[liens en anglais] Le jugement controversé ordonnant la fermeture de stations de radio et télévision a donné à la justice au Liberia une occasion rare de sévir. Le 7 novembre 2011, le gouvernement libérien a procédé à la fermeture de trois stations de radio-TV (Love FM / TV, Power FM / TV et Kings FM) pour avoir supposément diffusé des messages susceptibles d'inciter à la haine et à la violence. La fermeture de ces radio et TV a été accueillie par beaucoup de critiques de la part de nombreux Libériens.
Les stations ont été forcées de suspendre leurs émissions suite à une plainte déposée par le Ministre de la justice Tah Christiana et le ministre de l'Information Cletus Sieh.
Toutefois, le juge James Zota a ordonné la réouverture des médias fermés, soutenant que bien que le délit était punissable d'après la loi, le tribunal pensait qu'il sied de ne pas imposer des sanctions contre les accusés pour garantir la liberté de la presse au Liberia.
Résumant cette décision sur Liberia Elections 2011 Media Monitoring Group, (Groupe de surveillance des médias sur les Elections au Libéria 2011), Mohammed Ali a écrit:
Le tribunal pénal A vient de statuer dans l'affaire donnant tort aux médias sur la base des éléments de preuve fournis par le gouvernement. La Cour dit que les éléments de preuve fournis par le gouvernement ont prouvé que les 3 médias ont effectivement diffusé des messages haineux. Toutefois, la Cour a dit que puisque c'était dans une conférence entre ces 3 médias et le gouvernement et non pas lors d'un procès, les médias devaient être rouverts avec le plus sérieux avertissement qu'ils seraient fermés définitivement s'ils venaient à répéter ces messages de haine.
Un commentaire posté sur le blog de l'African Election Project (Projet électoral africain) a rejeté le “style cow-boy” de la fermeture et le “style kangourou” du “pardon”:
Peut-être qu'il aurait été plus honorable de commencer d'abord par rejoindre les autres pour dénoncer, catégoriquement condamner et rejeter à la fois le style cowboy de la fermeture des trois médias et le processus plutôt tordu, en style kangourou, qui a conduit à leur “pardonner”. Il est honteux et inquiétant que le Liberia, après avoir enduré une guerre civile cataclysmique à cause de la tyrannie politique et de la justice sélective, soit contraint d'emprunter encore des sentiers sombres.
Pourquoi le gouvernement a-t-il fermé les yeux sur «un magazine sans une direction éditoriale connue» qui était comme «tombée du ciel”?:
Un jour ou deux avant le brasier du 7 novembre, un magazine sans direction éditoriale connue, comme tombé du ciel et distribué gratuitement, décrivait certains Libériens comme des fauteurs de troubles et des charlatans dangereux. Le gouvernement n'a émis aucune mise en garde à ce sujet. C'était du journalisme patriotique. Pendant la campagne et même aujourd'hui, des médias “assujettis” au gouvernement continuent à diaboliser certains partis et politiciens. Ces publications ne sont ni des messages “handate” ni “anti-paix” …
Vote4Africa, un groupe de défense a résumé l'affaire dans le tweet ci-dessous:
@vote4africa#Liberia: 3 médias reconnus coupables d'incitation à la haine, aucune sanction.
R.S.W. Chea, un avocat libérien, enseignant et membre du clergé, a choisi d'aborder la question sur Cafe LIB, un réseau social, en analysant sur le fond les trois principaux problèmes du Libéria : la corruption, l'ignorance et l'analphabétisme [LIB Cafe est une plateforme de réseau mondial pour les Libériens et les amis du Liberia, qui exige un mot de passe] :
À la lumière de la destruction actuelle des propriétés privées et publiques, ce problème devrait être la préoccupation de tous les Libériens, au-delà des hommes et des partis politiques. En matière de développement, nous sommes déjà bien sous-développés, et à quel point pourrions-nous être encore plus sous-développés ? Tous ces incendies de médias, de bâtiments et de véhicules du gouvernement nous repoussent encore plus en arrière économiquement, socialement et psychologiquement. C'est pour cette raison que nous sommes là où nous sommes. Nous avons de nombreux problèmes au Liberia et ils sont tous dus à l'absence de civisme, mais au-dessus de tout, il y a trois problèmes majeurs, à savoir la corruption, l'ignorance et l'analphabétisme. Cependant, je traiterai de l'ignorance et de l'analphabétisme très brièvement pour continuer sur la question de nos comportements qui démontrent notre manque de civisme. Remarquez que les deux premiers problèmes (l'ignorance et l'analphabétisme) ne sont pas synonymes, mais distincts, mais ils se complètent mutuellement.
