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Tunisie : Vers une gouvernance transparente à travers les médias sociaux

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Tunisie, Cyber-activisme, Élections, Gouvernance, Médias citoyens, Politique

Ce billet fait partie du dossier de Global Voices sur la Révolution 201 tunisienne 2011 [1].

Le renversement du régime Ben Ali en janvier 2011 a pavé la voie à un usage accru des médias sociaux dans toute la Tunisie. Aujourd'hui, la classe politique se sert, pour faire passer ses messages aux gens, des outils mêmes que réprimait auparavant l'Etat.

Moncef Marzouki (@Moncef_Marzouki [2]), élu président par intérim de la république de Tunisie, Khalil Zaouia (@KhelilEzzaouia [3]), actuel ministre des affaires sociales, et des députés de l'assemblée constituante comme @LobnaJribi [4] et @IyedDahmani [5] ont récemment rejoint l'univers Twitter.

Les personnalités politiques se servent de Twitter et d'autres médias sociaux à de nombreuses occasions, qui peuvent être l'envoi de voeux aux Tunisiens pour une fête religieuse, ainsi le député Dahmani [en arabe] :

مولد نبوي شريف مبارك عليكم جميعا، وكل عام وأنتم بخير
@iyeddahmani [6]: Heureux Mouled (anniversaire du Prophète Mahomet) à vous tous. Soyez tous bénis.

Twitter est aussi l'arène où les politiques tunisiens expriment leurs frustrations devant la désorganisation de leurs propres partis ou les lenteurs du gouvernement actuel.

Mabrouka Mbarek [7], élue député du CPR se dit déçue du vote de son parti allant à un collègue islamiste pour présider la commission chargée de rédiger la nouvelle constitution. Son tweet d'alerte a été retweeté plusieurs fois par d'autres utilisateurs tunisiens partageant les mêmes inquiétudes.

@MabMbarek [8]: Des fois #jemeposelaquestion #jeudiconfession “@MoniaBH: qu'est ce que vous faites au CPR??? #TnAc”

Iyed Dahmani, député et membre du Parti démocrate progressiste, dans l'opposition, utilise Twitter pour critiquer le travail du gouvernement. La langue dont il se sert est parfois l'arabe dialectal tunisien avec pour but de toucher davantage de Tunisiens.

الحكومة تحولت إلى معارضة للأقلية وبدل أن تقوم بدورها صارت تقضي وقتها في نقد المعارضة،وبعد ذلك يقولوا لنا خليونا نخدموا.كاننا شادينلهم يديهم

@iyeddahmani [9]: Le gouvernement est devenu une opposition à la minorité. Au lieu de faire son travail, il passe son temps à critiquer l'opposition puis à demander à celle-ci du temps pour agir, comme si c'était nous qui leur lions les mains

D'autres hommes politiques usent aussi de leurs comptes Twitter pour noter leurs apparitions médiatiques locales et internationales.

Depuis son accession à la présidence, M. Marzouki utilise quant à lui son compte Twitter personnel pour partager son agenda. Il partage aussi des contenus multi-médias comme des photos et vidéos.

Les internautes ont été le moteur pour pousser les politiques dans les médias sociaux. Ainsi, 7ell [10] est une campagne citoyenne de médias sociaux qui a démarré l'an dernier pour inciter les hommes politiques et les partis à partager davantage l'information. 7ell [11] a sa page Facebook avec plus de 8.000 “j'aime” et des entrées par dizaines pour promouvoir la gouvernance transparente parmi les utilisateurs tunisiens de Facebook.

L'opération est décrite ainsi [en arabe] :

هي هبادرة مدنيّة تبنّاوها بعض الأعضاء من المجلس الوطني التأسيسي
المبادرة هاذي تحبّ تكرّس مبدأ الشّفافيّة في الدّستور التّونسي و تدخل آليات الحوكمة المفتوحة في إصلاح الإدارة. نطمحو إنّو الصّحافة و المواطنين التّوانسة ينجّمو يتبّعو عمل اللّجان في المجلس الوطني التّأسيسي و يتفاعلو معاه بطريقة مباشرة كيفما تفاعلو مع الثورة ولاّ الأحداث إلّي صارت في تونس عام 2011. من أهدافنا زادة نشر محاضر و تقارير اللّجان للنّاس الكلّ. التّونسي اليوم عندو الحقّ باش يعرف كيفاش النوّاب إلّي إنتخبهم قاعدين يكتبولو في دستورو و في مستقبلو و منظيّعوش حقّنا باش نبنيو تونس على قاعدة صحيحة

OpenGov est une initiative citoyenne adoptée par des membres de l'assemblée constituante. Cette initiative concerne la transparence dans la rédaction de la nouvelle constitution et l'instauration d'un nouveau mécanisme de gouvernance ouverte pour mettre fin à la corruption. Nous aspirons à ce que les spécialistes des médias et les citoyens de Tunisie suivent le travail des différentes commissions à l'assemblée constituante nationale et y réagissent directement comme pendant la révolution et les événements de 2011. Notre but est de rendre les rapports et projets produits par la commission disponibles à tous. Les Tunisiens ont aujourd'hui le droit de savoir comment les députés qu'ils ont élus écrivent la nouvelle constitution. Ils ont leur mot à dire sur leur avenir et le droit de voir la Tunisie reconstruite sur les bonnes fondations.

OpenGov [12] est aussi un mot-clic fréquemment utilisé pendant les séances de l'assemblée constituante. A présent, bon nombre des 217 députés partagent sur Twitter les débats en séance avec un public plus large.

On peut aussi suivre le fil de tweets @OpenGovTN [13].

Près de trois mois après le lancement de la campagne 7ell, la présidence tunisienne a aussi ouvert de nouveaux comptes sur les médias sociaux pour être en contact avec les internautes tunisiens et obtenir leurs réactions sur l'activité de la présidence et du président, Moncef Mazouki.

Le premier billet a été un fac-similé de lettre demandant aux Tunisiens ce qu'ils pensaient de l'action de M. Marzouki un mois après son élection.

La page Facebook de la présidence tunisienne comporte une multitude de photos du président Marzouki pour informer ses compatriotes de ses visites, réunions et déplacements à l'étranger. C'est aussi une interface directe pour publier des communiqués de presse. La dernière entrée était un communiqué relatif au massacre de Homs en Syrie à la veille du 4 février. Le texte sur le mur a reçu en quelques heures 646 “partager”, 674 “j'aime” et 1.726 commentaires.

La présidence tunisienne a aussi ouvert des comptes sur Twitter [14] et Youtube [15]. Sa chaîne Youtube sert à retransmettre les audiences officielles, gouvernementales et non gouvernementales de M. Marzouki au palais présidentiel de Carthage.

Les responsables politiques en Tunisie tiennent à avoir une relation plus transparente avec leurs électeurs, et désormais, cela semble passer par les médias sociaux.

Ce billet fait partie du dossier de Global Voices sur la Révolution 201 tunisienne 2011 [1].