Le procureur général du Venezuela, Luisa Ortega Díaz, a présenté le 30 juin dernier une proposition de loi sur les délits médiatiques (le texte est disponible ici en espagnol). Certains blogueurs et journalistes considèrent que cette loi menacerait sérieusement la liberté d'expression dans le pays. Les médias ont souvent été un sujet de dispute durant les conflits politiques que le pays a connu. Le président vénézuélien, Hugo Chávez, a été particulièrement critique à l'encontre de nombreux médias, les accusant de déstabiliser le pays en diffusant de fausses informations. C'est dans ce contexte qu'Ortega Díaz a déclaré [en anglais] qu'il était nécessaire que le gouvernement régule la liberté d'expression. Elle précise que le gouvernement ne cherche pas à restreindre la liberté d'expression, mais bien à la réguler.
La Constitution garantit la liberté d'expression, tout en indiquant qu'il doit exister certaines restrictions et responsabilités. Toutefois, la loi proposée augmente le nombre de délits imputables aux médias. Elle comprend 17 articles décrétant que les propriétaires des médias, les journalistes, les sources et toute personne qui participe à l'information, risque jusqu'à 4 ans de prison si l'information diffusée entraîne un mouvement de panique parmi la population ou trouble la paix, la sécurité ou l'indépendance du pays. Cette peine est également applicable aux personnes manipulant l'information et à celle qui attaquent « la santé mentale ou la morale publique ».
Ce sont ces termes vagues qui inquiètent un grand nombre de journalistes et de blogueurs vénézuéliens. Ils craignent que ces termes puissent être interprétés de manière à permettre au gouvernement de réprimer toute personne le critiquant dans les médias. Il appartiendrait en effet au gouvernement de déterminer quelles actions feraient intervenir la nouvelle loi. Beaucoup de journalistes et de blogueurs sont préoccupés par la manière dont cette loi serait appliquée et ce qu'elle aurait comme incidence sur le journalisme au Venezuela.
Parmi les personnes inquiètes, on compte le professeur de journalisme Moraima Guanipa qui commente sur Twitter [en espagnol] que « la loi est une nouvelle tentative de censure et d'autocensure à travers la répression contre le travail journalistique ».
Un couple de blogueurs participe au mouvement qui utilise les outils offerts par les médias personnels en créant des vidéos dans lesquelles ils expriment leur point de vue concernant la loi. Naky Soto a monté une vidéo [en espagnol] expliquant dans quelle mesure la nouvelle loi renforce le caractère punitif à l'encontre du journalisme. La vidéo de Jogreg Henríquez du blog Circulemos [en espagnol] souligne le danger que « n'importe qui » pourrait être emprisonné selon l'interprétation de la loi faite par le gouvernement ( en espagnol et sous-titrée en anglais).
D'autres réactions de Vénézuéliens sur Twitter :
Kira Kariakin @kirakar
Dicen que George Bush asesoró a Luisa Ortega Diaz (la Fiscal) en su propuesta de Ley de delitos mediáticos…
Leo la ley de delitos mediáticos. A ver quien es el guapo que puede definir lo que es “salud moral”. Vaya país. #FreeMediaVe
Analiz Suárez @anairinna :
Junto a la Ley de delítos mediáticos, deben -a su vez- crear una mega carcel, para que puedan meternos a todos :) ¿no que no?
@nabifer [10]:
esto de la Ley de Delitos Mediáticos no deja dormir. Yo creo que no nos estamos percantando de la magnitud del asunto. #freemediave
Le blog Panfleto Negro [en espagnol], qui a fêté ses 10 ans il y a peu, commente qu'une telle loi affectera aussi l'État.
Finalmente, en Venezuela se legalizará la censura, una avanzada heroíca de la derecha conservadora y fundamentalista. El único aspecto positivo consiste en la posibilidad real de hacer limpieza. Desde ya en panfletonegro esperamos que apresen al Presidente, a todo el tren ministerial y a los miembros relevantes de la Asamblea Nacional, así como también a todos los reporteros de los canales del Estado y de los medios privados, por los delitos que cometen diariamente según este proyecto de ley.
Le rédacteur du blog Slave to the PC [en espagnol] annonce: « Je me déclare délinquant. Mesdames et messieurs, je serai bientôt délinquant. Chaque fois que je critiquerai une action du gouvernement sur ce blog, je risquerai d'être jugé par la « justice vénézuélienne ». » Il ajoute que la seule option est l'autocensure :
La idea de criminalizar la información es un reflejo claro de que este Gobierno está en decadencia. La justificación de querer poner límites a la libertad de expresión muestra un rechazo impresionante a la democracia. El debate, la discusión y, lo mas importante, la voz de cada quien, quedan suspendidos hasta nuevo aviso. La autocensura será la solución de los entregados. La búsqueda y muestra de la realidad será la bandera de los que lucharán. Caerán algunos, de eso estoy seguro, pero no podran callarlos a todos.
Dans l'autre camp, Michel, un blogeur pro-gouvernemental, reprend l'argument avancé par le procureur général en disant que la liberté d'expression doit être contrebalancé avec la sécurité des citoyens et cite l'irresponsabilité de certains médias [en espagnol] :
La fiscal general señaló que es necesario regular la actividad de los medios y brindarle una protección apropiada a los ciudadanos, quienes lucen indefensos ante el uso irracional del poder que actualmente ostentan los medios de comunicación social.
Enfin, le journaliste Carlos Correa, directeur de l'ONG Espacio Público explique quels sont les dangers [en espagnol]:
Dada la importancia de la libertad de expresión en una sociedad democrática, debe el Estado garantizar y promover su ejercicio, no limitarlo mediante leyes que buscan silenciar los medios de comunicación o todo intento de expresión libre y crítica.