estadual da Defesa Civil para Doações

1. Publiez un billet, donnez 100 reals – arrêtez d'être pingre, c'est juste 100 réals , imaginez que c'est vous qui avez tout perdu. Si votre copain est un étudiant sans le sou ou un geignard, dites leur de donner 50 réals. Pourvu qu'ils participent.
2. Appelez 3 autres personnes. S'ils rechignent, vous pouvez leur dire qu'ils sont des idiots. Tout le monde a de quoi dépenser dans un bar, pour une soirée, ou pour acheter des bêtises. Pas d'excuse.
3. Mettez le lien vers le blog Alles Blau [12], qui recensera tous les participants.
Compte bancaire pour les dons :
Banco do Brasil
Code de la banque : 3582-3
Numéro de compte: 80.000-7
Fonds pour les dons à la défense civile de l'Etat

Au total – et pas seulement de la part des blogueurs -, l'état de Santa Catarina a reçu plus de 3,5 millions de réals (environ 1.15 million d'euros) en dons. Domingos Secco [16], qui a lancé la mobilisation des blogs, a participé à la chaine, avec la conviction que 100 réals valent mieux que mille mots :  

Tem horas que a saída é botar a mão no bolso e ajudar as pessoas que precisam. Falar, orientar, criticar, rezar, tudo isso fica em segundo plano, pois milhares de pessoas precisam de suporte material. Para quem está à distância, como eu, a única força de ajudar a tantos irmãos é fazendo uma doação monetária. Sim, existem outras formas como envio de alimentos prontos, roupas, material de construção, etc. Realmente a situação é crítica

Il y a des moments où il faut mettre tous la main à la poche et que vous aidiez les gens qui sont dans le besoin. La parlote, les conseils, les critiques, les prières, tous ça passe au second plan quand des milliers de personnes ont besoin d'aide matérielle. Pour ceux qui sont loin, comme moi, le seul acte utile pour aider tant de frères est le cash. Oui, il y a aussi d'autres moyens d'envoyer de la nourriture, des habits, des matériaux de construction, etc…La situation est vraiment critique.

Médias citoyens 3 – Médias traditionnels 0

La mobilisation pour aider les victimes du désastre de Santa Catarina a commencé sur Twitter [17] le samedi 22 novembre, quand des habitants ont envoyé des messages sur cette plate-forme décrivant ce qui se passait autour d'eux. Les bénévoles et les victimes ont utilisé ce moyen de communication pour échanger frénétiquement des messages et lire les mises à jour du compte #blumenau sur Twitter [11]. Guilherme Felitti remarque, sur le blog Digital Age 2.0 [18], à quel point cet outil s'est imposé durant des catastrophes naturelles récentes au Brésil et les attentats en Inde [19], comment il est devenu un lien direct d'information dans les deux cas, avec des informations en temps réels données par ceux qui étaient touchés personnellement par la catastrophe, et non pas par un reporter arrivé trop tard sur les lieux pour avoir vécu celle-ci :

Enquanto a mídia local se organizava na cobertura, o Twitter demonstrava os principais problemas enfrentados pelos moradores pelo excesso de água acumulado em avenidas da cidade. Não demorou muito até que viessem os relatos mais contundentes, sejam em vídeos publicados no YouTube de barrancos desabando (maior causa de mortes, diz a Defesa Civil do Estado) seja em fotos publicadas no Flickr das ruas completamente tomadas pela lama (as que ilustram esse post, por exemplo). Blogs, sejam criados apenas para cobrir a tragédia, como o ótimo AllesBlau (”tudo bem”, em alemão), focado em publicar histórias de residentes e agregar conteúdos amadores encontrados por serviços colaborativos, ou tradicionais, entraram na roda com o principal propósito de espalhar informações sobre a situação da região como forma de sensibilização da opinião pública.

Alors que les médias locaux préparaient toujours leurs articles, Twitter [20]relayait les principaux problèmes qu'affontait la population tandis que l'eau montait dans les rues de la ville. Peu de temps après, les témoignages visuels les plus remarquables – les vidéos des glissements de terrains [21] (principaux responsables des pertes en vies humaines selon la sécurité civile de l'état) sont apparus sur YouTube, ainsi que des photos sur Flickr [3]des rues totalement envahies par la boue (comme celle qui illustre ce billet). Des blogs ont été ouverts juste pour couvrir la catastrophe, comme le formidable Alles Blau [12]( “OK” en allemand), consacré aux témoignages des sinistrés et aux reportages amateurs ou professionnels de citoyens ou de journalistes indépendants qui sont allés sur le terrain dans l'unique but de diffuser l'information sur la situation dans la région, pour que la population soit informée.