@africareview résume le cas en peu de mots, mais significatifs :
Tribunal, donnez aux émetteurs radio et TV # Liberia une seconde chance
@Leo_Johnson, un jeune Libérien progressiste qui se fait remarquer sur Twitter a dit :
Ces médias ont été reconnus coupables de répandre des messages haineux au Liberia
Avant même que le tribunal ordonne la réouverture des médias fermés, les Libériens de la diaspora avaient exprimé leurs points de vue sous différents angles. Jérôme Gayman de Fort Pierce, en Floride, aux États-Unis a écrit :
Quand je suis allé au travail ce mardi matin, la première chose que mon patron a demandé a été : “Qu'est-il arrivé à la liberté de la presse ? Qu'est-il arrivé aux droits de l'homme ?” Cette fois, j'avais opté pour la réélection d'Ellen parce qu'elle a fait plein de bonnes choses dans ce pays, un type de développement que nous n'avions jamais vu à notre époque. Sous son administration, j'ai été impressionné par trois faits pour lesquels je lui avais donné des notes très élevées : la liberté de la presse, le développement économique et le droit des femmes. Mais j'ai été choqué quand j'ai entendu ce qui s'est passé ce lundi.
Les manifestants ont le droit de protester. Cela m'a rappelé April 14 Rice Riot (l'émeute pour le riz du 14 avril) et je ne pouvais pas imaginer que cela pouvait arriver sous elle. Je veux dire, comment cela pouvait-il arriver sous elle ?
Contrairement à Jérôme, Moses Dolo de Tigard, en Oregon, aux États-Unis, s'explique en suivant un chemin différent:
Nous regrettons la mort de tout Libérien, mais le gouvernement a la responsabilité de protéger la majorité de la population libérienne. Les politiciens et les médias ne devraient pas inciter notre peuple à la violence pour leurs objectifs égoïstes.
Kadiatu Henry, une dame résidant en Pennsylvanie, aux États-Unis, s'est expliquée encore bien mieux :
Pour moi, le gouvernement a réagi avec excès. La police devait être un peu plus tolérante et même si on l'avait provoquée jusqu'à devoir tirer, elle aurait du tirer seulement en l'air et non sur les gens, surtout après qu'elle ait fait usage de gaz lacrymogènes. Pour les médias fermés, il est difficile de maintenir un équilibre entre la liberté de la presse et l'abus de cette liberté. Le gouvernement pourrait avoir eu tort de les fermer mais il a peut-être senti qu'un danger beaucoup plus grave pouvait provenir de la diffusion fréquente de ces scènes laides maintes et maintes fois, surtout que l'élection était prévue pour le lendemain.
Trouble Sayeh, de Columbus, en Ohio, aux États-Unis, pense que cela pourrait être un signe supplémentaire de futurs ennuis :
Ces deux actions de la police, de tuer et de réprimer brutalement les médias, m'ont simplement convaincu maintenant que Ellen a été tendre durant son premier mandat seulement pour berner les Libériens. Maintenant, ayant obtenu son second mandat, elle pourrait montrer son vrai visage comme elle n'aura plus besoin du vote du peuple libérien.
Honnêtement, je suis surpris mais là encore, non pas parce qu'elle se montre juste comme n'importe quel dirigeant africain qui est capable de tout changer à tout moment, même si cela signifie que les choses iront de mal en pire. Suivons son deuxième mandat. Ce pourrait être un signe de plus d'ennuis à venir.
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