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Arabie Saoudite : le traitement contre le SIDA fait marche arrière

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Arabie Saoudite, Droits humains, Santé
The Saudi government reported that in 2008 the number of AIDS patients in Saudi Arabia was 13,926 with 3,538 Saudis. An estimated 505 were Saudi females and 769 non-Saudi women.

Le gouvernement saoudien rapporte qu'en 2008 le nombre de patients atteints du SIDA atteignait 13 926 dont 3538 saoudiens. Selon les estimations, 505 de ces patients seraient des femmes saoudiennes et 769 seraient d'une nationalité autre.
La question du SIDA/VIH a toujours été un sujet tabou en Arabie Saoudite, où le débat sur le fait que les patients soient considérés comme des criminels fait rage. L'Arabie Saoudite a récemment annoncé ses projets de fermer une clinique bénévole à l'hôpital King Saud de Jeddah , connue pour assurer soins médicaux, thérapie et confidentialité aux victimes atteintes du SIDA. Des blogueurs s'en sont violemment pris à cette initiative, affirmant qu'il s'agit d'un véritable recul. Wafa, qui a participé à un atelier tenu par une organisation saoudienne luttant contre la discrimination à l'encontre des patients séropositifs, écrit [1] [tous les liens de cet article sont en anglais]:

Je sais de source sûre que de nombreuses personnes ici continuent de penser qu'une personne atteinte du sida est responsable de sa situation, et qu'elle n'a pu être contaminée que par relations sexuelles. Peu de gens connaissent la différence entre SIDA et VIH. De nombreux patients atteints du sida sont stigmatisés et dénigrés par la population. Nous devons véritablement véhiculer une meilleure connaissance de la maladie et mettre un terme à cette discrimination.

Wafa explique plus en détail à quel point toute la société est réfractaire à l'idée d'aider les patients, et mêmes les chefs religieux aggravent la situation à travers leur ignorance quant aux causes de la maladie :

Le problème est partout dans notre société. Quand la première et unique organisation saoudienne pour le sida a commencé son travail, elle fut confrontée à l'indifférence de presque tous, et ne put donc bénéficier de ressources financières; la société pensait que si elle reconnaissait l'existence de l'organisation, cela aurait pour résultat de commencer à admettre l'existence du SIDA en Arabie Saoudite, chose impensable puisque de nombreuses personnes continuent de penser que les relations sexuelles sont la cause de cette maladie.
Les chefs religieux reprochent également l'approche occidentale de l'organisation, l'accusant d'accepter les relations sexuelles illégales et de demander des fonds pour en gérer les conséquences.

Sabria S. Jawhar, une autre blogueuse saoudienne étudiante en doctorat au Royaume-Uni, relève [2] que bien que les temps aient changé, la règle principale pour les victimes reste la même. Ils doivent cacher l'existence de leur maladie à leurs amis, leurs proches et même leur famille. Elle explique alors le nouveau problème rencontré par les patients concernant la fermeture de la clinique de l'hôpital Jeddah’s King Saud:

Le projet de fermeture de la clinique est confirmé et ses patients séropositifs seront répartis à travers tout le royaume pour être soignés. Au moment précis où l'Arabie Saoudite parvient à atteindre une certaine parité dans le traitement de ses malades atteints du SIDA, comme elle y est parvenue pour ses politiques de greffes d'organes et sa spécialisation à séparer les siamois, elle décide de faire marche arrière.
La fermeture des services SIDA à King Saud met en danger l'intimité des patients, ainsi que la possibilité de recevoir un traitement cohérent. Cela augmente également la probabilité de voir la maladie se développer puisque la confiance instaurée par les médecins, les infirmières ainsi que le personnel soignant doit être à nouveau rétablie, mais avec des étrangers et dans une autre structure médicale. Ce n'est pas une tache facile.

[…]

Le transfert de patients pose également la question de ce que les autres centres médicaux comptent en faire. Ces patients seront-ils regroupés avec d'autres malades ou bien seront-ils traités dans un pavillon spécialisé?

Et plus que dans tout autre pays, les patients du SIDA ont besoin de traitements particuliers et d'un haut niveau d'intimité, comme continue de l'expliquer Sabria :

Le lien émotionnel entre les employés de l'hôpital était fort. Il y avait un rapport de confiance entre le patient et l'employé. Contrairement à de nombreux patients séropositifs occidentaux qui ne cachent pas leur maladie, les saoudiens préfèrent garder le silence afin de ne pas être jugés par leurs familles et leurs amis. La confiance établie entre le patient et l'employé d'hôpital leur garantissait que leur secret était bien gardé.

Il y a peu, un patient atteint du SIDA a dit de l'hôpital King Saud que: “Lorsque nous allons là-bas, nous sommes traités comme des êtres humains. Je sais que les gens m'écouteront. Mais je n'en parle à personne d'autre.”

Avec le transfert de ces patients vers d'autres établissements, ce secret est dorénavant en danger. Le fait d'assurer un traitement adéquat et de prendre les précautions pour la propagation du SIDA est également en danger.

Angie Nader [3] a laissé un commentaire sur l'article de Wafa , plaignant ces patients et disant:

Malgré tous les discours faits sur le sida à travers le monde… il est toujours là…nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour arrêter cette maladie. Et quant à ceux qui en souffrent, nous devons les respecter et les laisser vivre dignement.

Je me joins à Angie et je me demande si quelque chose de mieux sera fait pour aider ces patients qui souffrent.