Une conservatrice de musée qui avait déjà choqué la Corée du Sud lors d'un scandale autour de son faux diplôme de l'université de Yale et de ses relations avec certains membres du gouvernement a publié ses mémoires le 22 mars 2011, secouant à nouveau le pays par ses révélations.
Shin Jeong-ah, une professeur d'histoire de l'art et la conservatrice en chef du musée d'art Sungkok, avait été accusée d'avoir falsifié son diplôme de Harvard et d'avoir détourné des fonds destinés par des sponsors à une galerie d'art en 2007. Elle a fait 18 mois de prison.
Surnommée la “Cendrillon du monde de l'art”, Shin est devenue célèbre grâce à ses aventures avec des hommes politiques connus et des personnalités mondaines, puis avec les photos d'elle nue qui ont fait surface sur le Web et dans un journal coréen.
Le livre ‘qui dit tout’
Dans un livre “qui dit tout”, intitulé ‘4001’ (le numéro d'immatriculation de Shin durant sa détention), elle décrit en grands détails ses frasques avec des hommes de pouvoir et révèle leur véritable identité. Le premier tirage est déjà épuisé et les commandes affluent, tout comme les critiques sur les raisons qui ont poussé Shin a publier ces “mémoires”.
Dans ce livre, Shin affirme que l'ancien premier ministre, président de l'université de Séoul, Chung Un-chan, lui a proposé un travail dans la galerie d'art de l'université contre des faveurs sexuelles, ce que Chung Un-chan a immédiatement démenti.
Les lecteurs peuvent aussi se repaitre de ses relations intimes avec Byeon Yang-kyoon, un ancien conseiller de la présidence, racontées comme un roman à l'eau de rose.
Un mystérieux Monsieur C, ancien journaliste reconverti en politique, dont Shin affirme qu'il lui a sauté dessus dans un taxi, a provoqué de frénétiques recherches sur le Web pour parvenir à identifier l'homme derrière Monsieur C.
La première réaction des Coréens a été la curiosité, bientôt remplacée par le scepticisme, la réprobation, et même le boycott. Sur Twitter, beaucoup rappelle le casier judiciaire de Shin et les précédents scandales, et sont outrées de la voir gagner célébrité et argent avec un livre immoral au yeux de la société coréenne.
Sung Ryu (@DaveRyu) a tweeté le 24 mars [Coréen] :
@DaveRyu: 정작 진짜 박사학위를 가진 분들도 비정규직 시간강사로 지내면서 언제 정규직이 될지 모르는 판에 가짜 학위로 출세가도를 달렸던 신정아,,,대단하다,이젠 자서전으로 전국민 상대로 한판 벌일 모양이다.
Voyeurisme
Le professeur à la recherche d'un emploi Hamir Park (@HamirPark) analyse le 23 mars l'attention sans précédent soulevée par le livre comme un révélateur du voyeurisme latent de la société sud-coréenne [en coréen] :
@HamirPark: 신정아 출판 책이 왜이렇게 팔리는지 이해가 안간다. 안봐도 내용이 뻔하지 않나? 우리사회 관음증적 성격과 수준을 보여준다 생각한다.
Kwon Hyuk-ju (@aamyyn), un dessinateur coréen, voit sous la situation la stratégie d'une conservatrice de musée qui organisait souvent des événements et pourrait l'avoir orchestrée de bout en bout (24 mars) [en coréen] :
@aamyyn: 신정아씨가 전직 큐레이터였다는 것을 감안하면 그녀는 이번 출판행사를 통해서 예술가로 전업선언을 한 것 같다. 세상을 향해 도발하고 있다. 이건 분명 퍼포먼스다.
Le pasteur Jung-hoon Yoon (@JunghoonYoon) a répondu à un tweet lui demandant de ne pas acheter le livre le 24 :
@JunghoonYoon: 만4천원에 고위 정치인 벌거 벗길 수 있으면 싼편일지도 ㅋ RT @patriamea: 시민의 잠재적 관음증을 자극하여 장사를 하려는 신정아와 출판사의 의도가 분명하기에 절대 이 책을 사보지 않겠다.
Le livre bénéficie maintenant d'une énorme publicité, bonne ou mauvaise. Les écrivains critiquent son style très médiocre. L'auteur de best-sellers Gong Ji-young (@congjee) a tweeté le 24 mars [en coréen] :
@congjee: 신정아씨 책을 읽는데 생각보다 지루하다. (저는 취재대신 비 문학인의 수필을 거의 다 읽어요) 그냥 기자들이 호들갑 떨며 전해주는 이슈들만 찾아보는 것이 더 나을 듯. 글고 서문과 본문의 문장이 너무달라, 대필의혹이 상당히…논문 리포트도 대필이라는데
Le tweet de Gong a immédiatement provoqué une nouvelle controverse et la possibilité que le livre ait été écrit par une autre personne a instantanément fait les gros titres des sites Internet. Le même jour, Gong a retweeté [coréen] :
@congjee: 문제 많은 대한민국에서 신정아가 그렇게 중요한 뉴스인가? 어이가 없다.정말 기자들이 이렇게 하는 한 트윗하기 싫어진다. 나는 간단한 독후감을 썼고 그녀가 한 죄에 비해 과도한 마녀사냥에 시달린다고 생각했던 사람이다. 일이 이렇게까지 번지다니.
Un autre conséquence du scandale a été une décision rare du portail Naver.com, le site coréen le plus fréquenté. Le média citoyen Wiki Tree a publié [en coréen] un article révélant que Naver.com avait pris la précaution d'effacer toutes les vraies identités possibles ou approchantes de Monsieur C de son moteur de recherche interne, avant d'avoir reçu la moindre demande dans ce sens.
Naver a déclaré que cette mesure avait été prise pour éviter des procès en diffamation, mais cela n'a fait qu'encourager les internautes coréens à penser qu'il avait été soumis à des pressions en coulisses de la part de certaines personnalités politiques qui figurent dans le livre.