Le Pérou est un pays d'une telle diversité ethnique et culturelle que l'on pourrait penser que les Péruviens sont habitués à côtoyer d'autres visages et cultures, et qu'on y trouve respect et tolérance. Cependant, la réalité est assez différente. Dans la société péruvienne, on trouve des exemples voilés ou flagrants de racisme. Nombre de ces aspects ont été évoqués dans des revues de blogs sur Global Voices [en anglais].
[Les liens sont en espagnol] Cependant, on peut souvent se retrouver face à des situations inédites qui, à première vue, semblent être du racisme, mais après un examen plus approfondi, pourraient ne pas en être. Un débat vient d'apparaître au Pérou à la suite d'une circulaire récente du Ministère de la condition féminine et du développement social (MIMDES, de ses initiales en espagnol) à l'attention des entreprises de pompes funèbres, les invitant à changer “leur politique de n'engager que des Noirs comme porteurs de cercueils, car elles commettent un acte évident de discrimination,” comme le rapporte le journal El Comercio.
Comme le sait chaque Péruvien qui a eu à utiliser ces services ou a participé à des funérailles, ce sont les clients, et non les entreprises de pompes funèbres, qui préfèrent avoir recours à des employés de pompes funèbres noirs. Le blog Living in Perú publie la déclaration des propriétaires d'entreprises rétorquant que le “Ministre Vilchez a tort. Nous ne faisons pas de discrimination raciale. Ce sont nos clients qui demandent que ce soit des Noirs qui portent les cercueils lors de leurs cérémonies”. Le communiqué ajoute: “Nous ne pouvons pas nous opposer à la volonté de nos clients. Qu'ils demandent des blancs ou des noirs, nous devons satisfaire leurs exigences.” En fait, les entreprises de pompes funèbres demandent des honoraires plus élevés pour des cérémonies avec des porteurs noirs.
Pourquoi tant de Péruviens préfèrent-ils que des afro-péruviens officient lors des funérailles ? Chuto du blog Choledad Privada a peut-être une explication et pose les questions suivantes:
¿cuál es mensaje que se quiere transmitir a los presentes al velorio con esa imagen racistoide acompañando el dolor de los “blancos”? ¿Será acaso que se mezcla cariño y paternalismo racial con una necesidad de que los OTROS sean los que se encarguen de mis pompas fúnebres (o en un velorio de puro negro también hay negros cargando al muerto?)? ¿Será que esta costumbre está inspirada en el luto que sigue a la pérdida de cualquier ser querido? Quizás inconscientemente pero bien intencionalmente nos sentimos aliviados si no sólo contamos con un perucho de clase/raza considerada inferior lustrándome los zapatos, sirviéndome el café en el Club Nacional, abriéndome la puerta en el Casino Atlantic City o con un gran sombrero de portero en el Hotel Sheraton, sino que además queremos que sean nuestros carontes de a pie que nos lleven hacia el otro mundo cargado en hombros?
Indépendamment des raisons, il s'agit d'une pratique très répandue au Pérou. Ainsi donc, on en vient à se demander où se loge le racisme? Du côté des entreprises, des clients ou des deux ? Le ministère s'immisce-t-il dans la liberté de gestion des entreprises ? Plusieurs blogueurs se posent les mêmes questions. Martín Soto du blog sNm écrit sur ce sujet :
No me parece que este sea un tema de discriminación hacia afroperuanos, y si un desacierto ministerial (oficiar a privados, pidiendoles “modificar” el asunto?). … que el MIMDES, en cabeza de su ministra (nada más, nada menos) oficie a algunas agencias funerarias no resuelve ni por asomo ningún problema vinculado a la comunidad afroperuana; que se ocupe sobre el oficio de los cargadores de ferétros y le reclame modificaciones a la empresas privadas, sólo escapa a sus funciones y competencias, sino que es un claro sin sentido, una pérdida de recursos públicos en temas menores.
Et il termine son billet avec cette réflexion :
qué “clase” o “tipo” de personas deberían ser empleadas en este oficio?, es el oficio indigno?, es la persona la que hace indigno al oficio?, de qué hablamos cuando hablamos de discriminación aquí?
Álvaro Zapatel du blog El Gato del Hortelano publie quelques notes à propos du racisme :
Las funerarias ofrecen un servicio en respuesta a la demanda de los consumidores. Los consumidores, arguyen los “funerarios”, prefieren por lo general que los cargadores sean afroperuanos. Se podría hablar de un acto discriminatorio de los consumidores, mas no de las funerarias quienes ofrecen un servicio en función de lo que la demanda pide.
queda claro que el afroperuano que entra a trabajar como cargador, está ejerciendo su libertad para trabajar como tal. Es obvio que en contra de aquel argumento se hablará de la falta de oportunidades que los afroperuanos tienen para acceder a un trabajo en nuestro país, y que, lamentablemente por necesidad y falta de oportunidades en otros rubros entran a trabajar de cargadores en las funerarias. Entonces, a mi parecer, el problema ya no compete al MIMDES sino más bien al Ministerio del Trabajo.
