[liens en arabe et anglais] La publication par Al Jazeera des “Palestine Papers”, des centaines de documents relatifs aux négociations israélo-palestiniennes, a provoqué des réactions virulentes dans toute la blogosphère palestinienne. Dans ce billet nous lisons les blogueurs de Cisjordanie et de la bande de Gaza, qui ont exprimé leurs opinions tant sur les documents que sur le rôle d'Al Jazeera qui les a publiés.
A Gaza Seeran Nofal s'en prend à la chaîne d'information dans un billet intitulé “Ça suffit, Al Jazeera”. Elle fait allusion aux supposés inclinations islamistes et soutien de la télévision (arabophone) au Hamas, et écrit :
أعتقد بأن الوقت ليس مُناسباً لبث مثل هذه الوثائق حتى لو كانت تتمتع بالمصداقية ، فنحن نعاني من “فسخ” بين أكبر فصيلين ، تأتي هذه القناة لتعزز الإنقسام بنشرها لهذه الوثائق؟ أعتقد أن الجزيرة لعبت وما تزال دوراً في ترسيخ الإنقسام بين الفلسطينين
Je pense que le moment est mal choisi pour diffuser des documents comme ceux-là, même s'ils ont de la crédibilité, parce que nous souffrons en ce moment d'une faille entre les deux principaux partis, et la chaîne approfondit cette division en publiant ces documents. Je pense qu'Al Jazeera a joué, et joue encore, un rôle dans la division des Palestiniens.
Mahmoud Abbas. Photo avec l'aimable autorisation de Olivier Pacteau sous licence Creative Commons Attribution 2.0 Generic.
Mohammed Abu Allan montre cependant une photo d'un grand panneau dans une rue de Ramallah, sur lequel est écrit “Al Jazeera n'est pas arabe, Al Jazeera est sioniste”, et commente :
ولكن هذا الاتهام غير مقبول…… ليس من خلال شاشة الجزيرة خرج صوت وصورة الرئيس الراحل الشهيد أبو عمار ليقول للعالم يريدونني أسيراً أو قتيلاً أو طريداً ولكن أقول لهم شهيداً شهيداً شهيداً.
Passons aux réactions au contenu des documents, et voici ce que dit Amal (‘Espoir’) à Gaza:
Etonnamment, ce qu'exposent ces documents n'est pas si choquant, car nous savons bien tous que quelque chose allait de travers. Nous avons juste choisi de ne pas croire, je dirais plutôt nous nous sommes persuadés que nous nous trompons. […] Ce que les “documents Palestine” mettent au jour en bref, c'est que ‘des centaines de gens sont morts pour rien, des centaines de terres ont simplement été données, et les négociations ont été menées pour nous faire céder et non reprendre ce qui était autrefois à nous.’ Ainsi, en deux mots, nous avons vécu un tissu de mensonges. […] Quoi qu'il en soit, je suis arrivée à la conclusion que regarder ces divulgations c'est comme regarder une mauvaise pièce sur laquelle on espère que le rideau tombera dès que possible, sans vouloir partir parce qu'on ne veut pas manquer la fin.
Laila El-Haddad, qui est de Gaza mais vit aux Etats-Unis, a parlé avec des amis et sa famille à Gaza des documents :
Plus qu'autre chose, les détails dans les documents Palestine montrent à quel point les négociateurs étaient sans contacts avec cette réalité et ont décidé d'ignorer cette réalité. C'est cette révélation – ou ce rappel – qui a le plus irrité et désespéré beaucoup de Palestiniens. […] Par une amère ironie, et un rappel cru des conditions dans lesquelles continuent à vivre de nombreux Palestiniens à Gaza, des cousins et amis là-bas n'étaient même pas informés des révélations quand je leur ai parlé, parce qu'ils n'avaient pas d'électricité.
Un autre blogueur de Gaza, Mohammed Rabah Suliman, n'a aucune indulgence pour Saeb Erekat, le négociateur palestinien en chef :
La disparité entre un Etat et un pays est malheureusement indistincte pour Erekat qui essaie presque exclusivement depuis 18 ans d'en créer un mais a échoué. Tout ce que j'ai à lui dire, en ma qualité de Palestinien vivant dans la bande de Gaza assiégée, c'est : “Je préfère être sans Etat toute ma vie plutôt que de renoncer à un seul mètre de mon pays.”