Maroc : Plus ça change et plus c'est la même chose

Alors que l'été avance dans le royaume, le thème qui agite tous les blogueurs marocains semble être celui du changement. Depuis les expériences étrangères au Maroc jusqu'à la liberté (ou à son absence) de la presse, la ‘blogoma’ [NdT : la blogosphère marocaine] se fait philosophe sur une variété de sujets. La blogueuse prolixe Tout sur le Maroc, une expatriée vivant à Fès, a récemment publié un billet sur la violence familiale au Maroc. Après avoir discuté de la réalité locale, elle conseille [en anglais] :

Ici, je pense qu'il n'y a plus que les femmes pour encore lire ce billet. Le fait est, Mesdames, que nous vivons dans un monde patriarcal, peu importe d'où vous êtes, la violence est une réalité pour nous toutes, qu'elle soit physique, mentale ou émotionnelle. Les hommes définissent les règles selon lesquelles nous vivons et nous en sommes complices de par la manière dont nous vivons et la manière dont nous continuons à élever nos enfants. Tant que les femmes ne prendront pas la mesure de leur responsabilité dans le mauvais comportement de leurs fils et de leurs maris et ne décideront pas de les élever autrement, cette violence se poursuivra. Tant que les femmes ne se solidariseront pas pour refuser d'être traitées comme du mobilier, elles seront utilisées comme des domestiques. Chaque fois que vous tendez l'autre joue face aux mauvais traitements d'un homme, vous lui permettez de le refaire à quelqu'un d'autre. Chaque fois que vous ne parvenez pas à discipliner votre fils lorsqu'il manque de respect à une femme, vous lui enseignez que son attitude est acceptable.

Les femmes sont plus fortes que les hommes dans tous les domaines mis à part la musculature physique. Nous vivons plus longtemps, nous sommes plus intelligentes, notre seuil de douleur et d'endurance dépasse celui des hommes, et nos chances de survie à la naissance dépassent sont deux fois celle des hommes. Alors, pourquoi font-ils les règles qui régissent notre vie?

Photo by eatbees        

Photo par eatbees

La photo ci-dessus a été prise récemment par le blogueur eatbees à Fez, avec l'explication suivante [en Anglais] :

Si je devais choisir une seule image pour résumer ce que j'ai vu jusqu'à présent au Maroc, je pense que ce serait celle-là.

Un jeune homme se repose sur son vélo en chemin, vaincu par la fatigue ou peut-être même le désespoir. Les gens passent, indifférents, sans doute absorbé par leurs propres problèmes. La neutralité de l'endroit souligne le thème.

Le blogueur, qui vient de rentrer au Maroc après trois ans d'absence, remarque comment le pays a si peu et autant changé, écrit [en anglais] :

Pour être honnête, j'ai hésité à revenir au Maroc parce que je pensais que je pourrais être attristé par ce genre de scène. Venant d'un pays où tout fonctionne même après avoir subi une crise économique majeure, il est difficile de comprendre une société qui reste bloquée en dépit de l'énorme ingéniosité, la curiosité, la motivation et l'intelligence du peuple marocain.

Lors de mon dernier séjour en 2003-2006, on avait le sentiment que, malgré tous les obstacles du sous-développement, le changement était palpable et que l'avenir serait radieux. Il m'était alors facile d'expliquer pourquoi j'aimais le Maroc, un pays tendant vers la démocratie et les perspectives d'avenir tout en maintenant le meilleur de ses traditions. Aujourd'hui, j'ai plus de difficulté à répondre à cette question.

J'aurais plus à en dire sur ce sujet, mais pour l'instant, je vous pose la question, chers lecteurs. Le Maroc est bloqué, et pourquoi ?

Janelle de {de} chaîne {et} trame écrit [en anglais] sur le sujet complexe de la fuite des cerveaux du Maroc, un pays qui perd quelques-uns de ses meilleurs jeunes esprits chaque année au profit des universités et des emplois à l'étranger. Elle rêve :

Au Maroc il y a eu une rapide migration des zones rurales vers les villes. L”augmentation des importations marocaines a également entraîné une baisse des prix pour les agriculteurs qui accroît également la migration vers les villes. L'augmentation des importations a aussi permis aux tisseurs de tapis d'acheter des teintures chimiques pour un coût moins élevé que les teintures naturelles. Plus de filles vont à l'école, ce qui signifie que si vous croyez que l'éducation est intrinsèquement une bonne chose pour tous alors ceci est une amélioration pour la société, mais elle a aussi conduit à une plus grande pression sur les familles. Souvent, les filles instruites veulent partir, et celles qui restent sont plus mécontentes que jamais. Le tissage de tapis est un savoir qui disparaît à mesure que l'éducation des femmes augmente. Sur le plan du développement, c'est une énigme. Il y a une offre excédentaire et une faible demande de personnes instruites pouvant être absorbée par les zones rurales, alors qu'il y a de moins en moins d'artisans et sans doute une demande stable pour leurs produits.

Ensuite, elle implore ses lecteurs américains de repenser la politique d'immigration des États-Unis, en disant:

Donc, cette semaine, alors que vous réfléchissez sur ce que cela signifie être Américain, pensez à l'immigration et la politique étrangère en dehors des USA. Nous vivons dans une démocratie, et bien que notre nation soit devenue pléthorique à en être immobile, il y a une raison pour que le premier amendement ait été le 1er ! S'exprimer librement, poser des questions et remettre en question l'ordre du jour des médias, du gouvernement, et des soi-disant organismes de développement qui prétendent être ce qui porte le changement.

Enfin, Un Marocain sur le Monde qui l'entoure parle du mouvement le plus récent contre l'étouffement de la liberté de la presse au Maroc, où, jusqu'à ces dernières années, il était impensable de se dresser contre le gouvernement de cette manière. Le blogueur explique [en anglais] :

Plus de vingt journaux et des magazines marocains indépendants, dans une action sans précédent afin de marquer leur mécontentement, ont publié des pages blanches en guise d'éditoriaux afin de protester contre la campagne judiciaire du gouvernement qui veut les réduire au silence. Depuis la réforme de la loi sur la presse de 2002, les médias marocains ont connu une augmentation de la sévérité des sanctions pénales, civiles ainsi que des dommages-intérêts demandés aux journalistes et aux publications pour lesquelles ils écrivent. Tellement sévères qu'en effet, si la richesse d'un pays devait être jugée par les amendes qu'elle impose à ses médias libres, le Maroc serait considéré comme l'un des pays les plus riches du monde. Les sanctions judiciaires ont été imposées pour ce que les autorités marocaines perçoivent comme de la diffamation des responsables gouvernementaux, des institutions et des dignitaires étrangers, ce qui compromet l'image de la nation en rapportant la participation à des activités délictuelles de représentants des autorités, l'insulte aux principes de l'Islam, ainsi que non-respect de la personne du roi. Beaucoup pensent que la perception du gouvernement est biaisée et que les décisions de justice ont été motivées par la politique de rétributions orchestrée par des fonctionnaires en poste et de riches hommes d'affaires qui sont de mèche afin de favoriser leurs affaires personnelles, au détriment des citoyens révoltés de voir le pillage des trésors nationaux du Maroc s'étaler à la une des quotidiens et des hebdomadaires ; l'insistance du gouvernement à infliger des amendes ruineuses aux les médias indépendants et des peines de prison à leurs journalistes vise à garroter leur capacité à informer le public sur les pratiques antidémocratiques des autorités marocaines.

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