Venezuela : Réponses à la violence urbaine

La violence urbaine a été, depuis des décennies, l'une des plus importantes préoccupations des sociétés d'Amérique latine.  Les formes de violence sont diverses et leurs causes dépendent des processus historiques et sociaux, lesquels varient selon les pays. Cependant, il demeure clair que l'inégalité économique à laquelle s'est heurté l'exode rural à la moitié du 20ème siècle a été la source principal des crimes et de la violence dans les villes d'Amérique latine. Les villes du Venezuela ont connu une très forte augmentation de ce problème à partir des années 80 suite à la crise économique.

A l'heure actuelle,  la violence urbaine fait réfléchir  et discuter les Vénézuéliens qui s'expriment sur les réseaux sociaux. Avec la crise des prisons et l'augmentation des morts violentes ces dernières années, ceux-ci s'associent davantage aux diatribes pro et anti gouvernementales.  De plus, les élections présidentielles de l'an prochain amorcent de nouvelles discussions.  Les candidats essaient de faire des propositions  offrant à tout prix des solutions variées. Toutefois, pour les plus pessimistes, il est besoin d'actions d'une dureté exceptionnelle et ce, quelles qu'en soient les conséquences.

Le déploiement national d'une branche des Forces armées bolivariennes, connues sous le nom de Guardia del Pueblo, a été la réponse la plus récente donnée par le gouvernement, un fait qui semble éveiller la curiosité, susciter l'inquiétude et le scepticisme dans les discussions que l'on peut voir sur Internet. Les réflexions faites autour de ce problème donnent à voir l'une des réalités auxquelles aucun groupe social ne peut échapper au Venezuela. Un véritable point commun dépassant de loin les positions politiques.

Descente policière dans les quartiers de Caracas en décembre 2009. Photo de Miguel Gutierrez, copyright Demotix.

 

Naky, dans un récit qu'il fait d'un accident de circulation, exprime clairement ses idées :

Nous vivons dans cette infinie et fausse croyance que si nous faisons attention, si nous changeons de trajets pour ne pas arriver ni partir toujours par le même endroit, si nous nous adaptons à la lumière du jour – assez courte en ces soirs d'hiver -, si nous nous déplaçons en groupe, si nous ne portons pas de vêtements luxueux, ni de montre, ni de mobile ni de lecteur pour écouter de la musique, nous serons des proies moins tentantes et nous serons moins vulnérables.  (…) Nous y perdons. Nous y perdons tous. Le savoir-vivre luit comme un luxe inaccessible. Le désarroi est une sensation atroce lorsque l'on sait que la raison est de notre côté.

Profeballa, dans son  blog Venezuela y su Historia, (le Venezuela et son Histoire) critique les propositions de certains candidats à la Présidence et propose des réponses pour lui beaucoup plus convaincantes.

Le candidat à la Présidence ne peut réduire sa proposition à un combat contre l'insécurité par la seule éducation car pendant que ceci est mis en œuvre, les assassins continuent à tuer. Il faut réprimer, bien que ce mot nous effraie.

De son côté, une entreprise de serrurerie relate sur son blog l'une des conséquences les plus profondes de l'augmentation des crimes armés :

Auparavant, le Vénézuélien se distinguait par le fait de posséder une haute qualité humaine : celle qui le rendait capable d'aider tout le monde et de traiter les personnes qu'il venait de connaître comme des frères très chers.  (…) Cependant, le niveau d'insécurité l'a amené à se transformer en une personne incrédule et méfiante  (…) Il ne permet plus à un inconnu de l'aborder dans la rue ; lorsqu'il conduit, il ne prend plus d'inconnus en stop ; s'il voit un blessé sur la route, il continue sans s'arrêter et il craint de circuler le matin de bonne heure ou très tard la nuit.

Sur Twitter, tandis que certains font circuler la nouvelle du déploiement de la nouvelle force armée, d'autres expriment leur opposition et indiquent que la présence de ces forces ne changera rien.

Elides J Rojas L (@ejrl) commente l'échec du gouvernement dans sa lutte contre le crime :

Chávez dit que son gouvernement “bataille” contre l'insécurité / et il est en train de perdre 9 à 0

Pendant ce temps, Eudoro J. Boudewyn (@Boudewyn) s'interroge sur l'efficacité de ce corps de sécurité :

Pendant que la Guardia del Pueblo fermait les magasins de spiritueux, la pègre a assassiné  68 Vénézuéliens.

@InformadorVeraz signale plus crûment :

62 homicides à  Caracas – le week-end le plus violent de l'année Et la Guardia del Pueblo serait la solution du PUTSCHISTE  @chavezcandanga?

Enfin, Ramón Morales, dans son blog El Ultimátum Hiperbóreo analyse quelques-unes des causes et cherche à développer les arguments de ceux qui accusent le gouvernement d'être le principal coupable.  Dans son billet, il partage non seulement ses idées quant aux causes plus profondes qui poussent au cercle vicieux de la violence mais aussi son sentiment sur le peu de probabilité qu'il y a à ce que les mesures prises pour y répondre s'avèrent efficaces si on ne s'attaque pas aux sources de ces causes :

Cela me surprend que ceux qui sont si  doués pour critiquer ne se soient pas rendus compte de la relation qu'il y a entre les valeurs capitalistes et l'insécurité dans la rue. (…) Pourquoi un être humain est-il capable de tuer un autre être humain pour lui prendre une paire de chaussures ou un mobile ? Par matérialisme (…) Croyant en une société qui apprend que ce qui est le plus important, c'est l'argent, les vêtements de marque et de posséder des choses coûteuses, il est parfaitement prévisible alors qu'un grand nombre de sujets qui n'ont pas accès à une éducation humaniste en arrive à un comportement pré-criminel et estime qu'un objet ou l'argent a plus de valeur que la vie d'une autre personne (…) Bien qu'au Venezuela, on renforce les corps de sécurité, bien que les militaires se déploient dans la rue pour protéger les citoyens, tant que le matérialisme sera l'une de nos valeurs  et l'alcool notre compagnon de fin de semaine, les chiffres des morts violentes continueront à demeurer élevés.

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