Zimbabwe : le Nouvel An sur les blogs

La plupart des blogueurs écrivant sur le Zimbabwe au début de cette nouvelle année s'inquiètent de la situation économique et sociale dans le pays. D'autres continuent à suivre le procès de la militante des droits de l'homme Jestina Mukoko, qui a été enlevée et a disparu pendant trois semaines avant de réapparaître aux mains de la police le 24 décembre 2008, sous le chef d'accusation de “association de malfaiteurs en vue de renverser le gouvernement de Robert Mugabe”.

Le blog de Sokwanele This is Zimbabwe démarre l'année avec un billet racontant (en anglais) une anecdote qui met en lumière l'effondrement des systèmes de santé, d'infrastructures et d'enseignement au Zimbabwe. Il raconte les expériences de deux Zimbabwéens particuliers pendant les vacances de Noël.

…Il a vu une enfant debout au milieu de nulle part pleurant toutes les larmes de son corps au bord de la route, en essayant de faire s'arrêter les voitures. Une adulte était assise recroquevillée sur la terre à côté d'elle.

Quand il s'est arrêté, il a appris que l'enfant était avec sa grand'mère, et que la grand'mère se sentait très très mal. La petite fille avait essayer d'aider sa Gogo à trouver un moyen d'aller dans une clinique ou un hôpital, et elles avaient marché à travers la brousse pendant des kilomètres. Quand elles ont atteint la route, les jambes de Gogo ont cédé, et elle n'a pas trouvé la force de se relever et la fillette était trop petite pour l'aider à se mettre debout et à continuer à marcher. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était sangloter et essayer de faire signe pour que quelqu'un s'arrête et l'aide.

La personne de ma famille a aidé Gogo à monter dans sa voiture et l'a conduite avec sa petite fille à l'hôpital le plus proche. Il a dit que c'était loin, et Gogo a gardé le silence pendant tout le trajet, très malade et complètement épuisée par le seul effort d'arriver à la route. La petite fille, a-t-il dit, a sangloté pendant tout le trajet. Il a dit qu'elle pleurait de chagrin et de peur, mais qu'en même temps elle ne cessait de le remercier, sa gratitude qu'il ait même bien voulu s'arrêter brisait le coeur.

Il les a déposées à la clinique la plus proche aux soins des médecins et infirmières qui probablement n'ont pas les médicaments qu'il faut pour venir en aide à Gogo, et je crains que probablement elle ne meure. «Bonne année» à cette toute petite fille ? Je ne crois pas.

Et le billet se termine par une promesse pour 2009 :

Ma promesse est pour une enfant que je ne connais pas : je promets devant Dieu que je ne renoncerai pas, je promets de persévérer. Je voudrais que cette promesse ait un sens pour cette enfant, mais la vérité, c'est qu'elle n'égratigne même pas la surface de son chagrin, lequel est enraciné si profondément qu'il définira pour toujours sa vie d'adulte.

Le minibus VW rouge, immatriculé en Afrique du Sud, qui transfère les activistes entre le tribunal et la prison (photo : blog Denford Magora's Zimbabwe)

Denford Magora's Zimbabwe Blog [auteur de ce billet] suit l'arrestation et le procès de la militante des droits humains Jestina Mukoko. Le blog commence l'année par un billet révélant (en anglais) que Jestina Mukoko n'est toujours pas sous la garde de la police, mais qu'elle est encore sous la garde directe de la police secrète du Zimbabwe, la Central Intelligence Organisation (CIO) :

C'est un mensonge [de dire] que l'affaire est traitée par la Section de maintien de l'ordre de la police. Ils ont été mis devant les faits plutôt hâtivement le 22 décembre 2008, dans le but de donner à toute l'affaire une apparence de respect de la procédure. Personne au Commissariat central de police à Harare n'est au courant de ce qu'il en est réellement de cette affaire.

[…] Il y a des agents de la CIO ainsi qu'une garde armée renforcée stationnés en permanence devant la prison où les kidnappés sont gardés. Ils sont encore interrogés, c'est pourquoi on n'est pas près de voir ce procès commencer avant quelques semaines. Ce n'est pas la police qui mène les interrogatoires, à l'évidence, mais la CIO. «C'est une affaire de sécurité nationale,» comme l'a dit au tribunal cette semaine le ministre en charge de la police secrète, la CIO.

Mes amis, les choses sérieuses dans ce procès Jestina Mukoko se passent hors de la salle d'audience, et ce que nous voyons dans les tribunaux n'est qu'un spectacle. J'en suis arrivé à cette conclusion.

Le blog rapporte également que le Président Robert Mugabe se prépare à arrêter Morgan Tsvangirai, le chef de l'opposition. Il donne les détails d'un plan pour arrêter le chef du MDC pour des charges apparues dans les poursuites en cours contre Jestina Mukoko et pour le recrutement et l'organisation présumés de «malfaiteurs» pour renverser Mugabe.

Un autre blog venant du Zimbabwe, Peace Love and Happiness déplore la dollarisation partielle de l'économie zimbabwéenne dans un billet adressé au Gouverneur de la Banque de Réserve de ce pays, et intitulé «Gono, les dollars US ne poussent pas sur les arbres». C'est un article révélateur qui montre à quel point la crise économique a pris de l'ampleur et donne un aperçu sur la manière dont les Zimbabwéens font face à une inflation record que l'on estime se compter maintenant en trillions [milliers de milliards] :

En ce moment-même, les Zimbabwéens ordinaires sont confrontés à une situation où ils sont payés en dollars zimbabwéens sans valeur et où ils sont supposés payer leur loyer, leur transport, acheter toute leur nourriture, payer les frais de scolarité, les frais médicaux et les médicaments en dollars américains. D'où le gouverneur de la Banque de Réserve croit-il que les Zimbabwéens ordinaires vont obtenir les dollars US, est-il conscient que les dollars US ne poussent pas sur les arbres. Les Zimbabwéens ordinaires souffraient déjà économiquement avant l'instauration de cette politique d'utilisation des dollars US, et l'instaurer alors que la plupart d'entre eux sont payés en dollars zimbabwéens, c'est comme mettre du sel sur une blessure, augmenter encore les souffrances d'un peuple déjà souffrant. Ceci ne fait que montrer à quel point Gono est cruel, insensible et indifférent aux souffrances des Zimbabwéens ordinaires. Son autorisation de fixer les prix des biens et des services en dollars US alors que la plupart des gens sont payés en dollars zim a accru la pauvreté, la faim et les décès dans le pays, et a rendu l'un des objectifs de réduction de la pauvreté du millénaire du NEPAD quasiment impossible dans ce pays.Vous vous demandez sans doute pourquoi les Zimbanwéens ordinaires ne peuvent tout simplement pas utiliser leurs salaires en dollars Zim pour acheter les dollars US nécessaires aux changeurs de devises qu'on peut trouver à chaque coin de rue de la ville. La raison, c'est qu'ils ne peuvent le faire parce que le plafond de retrait à la banque, que Gono a fixé comme limite par personne et par jour ne suffit pas à acheter une quantité adéquate de dollars US.

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