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Népal : Le nouveau Premier ministre sera-t-il différent ?

Catégories: Asie du Sud, Népal, Gouvernance, Médias citoyens, Politique

Le Népal vit sur les montagnes russes depuis l’ élection  de l'Assemblée constituante en 2008. Le choix des électeurs pour la direction politique a été contrasté : les Maoïstes émergèrent comme le premier parti, mais étaient loin d'avoir une majorité. Les partis dirigeants comme  le Nepali Congress,  le Parti Communiste Népalais (Marxistes et Leninistes Unis ou UML) furent sérieusement affaiblis et les partis régionaux n'ont pu s'assurer que quelques sièges. Ceci a bouleversé les équilibres traditionnels et a entrainé des alliances contraintes. 

Conséquence : le pays a eu trois Premier ministres ces quatre dernières années et la nouvelle Constitution promise n'est pas près d'être finalisée.

[Liens en anglais] Manque de direction stable et conflits constants entre les partis ont affecté la jeune démocratie du Népal et le pays se trouve avec un nouveau dirigeant, une fois de plus. Un dirigeant des maoïstes, le Dr. Baburam Bhattarai [1] a prêté serment comme le 34ème Premier ministre du Népal la semaine dernière. United We Blog for Democratic Nepal [2]a commenté  l'élection du Dr. Bhattarai et souligne que contrairement aux anciens dirigeants, il est soutenu par tout l'échiquier politique :

Les politiques à travers l'échiquier politique ont soutenu BRB pour être Premier ministre principalement à cause de sa performance impressionnante comme ministre des finances dans le cabinet de Prachanda et à cause de son image libérale, intellectuelle, qui a fait de lui le favori des médias et de la classe moyenne.

Les nouvelles de son élection ont provoqué beaucoup de réactions positives sur Twitter aussi. Anil Ghimire du blog Aakar Post [3] a compilé les réactions des utilisateurs népalais de Twitter.

[4]

Le Premier ministre Dr. Baburam Bhattarai. Photo prise par Krish Dulal. (CC BY -SA 3.0)

Pendant son mandat de ministre des finances, le Dr. Bhattarai a conforté sa  position auprès des  Népalais à court d'argent en décidant de renoncer aux voitures chères pour des véhicules “made in Népal” qui ont un meilleur rapport efficacité-prix. Le journaliste Benjamin Graham [5] souligne dans son blog:

 

 

 

 

Jamais un simple 4X4 n'a attiré autant d'attention que le Mustang Max quatre-portes qui circula à travers les rues de Katmandou, au Népal, lundi. Le nouveau Premier Ministre fraîchement élu du Népal, le Dr. Baburam Bhattarai, se trouvait à bord du véhicule, et il choisit de conduire son automobile fabriquée au Népal à sa cérémonie de prestation de serment de son nouveau cabinet à Singha Durbar, le bâtiment parlementaire du Népal. Le choix de transport de Bhattarai marque une rupture avec une longue tradition établie parmi les Premiers ministres népalais, qui optent habituellement pour des automobiles coûteuses et luxueuses fabriquées à l'étranger.

Le 4X4 discret, qui n'a ni l'air conditionné ni vitres électriques, sans mentionner les vitres pare-balles, a attiré des badauds dans les rues et provoqué une tempête de bavardages sur les réseaux sociaux.

Mais tout le monde n'a pas été impressionné. L'ancien assistant du Secrétaire Général des Nations unies et grande personnalité intellectuelle du Népal, Kul Chandra Gautam [6] , affirme que la position idéologique exagérée de Bhattarai n'inspire pas confiance dans son gouvernement :

Mais Bhattarai porte aussi un bagage d'idéologue renfrogné et dogmatique. Alors que récemment il a essayé de s'autoproclamer comme un progressiste modéré qui est pour la paix, la démocratie et la Constitution, il n'a pas hésité à faire des alliances stratégiques avec les dirigeants de la faction la plus intransigeante de l'UCPN des Maoïstes. S'il arrive à se libérer des griffes des partisans de la ligne dure, et s'élever au-dessus de son propre opportunisme léniniste, cela déterminera son succès et, dans une certaine mesure, la future direction du pays.

Les crimes commis pendant l'insurrection maoïste peuvent aussi revenir hanter le nouveau Premier Ministre.

NepalNews.com [7] rapporte qu'un célèbre groupe d'activistes  et d'intellectuels a publié une déclaration dénonçant la proposition des Maoïstes d'accorder une amnistie générale pour les crimes commis pendant l'insurrection :

“Nous condamnons la proposition du parti maoiste pour retirer et rendre nulles toutes les poursuites pour les crimes commis pendant le conflit, et pour accorder l'amnistie générale à ceux qui ont été jugés coupables par les tribunaux. Cette proposition du parti Maoïste va à l'encontre des responsabilités nationales définies par le traité de paix  , la Constitution transitoire et les lois humanitaires internationales”  stipule un communiqué paraphé par 13 membres du groupe.

Il n'y a pas de doute que le nouveau Premier ministre fait face à de rudes défis. Mais il a fait preuve de tact en se mélangeant à la foule  pour affirmer sa position. S'il arrive à retenir ses partenaires de la coalition et à satisfaire les  partisans de la ligne dure, ainsi qu'à  créer un environnement favorable au travail au sein du gouvernement, il peut aussi  briser le cycle des déceptions.