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Japon : Huit langues sont en danger dans l'archipel

Catégories: Japon, Ethnicité et racisme, Histoire, Langues, Médias citoyens, Relations internationales

En février, l'UNESCO a présenté l’Atlas des langues en danger dans le monde [1], qui donne une description exacte et inquiétante des langues considérées comme en danger (au nombre d'environ 2,500), dont huit appartiennent à l'archipel du Japon. Ce n'est pas si étonnant si l'on pense aux politiques rigoureuses d'assimilation linguistique et culturelle menées par le gouvernement japonais jusqu'à la fin de la deuxième guerre mondiale, après avoir achevé l'annexion au XIXe siècle du royaume de Ryukyu [2] (aujourd'hui Okinawa) et de l'île de Hokkaido habitée par le peuple Aïnou [3] [anglais].

Et pourtant, la présence continue d'une variété de langues différentes du japonais, dans un pays que (même dans le passé récent) des hommes politiques en vue ont vanté comme la ‘Nation d'une seule race [4]‘ [anglais], a surpris beaucoup de ceux qui ont lu cette information dans un quotidien national [5] [japonais].

Le propriétaire du petit restaurant Amami No Ie, sur une île de l'archipel d'Amami (Okinawa), commente [6] la nouvelle que son dialecte est considéré en danger d'extinction, et, à ses yeux, l'assimilation forcée par le gouvernement japonais, qui a commencé par l'enseignement pendant la première moitié du XXe siècle, en est l'une des causes.

日本で消滅危機にある言語の中に、我が奄美諸島の「奄美語」も入っていました。
今回は深くは掘り下げませんが、歴史を辿ると戦前戦後に「方言を使うな!という方言禁止の時代」もあり、その頃から方言が衰退していったのではないかといわれています。
また一口に奄美語といっても、島によって地域によって言葉もイントネーションも異なるので、奄美群島の人たちが交通の利便性もよくなったことで島々(シマジマ)を頻繁に行き来できるようになり、よその人達とコミュニケーションをとる為にも方言を使わなくなってきたともいわれてますよね。

Parmi les langues menacées d'extinction il y a aussi celle de nos îles, l'amami.
Je ne m'attarderai pas trop cette fois sur les détails, mais si nous nous retournons vers l'histoire, avant et après la guerre l'utilisation des langues [autres que le japonais courant] était interdit et depuis lors l'habitude de les parler a commencé à disparaître.
Qui plus est, ce qu'on appelle l'amami diffère de fait d'une île à l'autre, d'une région à l'autre, à la fois dans le vocabulaire et la prononciation. Certains disent que la raison pour laquelle l'amami s'éteint, est que les habitants des îles Amami se déplacent à présent constamment entre les îles, du fait de meilleurs moyens de transport, et qu'ils ont cessé d'utiliser leurs langues locales pour communiquer avec les autres.

残念ながら僕も「シマゆむた(言葉)」で話せません。僕らの世代が使ってる言葉は方言のほんの一部と標準語が入り交ざった「トン普通語」といいます。
しかし「奄美のシマ唄」はしっかり方言で伝えられています。シマ唄を継承している人たちなら「奄美の方言」を守っていけるのではと思います。

Malheureusement, je ne parle pas non plus le shima yumuta, la langue de l'île. La langue que parle notre génération est appelée ‘langue ordinaire ton‘, et c'est un mélange de dialecte et de japonais courant.
Toutefois, les chants des îles Amami sont chantés en ‘dialecte’, ce qui assure leur transmission exacte. Je suis bien sûr convaincu que ce sont ceux qui entretiennent ces chansons populaires qui garderont vivante la langue Amami.
Amami Island. Flicjr id: Takayukix [7]          

Ile Amami. Flickr id: Takayukix

Un autre blogueur [8], natif de l'île de Hachijô (une des îles japonaises les plus lointaines, appartenant à la préfecture de Tokyo) a lui aussi découvert que le dialecte de sa ville natale est en fait une langue.

八丈語???方言ではなくて?

Le Hachijô, une LANGUE et non un DIALECTE ?

[…]

八丈島には独特の方言があり、温泉なんかで飛び交う年配の方の会話は聴いていてとても不思議でそして心地よいものです。
「八丈語」といっても、実はこの小さな島で5つの方言(言語?)があるのですよ。
末吉・中之郷・樫立・大賀郷・三根
という地域ごとに独自の話し言葉が発達・継承されてきたのだそうです。
私にはさっぱり聞き分けられませんが・・・

Hachijô a son dialecte particulier, et quand je vais à des bains et que j'écoute parler les personnes âgées, cela sonne un peu bizarre et pourtant familier en même temps.
Et si on l'appelle le dialecte Hachijô, alors il y a cinq dialectes différents (ou langues ?) sur cette petite île :
Sueyoshi, Nakanogo, Kashi, Okago, Mine
Chacun a développé et hérité son propre mode d'expression.
Mais je suis incapable de faire la distinction entre elles…

消滅の危機に瀕しているというのは、若年層の人が島言葉をあまり話さないことからも納得がいきます。
TVやネットなど情報通信は発達し、東京へ飛行機で40分、簡単に行き来もでき、ある程度の年齢になれば東京その他に移住していってしまう・・・
言語の変化はライフスタイルの変化と密接な関係がありますよね。
私は「八丈語」継承の担い手にはなれないでしょうが、あそび半分でちょっとだけ島言葉を使ってみたりもしています。

