Cameroun : La balance penche pour Biya selon une fuite des résultats provisoires

Ce billet fait partie du dossier de Global Voices sur les élections de 2011 au Cameroun

Une semaine après l'élection présidentielle du 9 octobre 2011 au Cameroun, la Commission Nationale de Recensement Général vient de terminer l'analyse des minutes des 24.000 bureaux de vote éparpillés au Cameroun et à l'étranger, et a établi un décompte provisoire des bulletins de vote.

L'hebdomadaire Le Messager en a publié une fuite dans un article, ensuite repris par camer.be. Les résultats définitifs doivent être annoncés par la Cour Suprême le 24 octobre 2011.

La possible réélection de Paul Biya

Les chiffres provisoires, selon le décompte de la Commission Nationale de Recensement Général, accordent au Président sortant Paul Biya, qui se représentait, 77% des voix. Deuxième, son opposant historique, Ni John Fru Ndi, avec environ 10%, est suivi par Garga Haman Adji qui a réuni 3,21% des suffrages.

Temporary results as transmitted to the Supreme Court. From www.camer.be

Les résultats provisoires transmis à la Cour Suprême. Source : www.camer.be

Commentaire d'un internaute camerounais sur le billet de camer.be :

le messager ne respecte pas la loi, on a interdit de publier les tendances

Radio France Internationale (RFI) explique :

A ce stade, aucun résultat provisoire n’est publié. Cette prérogative a été retirée à Elecam par l’Assemblée en mai dernier, au profit du seul Conseil constitutionnel.

Au delà de l'éventuelle infraction à la loi par le magazine camerounais, des internautes s'attendaient à ces résultats et supposent que la faute revient à l'opposition. 18OO°-CELSIUS écrit, d'Allemagne :

18 individus réunissent en tout et pour tout 5,01% ! quelle moquerie! rembourser nos dizaines de millions que vous avez reçus pour la pseudo campagne! on ne vous connait pas! toute l'opposition réunie n'arrive mm pas à franchir le cap de 25% de suffrages, quelle honte!

ALEXANDER_LEGRAND renchérit :

L'homme lion est très fort, pas les histoires que Gbagbo avait voulu gagner avec 51% . Quelque soient les contestations il sera au dessus de 50%. 7 longues années de misère nous attendent encore, à moins qu'il casse sa pipe avant.

L'internaute The Economist commente depuis la Suède :

Le problème au cameroun n'est pas l'opposition. La démocratie permet à quiconque (y compris vous et moi) de devenir président pour peu qu'il reçoive la confiance du peuple. contraindre les partis d'opposition à s'unir avec d'autres est une insulte à la démocratie. la vérité est ailleurs et concerne le système électoral en place.

Et de poursuivre :

La ligne directrice devrait être l'introduction d'une élection à deux tours forçant les petits partis à se rallier aux grands. Demandons seulement un système électoral crédible et cessons de jeter la pierre pour rien !

Des résultats anticipés, un ballon d'essai ?

Ces résultats ont paru surprenants à certains internautes. Dans la pratique, d'après l'outil Google trends, Edith Kahbang Walla était parmi les trois candidats comptant le plus grand nombre de recherches sur le moteur Google. Aucun sondage d'opinion n'a été donné pendant le scrutin présidentiel, et du fait du faible taux de pénétration d'Internet au Cameroun, il faudrait relativiser cette estimation, susceptible de se rapporter surtout aux recherches de la diaspora.

AmaraSt commente sur Twitte r:

0.71% pour #KahWalla très étonnant… Peut-être qu'elle s'est trop centrée sur la #diaspora et pas assz sur ceux au #Cameroun

A quoi Dibussi, un écrivain et journaliste qui vit à Chicago, répond :

A mon avis ces résultat sont un ballon d'essai du régime pour voir la réaction des gens et préparer l'opinion aux résultats de la Cour Suprême

La conjecture que le pouvoir sortant pourrait avoir orchestré la fuite de ces résultats est partagée par d'autres journalistes, dont Edouard Tamba, basé dans la capitale Yaoundé : il écrit que “tout est possible avec la presse camerounaise”. Un autre journaliste camerounais, anonyme, ajoute :

C’est cette presse qui est allée toucher de l’argent au Ministère de la Communication et au Cabinet civil de la présidence de la République pour la “couverture” de l’élection

Une affirmation appuyée par le journaliste camerounais Christophe Bobiokono sur son blog dans un billet intitulé “Contrôle des médias : Le Renouveau couvre la presse de billets de banque pour acheter la paix“.

