Doit-on s’attendre à une révolution politique progressive avec le nouveau gouvernement malais ? Najib Razak n’embrasse pas seulement les médias en ligne participatifs pour encourager l’engagement citoyen, il s’aventure également sur un terrain où aucun de ses prédécesseurs n’est encore allé pour mettre en place un système de libéralisation sélective dans les secteurs de la finance et des services. Cela inclut la suppression de l’exigence du quota de 30% pour les Bumiputra (ethniquement Malais) dans ces domaines afin d’accroître la concurrence. C’est à présent le moment crucial où les journalistes vont analyser ce changement sans précédent et où la population va vouloir connaître l’ampleur de l’impact et des transformations attendues sur l’ensemble de l’économie. [Les liens sont en anglais]
Tony Fernandes reconnaît que ce premier pas devrait mener à de plus grands changements :
La suppression des exigences de la Nouvelle Politique Economique (NEP) dans 27 branches d’activité tertiaire est un bon début. […] Mais j’espère surtout que l’ensemble de l’économie nationale sera réformé. […] Je souhaite que Datuk Seri Najib soit le nouveau Margaret Thatcher. Aujourd’hui, il y a trop de droits acquis, de divergences d’intérêts et de paperasserie qui tuent la créativité, découragent l’innovation et incitent peu les entrepreneurs à créer une société et à la développer.
M. Bakri Musa constate de la même façon que c’est seulement un début mais pas une solution complète, il argumente comme suit :
Pour que Najib Razak obtienne une solution excellente et complète, il faut qu’il traite en priorité la question sous-jacente plus difficile de ce qui a motivé à l'origine l’instauration des quotas […]. Améliorez cela et Najib Razak pourra libéraliser non seulement le secteur tertiaire mais aussi l’économie toute entière, si ce n’est toutes les facettes de la vie malaise. Ainsi, il se rapprochera tellement plus de son aspiration d'”1 Malaisie”.
Chua Soi Lek admet également que la mesure est bénéfique et que les Malaisiens ethniques ne doivent pas penser que leurs droits sont menacés :
Je suis sûr que la réforme va attirer plus d’investissement, et aussi plus de professionnels et de technologie dans le pays et j’espère que cela relancera le secteur des services. […] Les droits spéciaux des Bumiputra sont inscrits dans la constitution. Personne ne peut supprimer cela. Ainsi, la population ne doit pas interpréter la réforme de la Nouvelle Politique Economique comme une remise en question de leurs droits spéciaux, puisqu’ils sont ancrés dans la constitution.
Malaysia Finance déclare que la réforme est hautement louableet qu’elle va encourager les investissements étrangers directs (IDE/FDI) dans les services :
Même si le pays ne voit pas encore les bienfaits immédiats, la bonne réputation cumulative assurera un environnement plus compétitif en Malaisie pour attirer les investissements étrangers. […] Le changement est décisif dans la mesure où notre dépendance aux services passerait à au moins 60%, ce qui réduirait notre dépendance envers les exportations de composants électroniques et de matières premières.
Cependant, l’idée selon laquelle la réforme conduira à des modifications plus importantes des politiques existantes ne fait pas consensus. Tony Pua pense qu'il n'y a là rien de plus que des annonces officielles pour des politiques déjà mises en oeuvre et met en doute son soi-disant impact :
Le Vice-Ministre du Commerce International et de l’Industrie (MITI), Datuk Mukhriz Mahathir, a confirmé officiellement que la réforme n’est que du vent, ni plus, ni moins. […] Datuk Mukhriz n’a pas seulement déclaré son intention de « défendre et promouvoir » la Nouvelle Politique Economique, il a dit également que les récentes mesures de libéralisation, annoncées par Najib Razak, était une initiative visant à s'aligner avec ce qui était déjà en train de se passer dans l'industrie des services. […] Tout ceci n’était donc pas plus qu'une feinte médiatique. En réalité, ces secteurs étaient déjà libérés des contraintes de limitation de propriété. De ce fait, les déclarations de Najib Razak n’ont que très très peu d’impact réel sur l'activité, sinon aucun.
Straight Talk renforce ce point de vue en émettant l’opinion suivante :
J’ai dit que certaines des réactions initiales étaient trop émotionnelles et automatiques. Certains de ces secteurs étaient déjà tout à fait ouverts, avant même la libéralisation. Prenez par exemple l’informatique et ses services, cette branche est déjà tout à fait libéralisée depuis la mise en place du Super Couloir Multimédia (Multimédia Super Corridor – MSC). […] Mais, comme d’habitude, un bon nombre de partis politiques, d’experts et d’actionnaires claironnent des louanges au Premier ministre et sa réforme.
Au vu du niveau de scepticisme et du constat général selon lequel il faut en faire plus, Najib Razak va avoir besoin de plus de temps pour prouver qu’il est effectivement l’homme de la réforme.
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