On dit que la raison pour laquelle elles sont en danger d'extinction, c'est que les jeunes ne parlent pas la langue de leur île, et je pense que c'est vrai.
En même temps que le développement de la télévision, d'Internet et des communications plus rapides, on peut se rendre à Tokyo en 40 minutes de vol, et facilement aller et venir, de plus à un certain âge beaucoup de gens tendent à déménager à Tokyo ou dans d'autres régions…
Les changements d'une langue sont directement liés aux transformations du genre de vie.
En ce qui me concerne, je ne peux pas prendre sur moi la tâche de transmettre la langue Hachijô, mais, entre autres parce que c'est amusant, j'aime à l'utiliser de temps en temps.
Hachijojima. Flickr id: world waif. [9]          

Hachijojima. Flickr id: world waif.

Parmi les langues listées comme ‘gravement menacées’ par le rapport de l'Unesco, se trouve la l'aïnou, qui n'est plus parlé correctement que par 15 personnes. Son extinction est donc un grave problème, d'autant plus que n'ayant pas d'alphabet, cette langue et ses traditions ne peuvent se transmettre qu'oralement.

Un blogueur insiste [10] sur la nécessité de faire quelque chose de concret pour empêcher la langue aïnoue de disparaître.

アイヌ語の危機的状況は既に知られており、アイヌ文化の保存だけではなく普及の必要性も認められてきた。
「アイヌの先住民族認定を求める決議」 が国会で可決され、「有識者懇談会」 も発足した。
しかし、アイヌ民族の権利の法的保障や、言語・文化をどのように継承していくのか、未だ不透明だ。
これまでの日本人からの圧迫と同化政策が落とした暗い影、不当な差別と偏見の解消は容易ではない。

La situation de la langue aïnoue est déjà bien connue, et ce qui est devenu indispensable ces derniers temps, ce n'est pas seulement la préservation de cette culture, mais aussi la diffusion de son usage.
Une résolution  reconnaissant le peuple Aïnou comme le peuple originel du Japon a déjà été votée par la Diète [Voir l'article sur GV [11]] et le ‘Groupe of d'Experts’ [pour étudier les questions relatives aux Aïnous] a été installé. Néanmoins, la façon dont les droits des Aïnous seront garantis légalement et dont leur langue et leur culture seront transmises, reste un mystère. Il n'est pas si simple d'effacer les préjugés injustes et la discrimination, ainsi que l'ombre épaisse projetée par les politiques japonaises d'assimilation et l'oppression.

北海道のSTVラジオでアイヌ語ラジオ講座を放送するなど、アイヌ語の普及の動きもある。
北海道立アイヌ民族文化研究センターには音声資料も保存されている。
しかし、アイヌ語話者は減少し、学校教育だけでなく家族内の会話も日本語の現状では厳しい。

La radio STV de Hokkaido diffuse des leçons de langue aïnoue [12][japonais] et il y a des mouvements pour la diffusion de cette langue. Ainsi, au  Centre de Recherche pour la Culture Aïnoue de Hokkaido [13] [japonais], on conserve des enregistrements vocaux originaux. Mais les locuteurs de la langue aïnoue s'amenuisent, et l'inquiétant, c'est que ce n'est pas seulement à l'école, mais aussi à la maison, que le japonais est seul parlé.
Biei, Hokkaido. Flickr id: Taro416 [14]          

Biei, Hokkaido. Flickr id: Taro416

Masayuki réfléchit [15] sur la mort d'une langue et sa signification.

最近の学説がどうなっているかは知らないのだけれど、言語は思考に影響を与えるという考え方は、ワタシはかなり妥当なのではないかと思っていて、だとすると、ひとつの言語が滅びるということは、その言語によって認識される「世界(観)」が消えてゆくということだと思えるのですね。

Je ne connais pas grand chose aux théories récentes, mais je pense que la théorie [16] selon laquelle la langue influence la manière de penser est pertinente. Pour cette raison, lorsqu'une langue meurt, c'est aussi le monde de valeurs représenté et induit par cette langue qui meurt.

古くからの言葉を守ろう/いや言葉は変わるもの、という議論もしばしば聞くけれど、それは、正しい言葉/正しくない言葉、という観点よりも、言葉が象る世界の「多様性」や「豊かさ」の可能性が消えてゆくのか/広がってゆくのか、という点で語られるべき話なのではないかと。

On discute souvent pour savoir s'il vaut mieux conserver une langue telle qu'elle était dans le passé ou la modifier. Mais, plutôt que de se demander si une langue est ‘juste’ ou pas, ne devrions-nous pas peut-être mettre l'accent sur l'éventualité que l'enrichissement et la diversité dérivant de l'univers symbolisé par chaque langue puisse disparaître, ou [si elle est conservée] se répandre ?

Voici [17] une vidéo de Isamu Shimoji  [18](下地 勇) chantant la chanson Obaa en dialecte de l'île Miyako. [3000 personnes seulement au Japon comprennent encore, dit-on, cette langue].