Nigeria : A la dérive, et dans l'attente d'une femme ?

Tous les liens sont en anglais.

Je dois le titre de cet article à mon ami sur Facebook, TJ :

Most Nigerians don't know, that all of Nigeria is adrift, awaiting the arrival of a woman…

La plupart des Nigérians ignorent que leur pays est à la dérive, attendant l'arrivée d'une femme…

La femme en question, Ngozi Okonjo-Iweala (NOI), est la nouvelle Ministre des Finances et de l’Économie du Nigeria. Jusqu'à récemment, NOI était la directrice générale de la Banque Mondiale.

Le déchaînement de la presse sur sa nomination a immédiatement contaminé les internautes qui ne cessent de parler de la plus puissante femme du cabinet du président nigerian, Goodluck Jonathan. Beaucoup la considèrent comme le meilleur élément de son équipe.

Ngozi Okonjo-Iweala, la nouvelle Ministre des Finances du Nigéria. Source: FMI (domaine public)

Ngozi Okonjo-Iweala est, sans aucun doute, une fauteuse de troubles, comme le rappelle @nmachijidenma :

“When I became finance minister they called me Okonjo-Wahala – or Trouble Woman. It means ‘I give you hell.’ But I don't care what names they call me. I'm a fighter; I'm very focused on what I'm doing, and relentless in what I want to achieve. If you get in my way, you get kicked.”

The above were statements by Nigeria's former minister for finance, Ngozi Okonjo-Iweala, on her ministerial tenure in Nigeria.

« Quand j'étais Ministre des finances, on m'appelait Okonjo-Wahala – “je vous rends la vie dure”. Mais peu m'importent les noms dont on m'affuble. Je suis une combattante ; je suis très concentrée sur ce que je fais et acharnée dans la poursuite de mes objectifs. Quand on se met sur mon chemin, on en paye le prix. »

Ces mots sont de l'ancienne Ministre des finances à propos de son mandat ministériel.

Segun Adeleye applaudit le patriotisme de NOI et la bonne volonté du président Goodluck :

The engagement of Dr Ngozi Okonjo-Iweala, World Bank managing director, as the Minister of Finance, the position she formerly occupied under the President Olusegun Obasanjo administration, can be seen from the point of view of great sacrifices both on the part of President Goodluck Jonathan and Okonjo Iweala. Without any preview to the negotiation that brought the former finance minister back, the President must have conceded a considerable power to her to manage the economy, while on her part, for a second time, she is resigning the job that has made her a global star to serve her father's land.

La nomination de Ngozi Okonjo-Iweala, directrice de la Banque Mondiale, au ministère des Finances, position qu'elle a déjà occupé dans le gouvernement du président Olusegun Obasanjo, peut être vue comme un grand sacrifice de la part du président Goodluck Jonathan aussi bien que d'Okonjo-Iweala. Le président a dû lui concéder un pouvoir important dans la gestion de l'économie pour la faire revenir, et elle a démissionné pour la seconde fois d'un poste de renommée mondiale pour servir la terre de ses ancêtres.

Dans un pays où la corruption est la norme, il faut bien être un peu « fauteuse de trouble » pour devenir la réformatrice économique du Nigeria. Selon le site TED :

As the first female Finance Minister in Nigeria, Ngozi Okonjo-Iweala attacked corruption to make the country more desirable for foreign investment and job creation. Now as a director of the World Bank and head of the Makeda Fund, she works for change in all of Africa.

En tant que première femme à la tête du ministère des finances nigérian, Ngozi Okonjo-Iweala s'est attaquée à la corruption pour rendre le pays plus séduisant pour les investisseurs étrangers et la création d'emplois. Aujourd'hui, en tant que directrice de la Banque Mondiale et présidente du Fonds Makeda [une fondation qui soutient les initiatives économiques des femmes en Afrique, NdT], elle œuvre pour le changement dans toute l'Afrique.

Lors de son premier passage au ministère des finances, NOI a été créditée d'un certain nombre de réalisations :

President Olusegun Obasanjo recruited Ngozi Okonjo-Iweala from the World Bank and made her Nigeria’s finance minister from 2003 to 2006, and briefly foreign minister in 2006. During her time in office, she was probably the most successful and highest profile minister in Obasanjo’s government. Ngozi Okonjo-Iweala promoted transparency into the Nigerian government’s finances by publishing in the newspapers Abuja’s monthly funding allocations (largely based on oil revenue) to each of the thirty six states. She also oversaw Nigeria’s first sovereign credit ratings from Fitch and Standard and Poor’s, BB- at the time.