Blog do Kalel [22]critique la couverture de la catastrophe par les médias traditionnels (d'abord pour leur manque de réactivité et [dans un second temps] pour le sensationnalisme de leurs reportages) et loue le travail effectué par d'autres blogueurs pour couvrir les événements sans tomber dans le sensationnel. Il estime qu'ils sont en train de changer le visage du journalisme au Brésil :

O blog Poracaso [23], sediado em Jaraguá do Sul, uma das cidades mais atingidas em Santa Catarina, além de produzir uma cobertura mais intensa do que a das redes oficiais de TV, iniciou uma campanha de solidariedade e conseguiu em poucas horas, durante o dia de ontem, mobilizar dezenas de voluntários. Os cidadãos-repórteres também ajudam autoridades a avaliar o risco de pontes e outros locais atingidos pelas águas. Câmaras portáteis e aparelhos celulares permitem fazer imagens de qualidade suficiente para publicação na internet, mas alguns moradores conseguem produzir vídeos com qualidade para transmissão pela TV, oferecendo alternativas interessantes e variadas para os editores. Em alguns casos, as imagens só podem ser captadas por quem mora ou estava passando pelo local, pois todo o Sul do Brasil tinha até ontem várias comunidades isoladas pelas enchentes. Se a chamada grande imprensa relutou até aqui em assumir oficialmente uma relação de parceria com seus leitores e telespectadores, a tecnologia e os acontecimentos acabam de produzir uma mudança radical no modo de fazer jornalismo.

Le blog Poracaso, [23] publié depuis Jaraguá do Sul, une des villes très touchée du Santa Catarina, non content d'offrir plus d'informations que les chaînes de télévision officielles, a lancé une campagne de solidarité et à réussi en quelques heures, hier [26 novembre] à mobiliser des douzaines de bénévoles. Les citoyens reporters ont aussi aidé les autorités à évaluer les risques d'effondrement des ponts et [des ouvrages] dans d'autres lieux touchés par les inondations. Les camescopes et les téléphones portables peuvent enregistrer des images de qualité suffisante pour être publiées sur Internet. Certains habitants ont pu tourner des vidéos de qualité professionnelle pour les reportages télévisés, et ont permis aux chaînes de diffuser des documents visuels variés et intéressants. Dans certains cas, les reportages vidéo ont été réalisés par ceux qui vivent sur place, ou qui s'y trouvaient, car jusqu'à hier, des villes dans tout le sud du Brésil étaient toujours coupées du monde. Si les soit disant grands médias étaient jusque là réticents à collaborer officiellement avec leurs lecteurs ou téléspectateurs, la technologie et les événements ont amené un changement radical dans la façon dans le traitement de l'information.

Carlos Castilho de Observatório da Imprensa [24][Observatoire de la presse] souligne les principales différences entre les médias traditionnels, peu agiles, et la couverture, plus efficace, des nouveaux médias.

Os deslizes e escorregões de repórteres durante coberturas de grandes tragédias são inevitáveis, dada a tensão e a emoção envolvidas no trabalho dos jornalistas. Mas os erros servem também para mostrar o tipo de cultura e de valores que orienta o comportamento dos repórteres e apresentadores. É nesta questão que fica claríssima a diferença de enfoques entre os profissionais da mídia convencional e os blogs produzidos por amadores e free lancers. Enquanto os primeiros estavam preocupados com a sua apresentação, ou seja, na imagem projetada para o público, os blogueiros estavam mergulhados na tarefa de prestar serviços aos atingidos por aquela que já é considerada a pior enchente de Blumenau, uma cidade periodicamente afetada por inundações do rio Itajaí-Açu.

Les erreurs des reporters durant la couverture de catastrophes sont inévitables, à cause de la tension et de l'émotion qui se mêlent au travail journalistique. Mais les erreurs permettent aussi de voir quel type de culture et de valeurs guide les reporters et les présentateurs de télévision. Dans ce cas, la différence dans le traitement de l'information entre les journalistes des médias traditionnels et les amateurs et les blogueurs est devenue limpide. Les premiers étaient préoccupés par leur apparence et l'image qu'ils donnaient d'eux au public, pendant que les blogueurs étaient occupés à assister les victimes de ce qui est déjà considéré comme la pire inondation jamais vue à Blumenau, une ville parfois frappée par les crues du fleuve Itajaí-Açu.

On peut consulter aussi Blog dos Desabrigados [25][Blog des réfugiés] qui offre une fonction de recherche où les internautes peuvent trouver où leurs amis ou parents se sont réfugiés ; ainsi qu'un réseau pour les bénévoles sur le blog Arca de Noé [26][Arche de Noé], où il est possible de partager des photos et des vidéos et de contribuer par des informations de première main. Le dessinateur Rodrigo Muller a créé le poster ci-dessous, qui a été reproduit par de nombreux blogs :

“Donnez ce dont vous pouvez vous passer à ceux qui en ont le plus besoin”, par Rodrigo Muller [27]