Ce billet est une contribution de la blogueuse invitée Eva Galperin, publiée sur le blog de l’ Electronic Frontier Foundation le 27 janvier
Voir aussi notre tutoriel (PDF) “Bloguer anonymement avec WordPress et le logiciel d'anonymisation TOR“
[Liens en anglais, sauf mention contraire] Comme nous l'avons vu en Iran et en Tunisie, les outils des réseaux sociaux ont porté loin la voix des activistes vivant sous des régimes autoritaires, qui peut être entendue au-delà des frontières de leurs pays. Mais l'usage des outils des réseaux sociaux ont aussi fourni à leurs gouvernements des moyens de les identifier et d'intenter des poursuites contre eux. Cette semaine, nous assistons à la même dynamique en Egypte. C'est pourquoi il est important que tous les activistes – en Egypte et ailleurs – prennent des précautions pour la protection de leur anonymat et de leur liberté d'expression. Les manifestations de cette semaine en Egypte soulignent aussi un point : les gouvernements autoritaires peuvent bloquer l'accès aux sites web des médias sociaux [NdT : voire à Internet, comme cela a été le cas cette semaine en Egypte], mais des activistes déterminés et connaissant les technologies trouveront bien des moyens de contourner la censure pour communiquer avec le reste du monde.
Dans sa tentative de bâillonner les manifestants égyptiens, le gouvernement du Président Hosni Mubarak bloque des sites web par intermittence et procède à des arrestations de blogueurs, de journalistes et de dissidents. Comme en Tunisie, les manifestants égyptiens ont beaucoup utilisé les médias sociaux pour partager les informations sur les manifestations avec l'étranger et entre eux. Malgré le fait que le gouvernement égyptien ait bloqué Twitter, des tweets des manifestants égyptiens à Suez et au Caire ont fourni des informations à jour sur le déroulement des manifestations et les mouvements de la police, le nombre de morts et de blessés, des liens vers des images sur Twitpic et des vidéos sur YouTube. La coopération entre les manifestants a maintenu la communication de jusqu'à présent. Quand les téléphones portables des manifestants de la place Tahir au Caire ont été déconnectés, des habitants du voisinage auraient rendu publique la connexion au routeur Wi-Fi de leur domicile pour permettre aux manifestants de communiquer en ligne.
Lors du premier jour de manifestations, le gouvernement égyptien a bloqué plusieurs sites web, y compris Twitter et Bambuser, un site suédois qui permet aux utilisateurs de publier des vidéos en direct à partir de leurs téléphones portables. Au deuxième jour, la rumeur du blocage de Twitter de la part du gouvernement s'est répandue de manière intermittente, puis il y a eu des informations confirmées sur la fermeture de Facebook et YouTube. On ignore si le gouvernement égyptien allongera la liste de sites web inaccessibles dans les prochains jours [Mise à jour : au samedi 29, certains réseaux de téléphonie mobile étaient à nouveau accessible, mais Internet est en grande partie coupé]. Même la Secrétaire d'état Hillary Clinton, qui a été remarquablement silencieuse pendant les manifestations qui ont conduit à la révolution tunisienne, a lancé un appel au gouvernement de M. Moubarak pour le respect de la liberté d'expression et lui a demandé de “ne pas… bloquer les communications, y compris les sites des médias sociaux.”
L'autre aspect de la campagne de censure du gouvernement de M. Mubarak est l'arrestation et la détention de blogueurs, de journalistes et de militants. Le Comité de protection des journalistes a rapporté que le gouvernement égyptien a fermé au moins deux sites indépendants d'information en ligne: Al-Dustour et El-Badil. La police a battu le correspondant d’Al-Jazeera, Mustafa Kafifi, et le reporter du Guardian, Jack Shenker, qui a publié un reportage audio de l'incident. Des policiers ont attaqué et arrêté un cameraman qui filmait les manifestations et des spectateurs qui enregistraient avec leurs téléphones portables.
L'Égypte n'est pas à ses débuts pour les arrestations de blogueurs. Le blogueur égyptien Kareem Amer [en français] a été condamné à quatre ans de prison pour “des critiques contre la religion” et “diffamation du président” en 2007. En 2009, Karim Al-Bukheiri, fondateur d'un forum web a été arrêté, torturé et placé sous surveillance constante de la police. L'année dernière, l'Islamic Human Rights Foundation (Commission islamique des droits humains) a déclaré que les forces de sécurité égyptiennes avaient arrêté au moins 29 militants dont des blogueurs, des avocats et des activistes des droits humains. “Le message est très clair – si les manifestations continuaient, le gouvernement de M. Moubarak pourrait commencer une campagne de rétorsions et d'oppression, arrêtant et harcelant tous les blogueurs ou militants qui ont fait des reportages en ligne sur les manifestations. D'autres pays ont même sévi plus que cela. En Iran, deux militants de l'opposition ont été pendus cette semaine pour avoir publié en ligne des photos et des vidéos sur les manifestations contre la Révolution verte.
Face à ces dangers, il est absolument nécessaire que les manifestants égyptiens prennent des précautions lors de leurs communications en ligne. Comme mentionné, les outils des réseaux sociaux ont fait entendre les militants, dont la voix peut être entendue bien au-delà de l'Egypte, mais les militants doivent aussi se rappeler que le gouvernement égyptien peut tout aussi bien utiliser les mêmes outils pour les identifier et exercer des représailles contre eux. Nous recommandons aux activistes politiques de consulter notre guide Surveillance Self Defense International (Surveillance autodéfense internationale) sur comment informer en utilisant les technologies de manière défensive pour la protection de leur anonymat et leur liberté d'expression en Egypte et d'autres régimes autoritaires.
1 commentaire