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Gaza : “Le jour le plus sanglant depuis 1967″

Catégories: Israël, Maroc, Palestine, Gouvernance, Guerre/Conflit, Médias citoyens, Relations internationales

Ce jour-là a commencé comme un jour “normal” à Gaza.  A la fin de cette journée, on savait que le 27 décembre 2008 passerait à l'Histoire comme le jour le plus sanglant pour la Palestine depuis la guerre des six jours, en 1967. Bien que la cible des attaques aériennes israléliennes soit le Hamas [1], à mesure que la journée se déroulait, il est devenu clair que de nombreux civils se trouvaient parmi les 225 victimes [bilan officiel actuel].  

Les blogueurs tant en Palestine que dans le monde entier sont sous le choc, tandis que le nombre de morts et blessés ne cesse d'augmenter. Ce choc, couplé à la fureur provoquée par la couverture médiatique internationale, souvent biaisée, est palpable dans les nouveaux billets des blogueurs palestiniens publiés aujourd'hui 28 décembre.

Marcy Newman de body on the line (en anglais ) relate la journée de hier dans les territoires palestiniens  [2], et évoque le moment où elle a appris la nouvelle.

11h30 du matin : l'armée israélienne commence les attaques aériennes avec des avions de chasse américains, des f16. La radio n'est pas allumée dans le bureau de l'hôpital. Personne ne semble être au courant. Mais en quinze minutes, 200 blessés innondent les urgence, comme l'hôpital Al Shifa. Le service d'orthopédie et la maternité sont transformés en service d'urgence. Des bébés de 10 mois aux femmes de 55 ans, les civils palestiniens sont massacrés. C'est le jour le plus sanglant depuis 1967.

Elle conclut :

C'est le jour le plus sanglant depuis 1967. J'ai perdu la notion du temps. J'ai regardé les infos en arabe et en anglais de al jazeera pendant des heures. Il est maintenant 3:08 du matin. L'armée israélienne a bombardée une mosquée il y a quelques heures, de l'autre côté de la rue, face à l'hôpital al shefa. Je pense que c'était à 1h10. Je n'arrive pas à garder la mémoire des événement. 225 palestiniens massacrés. D'autres cadavres à venir sous les gravats.

Haitham Sabbah, qui se décrit comme un “blogueur palestinien déraciné” a mis en ligne des photos prises samedi dans Gaza [3] (en anglais, comme tous les blogs cités). Il les commente ainsi :

Les Palestiniens des territoires occupés ont protesté contre les crimes terroristes commis par Israël à Gaza avec des pierres. Les infos indiquent que tous les schismes entre les différents partis politiques se sont effacés durant ces manifestations, où les supporters du Hamas et du Fatah ont attaqué l'armée israélienne côte à côte.

Le blogueur marocain Al Miraat (Le miroir) abandonne sa réserve habituelle [4] pour déclarer :

Bombarder des lieux où vivent des civils n'est pas quelque chose que les pays civilisés font. Depuis Nuremberg, ceci est considéré comme un crime de guerre. Il s'agit d'un crime de guerre : un massacre , effectué à l'aide d'armes fabriquées par les Américains, et pour la plupart payées par les impôts des Américains.  

Le plus terrible, c'est que cela n'améliorera pas la sécurité d'Israël, cela ne fera que pousser les Palestinien (et la rue, dans les capitales du monde arabe) à adopter des positions plus extrémistes. Ces politiques ont été utilisées pendant des dizaines d'années, et n'ont conduit nulle part.  C'est Israël qui s'oppose au status quo.

Mohammad, qui blogue sur KABOBfest, et se trouve en Palestine,  a résumé les événements de la journée noire [5]. Il a pu parler au téléphone à des amis et des proches à Gaza, et rapporter leurs réactions :

C'était difficile d'obtenir une communication à Gaza durant la journée, mais j'ai réussi à joindre mon oncle Mohammad à Gaza City. Il était sous le choc, incapable de dire quelque chose. Je lui a demandé où il se trouvait. Il m'a répondu qu'il se tenait devant l'immeuble où sont délivrés les passeports, et qu'il y avait environ cinquante cadavres à l'intérieur. Je n'ai rien pu dire. J'ai raccroché.

Mon oncle Jasim à Khan Younis se trouvait aussi à l'extérieur. Il m'a dit qu'il allait bien, mais qu'il y avait des explosions et des cadavres partout.

Je n'ai même pas essayé d'appeler mon oncle Mahmoud ; ma mère l'avait appelé et a entendu des gens pleurer autour de lui. Sa femme pleurait la mort de son frère.  

Je pense que l'émotion la plus forte était le choc, que ce soit à Gaza ou sur les territoires de la rive gauche. En tant que toutes premières victimes, nous nous sommes habitués à ce qu'Israël franchisse les lignes rouges, dans son oppression et son occupation continues. Mais là, c'est autre chose. L'amplitude du massacre est indescriptible.

Il poursuit :

Israël croit toujours qu'elle peut imposer sa volonté par la force. La seule façon d'imposer ses objectifs sera un génocide. Mais il y a un autre angle de vue : les prochaines élections en Israël. Ce n'est pas nouveau pour les gouvernements israéliens sur la selette de commettre des atrocités contre les Palestiniens pour obtenir le soutien de la population, et avec la victoire prévue du Likoud aux prochaines élections, il s'agit d'une démonstration de force du parti Kadima, au pouvoir et contesté.

Cette journée, et certainement les jours à venir, sont une démonstration claire du pire côté d'Israël, ce qui sera décrit comme un mélange dangereux de fantasmes sionistes et de manoeuvres électorales.  Depuis 60 ans, Israël a essayé d'utiliser son écrasante supériorité militaire pour forcer les Palestiniens a accepter le destin qu'elle a dicté pour eux, et depuis  60 ans, aucun gouvernement israélien n'y est parvenu.  

Souvenez-vous de Gaza.

D'autres revues de blogs sont à venir sur Global Voices en anglais [6] et en français [7] .