Tous les liens ci-dessous sont en anglais.
L'armée kenyane a récemment lancé une offensive militaire surnommée “Operation Linda Nchi” (Opération Protection de la Nation) à l'encontre du groupe islamiste somalien Al Shabaab. Suite à l'offensive, Al Shabaab a menacé d'attaquer Nairobi. La capitale kenyane a déjà été touchée par deux attentats à la grenade, l'un dans une boîte de nuit populaire et l'autre à un arrêt de bus très fréquenté du centre-ville de Nairobi.
Ces deux attentats ont suscité des débats sur la Toile. Le blog A Nairobian Perspective propose des “Astuces pour survivre à un attentat à la grenade“:
Ceci est ma propre contribution et je vais l'écrire en gras car la grande majorité des Kenyans agissent de façon insensée quand un désastre se produit. Ne vous rendez pas sur les lieux d'un attentat pour aller voir ce qui se passe. Les terroristes aiment à détoner des cibles secondaires pour tuer autant de policiers et de personnel médical que possible. Par ailleurs, vous risquez d'entraver ou d'interférer avec les secours et la recherche d'indices !
Gukira met en garde contre les sentiments xénophobes ou discriminatoires qui pourraient émerger à l'encontre des Kenyans d'origine somalienne :
A l'Aéoport International Jomo Kenyatta (de Nairobi), une femme somalienne me voit, lance un sourire à son compagnon, m'identifie comme un des leurs, commence à me poser une question mais pas en anglais. Je souris avec une pointe de regret, maudissant mes capacités linguistiques limitées, et j'avoue que je ne suis pas Somalien : c'est juste que je leur ressemble. Elle sourit à nouveau et acquiesce: c'est vrai qu'on me prendrait pour un Somalien.
Quand je raconte cet incident à ma mère, elle me dit de parler Gikuyu à voix haute en public. Je ne sais que rétorquer. Et je n'ai certainement pas le sourire aux lèvres.
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Le chauvinisme ethnique a été alimenté et renforcé. Un flot constant d'histoires commence à émerger pour justifier cette guerre, parce que Al Shabaab/les Somaliens se font menaçants.
Ils volent les extraits d'acte de naissance des vrais Kenyans.
En vivant à Eastleigh, une “nation au sein de la nation”, ils refusent de s'intégrer.
Ils déjouent les lois sur l'immigration et menacent notre unité.
Ils ont trop d'argent, sans doute provenant de la vente d'armes.
Ils constituent une menace pour notre industrie touristique.
Le sentiment anti-somalien n'est jamais subtil et se fait de plus en plus visible, alors même que nos dirigeants nous disent qu'il s'agit d'une guerre contre Al Shabaab, et non contre la Somalie ou les Somaliens. Je me demande si les bombes qu'on lâche font elles aussi la différence.
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On dirait qu'on a une seule couleur de référence et c'est le vert: allez tuer, c'est un ordre.
Wamathai abonde dans le même sens:
Nos frères d'Eastleigh, du Nord-Est du pays, de Nanyuki, de Mombasa, de Lamu et de Nakuru (villes du Kenya) sont pris entre les mailles d'une situation très très inquiétante. Beaucoup d'entre eux, ainsi que leurs pères et leurs mères, ont œuvré dans la police pour préserver la sécurité de nos rues, ou ont combattu dans l'armée kenyane depuis les années 60.Ils sont au cœur de nos troupes les mieux entraînées, notre division de lutte contre le vol de bétail, si essentielle et nécessaire. Beaucoup d'entre eux risquent leur vie en ce moment même à Kismayu tandis que leurs familles se font insulter et maltraiter à Eastleigh. Ils ne devraient pas avoir à prouver leur appartenance à la nation. Nous sommes en terrain inconnu et notre comportement à l'égard de nos concitoyens va définir notre avenir commun.
IddSalim s'interroge sur les raisons implicites ayant causé l'offensive militaire kenyane et doute que celle-ci ait été lancée au moment opportun :
Tout d'abord, je ne suis pas en faveur d'une ‘guerre’ entre la Somalie et le Kenya. On n'est pas capables de les battre au football et on veut les défier au jeu du chat et de la souris qu'ils jouent chaque jour ? Mais ceci n'est pas la raison de mon absence de soutien. Des milices somaliennes (venant de Somalie, pas du Kenya) tuent des Kenyans depuis des années dans le Nord-Est du pays. Aucune action de grande ampleur n'a été entreprise. Mais dès qu'ils kidnappent des Européens (nos dieux), on s'engage dans une guerre en règle. Où est notre sens de la fierté nationale ? Pourquoi accorde-t-on plus d'importance aux vies des touristes qu'aux nôtres ? Les êtres humains ne sont-ils pas égaux ?
Sur le site Trendsmap, la page de Nairobi montrait que le mot ‘grenade’ figurait en tête de liste des mots-clics sur Twitter.
SKibuchi nous rappelle la fameuse chanson de Bruno Mars :
al shabaab cnt stop me i gt Bruno Mars 2 catch the grenade 4 me
“Al Shabaab ne peut pas m'arrêter, j'ai Bruno Mars pour m'attraper la grenade au vol.”
Alors que de nombreux Kenyans se demandent si d'autres attentats sont à venir, les internautes semblent prendre leurs précautions en s'encourageant mutuellement à ne pas alimenter des perceptions négatives à l'égard de leur concitoyens d'origine somalienne.