La crainte d'une crise post-électorale

Sur sa page Facebook, Edith Kahbang Walla, aussi appelée Kah Walla a annoncé :

Hier 15 octobre, 6 dirigeants de l'opposition camerounaise (Kah Walla, John Fru Ndi, Adamou Ndam Njoya, Ben Muna, Jean de Dieu Momo, Albert Dzongang) se sont rencontrés et ont développé une position commune  et un plan d'action concernant le processus électoral réalisé le 9 octobre 2011. Les détails seront communiqués dans une conférence de presse lundi 17 octobre à 11 heures au siège de l'UDC à Yaoundé.

Ils ont signé la Déclaration de Yaoundé dans laquelle la coalition dénonce les irrégularités du scrutin, et exige pour cette raison l'annulation de l'élection du 9 octobre 2011, conformément à l'article 99 de la loi N° 92/010 du 17 septembre 1992, et l'organisation de nouvelles élections dans les six mois.

Selon unarticle de la Voix de l'Amérique, Fred Mitchell, qui a conduit la mission des observateurs du Commonwealth au Cameroun a fait connaître sa satisfaction des élections :

Nous avons observé le fait que l'élection a été conduite sans violences,” a dit M. Mitchell, “que les gens n'ont ressenti aucune forme de coercition pour aller voter, et malgré l'existence de certains problèmes administratifs et logistiques, nous croyons qu'il y a eu un effort apprécié d'établir l'ELECAM comme une institution indépendante pour les élections. Je pense que c'est quelque chose dont votre pays peut s'enorgueillir.

Devant l'Assemblée Nationale française, Alain Juppé, questionné par un député d'opposition sur l'appui constant de la France aux dictateurs africains, a déclaré :

Ce que je peux vous dire, c’est que, selon l’Organisation internationale de la francophonie et le Commonwealth qui ont suivi le déroulement de ces élections, on peut considérer aujourd’hui qu’elles ont eu lieu dans des conditions acceptables.

Le magazine panafricain Jeune Afrique n'en a pas moins rapporté le meurtre de Virginie Takoguem, une sympathisante supposée du SDF, le jour de l'élection, dans des circonstances qui n'ont pas été élucidées à ce jour.

Par ailleurs, des images du dépouillement des bulletins dans certains bureaux de vote du pays ont fai tle tour du Net.Le blog Africa Through a Lens en a publié certaines :

An electoral official checks an election result sheet using a lantern after the Presidential election in Yaounde, Cameroon, Sunday, October 9. 2011 - www.africathroughalens.com

Un fonctionnaire électoral vérifie une feuille de résultats à la lueur des bougies après l'élection présidentielle à Yaoundé, au Cameroun, dimanche 9 octobre 2011 – www.africathroughalens.com

Le quotidien Le Jour a aussi rapporté que l'un des 22 candidats d'opposition, Jean-Jacques Ekindi, a dénoncé les irrégularités sur sa page Facebook. Sur la vidéo ci-après, mise en ligne sur Youtube par l'abonné JeanMarieEssono, l'encre soi-disant indélébile a disparu des pouces de deux électeurs venant de voter :

Le journaliste Edouard Tamba explique ainsi la récente fuite des résultats provisoires :

Pour tout observateur de la scène politique au Cameroun, il n’y a pas de surprise réelle dans ces “résultats”. Les choses étaient mal parties avec: Elecam et ses responsables proches du pouvoir en place, un exécutif hyper-puissant et maître absolu du calendrier, une opposition qui excelle dans l’amateurisme et s’agite à la dernière minute. Où je vis à Yaoundé, tous ceux qui sont revenus des bureaux de vote n’avaient plus d’encre aux pouces. Certains n’ont pas eu leurs cartes. Et d’autres ont eu plusieurs cartes dans la même ville ou dans plusieurs ville. Le résultat ne peut être qu’en faveur de celui qui organise et se préparait depuis des années.

Radio France Internationale rapporte une déclaration de John Fru Ndi, le chef du Social Democratic Front, et opposant historique de Paul Biya :

Dans le cas ou le Conseil constitutionnel refuse d’annuler cette

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