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Kenya : Un atlas qui soulève beaucoup de questions

Catégories: Kenya, Cyber-activisme, Développement, Economie et entreprises, Gouvernance, Politique

Les blogueurs kenyans débattent du PNUE (Programme des Nations Unies pour l'Environnement). En premier lieu, de la publication d'un Atlas qui montre les changements environnementaux au Kenya, et deuxièmement, de l'hypocrisie qu'il y a à aller aux réunions du PNUE dans des voitures gloutonnes en carburant. Global Voices, dans la rubrique “environnement”, a déjà publié des réactions des blogueurs face à l'utilisation par les Nations unies de 4 x 4 (voir le billet Kenya : les 4×4 des employés de l'ONU [1] de novembre 2008).

[2]

Le Programme des Nations Unies sur l'environnement, dont le siège est à Nairobi, au Kenya, a publié l'atlas plus tôt cette semaine. Sa description sur le site du PNUE [2] déclare [en anglais, comme tous les blogs et sites cités] :

Kenya: L'atlas de notre environnement en mutation (Atlas of our Changing Environnement) publié à la demande du gouvernement du Kenya, fournit des preuves visuelles et irréfutables des changements rapides en cours dans l'écosystème du pays, déjà atteint de façon critique, dus aux pressions et activités humaines. Des images comparatives historiques et des images obtenues par télédétection illustrent la dégradation des forets, l'assèchement des zones humides, le rétrécissement des lacs, l'impact des réfugiés sur un écosystème fragile, les signes de détérioration des côtes.

Phil du blog Kenya Environment news blog [3] relève les conclusions principales de l'atlas de 168 pages et résume les constats. Il les confronte avec les Objectifs du Millénaire du développement (UN's Millenium Development Goals [4]) et  Vision 2030 [5], un programme du gouvernement du Kenya . Il écrit :

Une des conclusions principales de l'atlas est que le respect de l'environnement  est fondamental pour la réalisation des OMD (objectif de développement du millénaire). Les ressources et les conditions environnementales ont un impact significatif sur plusieurs aspects de la pauvreté et du développement.

“Un des moyens les plus efficaces pour aider dans la poursuite des premiers OMD – éradiquer l'extrême pauvreté et la faim- est d'assurer le maintien d'une qualité et d'une quantité (de conditions et de ressources, ndt) environnementales à long terme”, écrivent les auteurs. Par exemple, les pauvres gens dépendent des ressources naturelles et de l'écosystème pour leur revenu ; le temps perdu pour puiser de l'eau et la recherche de bois de chauffe par les enfants peut réduire le temps dédié à l'école ; et les maladies liées à la qualité de l'environnement comme les diarrhées, les infections respiratoires aiguës, la leucémie et le cancer de l'enfant, qui sont des causes de mortalité infantile.

Vision 2030, avec son ambitieux programme de développement, offre une opportunité importante au gouvernement du Kenya pour faire face aux défis environnementaux comme élément majeur pour un développement soutenable du pays, conclut l'atlas”.

Le blog Rafiki Kenya [6]regarde la publication de plus près et se demande : “Le Nouvel Atlas du Kenya, un gaspillage de ressources?”. Entre autres questions sur le rapport, il pose celle de son accessibilité au Kenyan moyen. Le blogueur reconnait que le rapport a un bel aspect et qu'il est très bien fait, avec quelques informations intéressantes, mais…

… si vous creusez un peu plus, l'atlas ne contient réellement rien de nouveau. Rien que nous ne connaissions déjà, je veux dire. Même la vidéo qui l'accompagne est un peu décevante : surtout des choses que vous pourriez voir aussi sur Google Earth, avec une voix non-kenyane au commentaire.

La production d'un tel atlas était-elle d'une telle priorité pour le PNUE ? Faire des analyses sur un/e patient/e malade a-t-il un sens lorsque vous connaissez la maladie dont il/elle souffre ? Au lieu de dépenser plus d'argent pour faire plus de tests et produire des rapports médicaux supplémentaires, vous devriez commencer à soigner le/la patient/e, no? Je pense, donc, que c'est ce que le PNUE aurait du déjà faire : commencer à soigner le patient malade. Commencer à soigner notre environnement menacé en promouvant et facilitant des interventions pratiques, par exemple. Les Kenyans ne s'attendaient vraiment pas  à un autre beau rapport destiné à se couvrir de poussière sur leurs étagères.

Le rapport n'est pas non plus à la portée du Kenyan moyen. C'est vrai que vous pouvez télécharger le document et/ou l'acheter ici [7]. Mais quel Kenyan est vraiment capable de télécharger un document de 63 MB ? Quel Keyan peut affronter une dépense de  80 US$ pour la version sur papier ? Et cela sans les couts d'expédition à partir du Royaume-Uni, rappelons-le. Pourquoi un rapport sur le Kenya, produit par une organisation basée au Kenya (PNUE) doit-elle être transporté depuis le Royaume-Uni reste encore un mystère pour moi. Est-ce une autre preuve  d’hypocrisie [8] du PNUE ? L'utilisation de 4 x 4 de la part des fonctionnaires de l'ONU à Nairobi  irrite certains blogueurs [9] depuis quelque temps, déjà.

Ce qui nous amène à un autre sujet de rancœur. Les 4 x 4 que le Président et d'autres dignitaires conduisent pour participer à une réunion de haut niveau au siège du PNUE à Gigiri, pendant laquelle l'atlas a été présentée lors de débats sur la “nouvelle économie verte”.

Dipesh de Sukuma Kenya [8]écrit…

“L'économie à basse teneur en gaz à effets de serre”

Quelle sorte de véhicules pensez-vous que ces 140 hautes personnalités conduisent pour aller à cette réunion ? Peut-être une de celles-ci ?

[10]

Pas de doute, nos Très hautes personnalités du gouvernement du Kenya voulaient être sures qu'elles pouvaient vivre selon les standards établis par les Nations Unies. Et nous savons tous que les belles voitures offertes par les citoyens kenyans à leur gouvernement ne manquent pas. Entre Janvier 2003 et Septembre 2004, le gouvernement du Président Mwai Kibaki a dépensé au moins 878 millions de Shillings kenyans dans l'achat de voitures de luxe [11] qui étaient principalement destinées à l'usage de ses hauts fonctionnaires, tels que les ministres, de leurs assistants et secrétaires permanents.

Dipesh raconte son expérience face aux fonctionnaires du PNUE, lorsqu'il a essayé de leur faire comprendre à quel point leurs messages, destinés à encourager à réduire leur empreinte carbone, étaient difficiles à comprendre quand  les voitures de l'UNEP sont surtout des 4 x 4, avec des émissions élevées de CO2. Il a aussi établi une relation entre la mauvaise allocation de ressources et la corruption et  la crise alimentaire actuelle au Kenya.

Un commentaire [12]publié sur le site donne une suggestion, avec laquelle nous terminerons ce billet :

Peut-être ce genre de réunions devraient proposer une navette pour tous ceux qui y participent, ainsi diminuerait-on le nombre de voitures individuelles utilisées pour le transport. Je me demande comment ça marcherait. Si le gouvernement kenyan et le PNUE prèchent pour rendre le Kenya plus “vert”, logiquement, le premier pas devrait etre de prendre l'initiative de donner l'exemple. Mais je suppose que les choses ne marchent pas logiquement au Kenya. Je ne comprend toujours pas pourquoi le gouvernement pense qu'il est au-desssus de la société civile , ma compréhension de ce que sont les gouvernements était qu'ils étaient là pour servir les citoyens et non le contraire.