Le président Olusegun Obasanjo a fait de Ngozi Okonjo-Iweala son ministre des finances de 2003 à 2006, puis son ministre des Affaires étrangères pour un bref mandat en 2006. A l'époque où elle a occupé ces fonctions, elle était certainement la ministre la plus brillante et la plus médiatisée du gouvernement Obasanjo. Elle a encouragé la transparence dans les finances du gouvernement nigérian en faisant publier les crédits (issus principalement des revenus du pétrole) alloués par Abuja à chacun des 36 états. Elle a également supervisé la première notation des crédits souverains du pays par les agences Fitch et Standard & Poor's (la note était BB- à l'époque).

Mais les obstacles sont nombreux et justifient les craintes pour Ngozi Okonjo-Iweala :

This, indeed, is good news for Nigerians, but the challenge is how Okonjo-Iweala will achieve this in an environment where both the executive and legislature are neck deep in profligacy. Already, Okonjo-Iweala has been reported to be getting threat calls from corrupt politicians and businessmen warning her not to return to Nigeria for this assignment. …. There are fears that the lady might be isolated in a cabinet that may not be on the same wavelength with her on some of the sensible reforms she would likely introduce. In particular, she is likely to step on some big toes in her bid to try to reduce the high cost of government.

C'est une bonne nouvelle pour les Nigérians, mais le défi pour Okonjo-Iweala consistera à travailler dans un contexte où l'exécutif comme le législatif sont prodigieusement dépensiers. Des politiciens corrompus et des hommes d'affaires la menacent déjà pour la dissuader de rentrer au Nigéria occuper son nouveau poste. (…) On craint qu'elle ne se retrouve isolée dans un cabinet qui ne sera pas nécessairement sur la même longueur d'onde qu'elle sur certaines réformes sensibles qu'elle souhaiterait mettre en place. On peut craindre en particulier que sa tentative de réduction des coûts du gouvernement en contrarie plus d'un.

Son implication dans la Banque Mondiale est lourde d'ambiguïtés et ce ne sera pas évident de se débarrasser de l'étiquette “impérialiste”. Uchenna Osigwe soutient que :

I have nothing against NOI and actually rejoice with her in her modest achievements in her chosen field. But I am also conscious of the fact that the institutes she works for are imperialist institutes that have not lifted any so-called third world country out of poverty. I challenge anybody reading this to point out one country in the southern hemisphere that has been lifted out of poverty by the institutes that has been in existence for that very reason for almost 70 years now. None. On the contrary, those who achieved any significant measure of financial autonomy, like Brazil, did it in opposition, indeed in defiance, to the prescriptions of those institutes.

Je n'ai rien contre NOI et me réjouis même de ses modestes réussites dans les combats qu'elle a choisis. Mais je suis aussi conscient du fait que les institutions pour lesquelles elle travaille sont des organisations impérialistes qui n'ont sorti aucun des pays dits du tiers-monde de la pauvreté. Je mets au défi mes lecteurs de trouver un seul pays de l'hémisphère sud qui ait été sorti de la pauvreté par les institutions dont l'existence est pourtant justifiée par cette mission depuis 70 ans. Il n'y en a aucun. Au contraire, ceux qui ont accédé à une certaine autonomie financière, comme le Brésil, y sont parvenus en défiant les recommandations de ces institutions.

Malgré cela, NOI sera une bouffée d'air frais pour le Nigeria. Aussi est-il difficile de contredire Nmachi Jidenma :

… For corrupt and undisciplined government officials: ‘wahala dey’. It looks like ‘the trouble woman’ is back in town! This is of course good news for Nigerians and most of us would be happy to have her back.

Aux fonctionnaires corrompus et indisciplinés : wahala dey. Il semblerait que « la fauteuse de trouble » soit de retour ! C'est bien sûr une très bonne nouvelle pour les Nigerians et beaucoup d'entre nous seront heureux de la revoir ici.

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