Les entreprises funéraires offrent un service en réponse à une demande des clients. Les clients exigent des services des entreprises de pompes funèbres et, en général, ils préfèrent des employés afro-péruviens pour la cérémonie. On pourrait parler d'actes de discrimination de la part des clients, et non des entreprises, qui ne font que fournir le service demandé.
C'est clair que les afro-péruviens qui travaillent comme porteurs de cercueils ont le droit de faire ce travail. C'est évident que, contre un tel argument, on parlera du manque d'opportunités de travail pour les afro-péruviens qui en cherche dans le pays, et que, malheureusement, en l'absence d'autres débouchés, ils travaillent comme porteurs de cercueils dans les entreprises de ce secteur. D'après moi, ce n'est pas de la compétence du MIMDES, mais du ministère du travail.
Il faut remarquer que le travail de porteur de cercueils n'est pas le seul emploi qu'occupent “apparemment” exclusivement des afro-péruviens. Ils occupent aussi souvent les emplois de coursiers dans les hôtels. Ces personnes font ce travail à mi-temps après leurs études à l'université, parler donc de “manque d'opportunités” pourrait être incorrect dans ces cas.
Mais Zapatel poursuit :
los empresarios fúnebres sostienen que el servicio funerario llevado a cabo por afroperuanos es de mayor costo que el ofrecido con peruanos de otros rasgos étnicos – léase, no afroperuanos. … En este caso, podríamos asumir que se considera un “servicio de lujo” puesto que a medida que su precio aumenta, la cantidad demandada aumenta también. Claro que, si nos remitimos al tema de que este incremento en el precio se deba únicamente a una característica física, esto es totalmente condenable. Pero ojo, ¿condenable en qué sentido?
¿No estamos frente a un caso de “discriminación inversa”? Si el tema en cuestión es el racial, ¿por qué el servicio fúnebre ofrecido por afroperuanos cuesta más que el ofrecido por no afroperuanos? Aquí más bien podríamos incluso hablar de un sector del mercado “copado” por afroperuanos y que, en realidad, está discriminando a los que no son afroperuanos. Si un asiático-peruano entra a trabajar como “cargador” y percibe que su trabajo es considerado “de menor valor” al de aquel que es ejercido por afroperuanos solo por una cuestión étnica, mas no por habilidades, creo que el tema discriminatorio iría no solo para el afroperuano sino para aquel asiático-peruano.
Les entreprises de pompes funèbres soutiennent que les services des afro-péruviens sont facturés plus chers que ceux offerts par les autres groupes ethniques péruviens – en d'autres termes, par les non afro-péruviens. Dans ce cas, nous pouvons conclure que c'est “un service de luxe”, car si les prix sont plus élevés, c'est que la demande est en hausse. Naturellement, si nous nous référons seulement à cette hypothèse d'honoraires à cause des caractéristiques physiques, c'est alors totalement condamnable. Mais condamnable dans quel sens?
Sommes-nous en présence d'un cas de “racisme à l'envers” ? S'il s'agit de racisme, alors pourquoi les cérémonies avec afro-péruviens coutent-elles plus cher que celles avec des employés qui ne sont pas afro-péruviens ? Nous pourrions même aller plus loin et soupçonner que ce marché est “contrôlé” par les afro-péruviens et donc qu'en réalité ceux qui ne le sont pas sont discriminés. Si un Péruvien d'origine asiatique commençait à travailler comme “porteurs de cercueils” et constatait que son travail est “moins considéré” que celui des afro-péruviens à cause uniquement de son appartenance ethnique et non à cause de ses qualifications, la discrimination ne serait pas à l'encontre des afro-péruviens, mais ce serait contre le péruvien asiatique.
Quant à Juan Arellano du blog Globalizado, il écrit:
Acá la suspicacia me gana y me pregunto si no estaremos simplemente frente a una movida de las empresas funerarias deseosas de reducir costos y dejar de pagarles más a sus empleados afrodescendientes. Con lo que al final la supuesta medida en contra de la discriminación terminaría perjudicando a los “discriminados” pues reduciría sus ingresos y limitaría sus opciones laborales… todo un contrasentido!
Il est évident qu'il peut y avoir quelque chose de raciste, ou pas, dans ces pratiques commerciales; mais il reste qu'il s'agit d'un problème sensible pour de nombreux Péruviens, indépendamment de leurs origines. Les débats continueront dans la société péruvienne, sur ce point, et sur le droit ou non du gouvernement d'intervenir pour mettre fin à une habitude profondément ancrée dans la société.