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Arabie Saoudite : Inquiétudes sur le sort du journaliste Hamza Kashgari

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Asie de l'Est, Arabie Saoudite, Malaisie, Cyber-activisme, Droit, Droits humains, Liberté d'expression, Médias citoyens, Relations internationales

Le journaliste saoudien Hamza Kashgari a déclenché une tempête sur les réseaux sociaux arabophones la semaine dernière quand il a tweeté une conversation imaginaire avec le prophète Mohamed. Dans ses tweets, qui ont depuis été supprimés, il a écrit au prophète : “J'ai aimé le rebelle en toi”, mais “Je n'aime pas l'aura de divinité autour de toi. Je ne ferai pas de prières pour toi”. Il a également écrit : “Je te serrerai [la main] en égal…Je te parlerai comme à un ami, pas plus”.

Peu après avoir publié ces tweets, Hamza Kashgari a commencé à recevoir des menaces de mort. Sa géolocalisation était visible sur la plateforme et des religieux ont commencé à lancer des appels pour qu'il soit exécuté, ou jugé pour apostasie. Le 8 février, il a fui le pays, en partance pour la Nouvelle Zélande…Mais a été interpelé lors de l'escale en Malaisie par les autorités locales, qui l'ont arrêté ; peu après, on a appris que l'Arabie Saoudite avait entre temps présenté une demande d'extradition. Le Ministre de l'intérieur de la Malaisie, Hishammudin Hussein, a été cité [1] disant qu'il comptait rapatrier Hamza Kashgari en Arabie Saoudite.  Une page Facebook [2] de solidarité avec Hamza  Kashgari, créée en milieu de semaine, compte plus de 1500 membres.

Au moment où nous publions cet article, un appel parait avoir été déposé pour empêcher les autorités malaisiennes de déporter Hamza Kashgari:

@FadiahNadwa [3]: le juge Rohana Yusuf jz a déposé ordre de suspendre extradition par Govt de #HamzaKashgari vers Arabie Saoudite. En route pour déposer ordonnance tribunal à la police.

Des informations contradictoires circulent, à l'heure où nous publions, selon lesquelles Hamza aurait déjà été extradé [4].

Bataille d'opinions 

Un conflit d'opinions fait rage sur les réseaux sociaux, et beaucoup des concitoyens saoudiens de Hamza  Kashgari veulent qu'il soit jugé. Leurs voix semblent être moins nombreuses en ligne que celles des étrangers qui protestent, ainsi que celles d'autres citoyens saoudiens et malaisiens, demandant à ce que la Malaisie n'extrade pas Hamza Kashgari.

Le blogueur saoudien Ahmed Al Omran soutient [5] pour sa part que l'affaire est plus complexe qu'elle ne parait.

Je comprends que beaucoup de musulmans soient offensés par tout ce qui peut toucher au prophète, mais je ne crois pas que cette affaire se limite à ça. Oui, beaucoup sont très stricts sur ces choses, et ils ont réagi comme on s'y attendait. Mais il est clair que les partisans de la droite ont décidé d'exploiter l'affaire pour gagner des points et en faire une affaire politique. C'est un prétexte facile à attraper.

Si certains y voient les conservateurs religieux en train de défendre l'honneur du prophète par piété, d'autres assurent qu'il y a plus que ça derrière, que ça fait en fait partie d'un plan à long terme.

Mariam,qui écrit pour le site Arab News, est terrifiée par les accusations que le journaliste peut avoir à affronter :

@onlymytweets [6]: Je ne me rappelle pas d'un ayah ou d'un hadith déterminant que Dieu a donné procuration à l'humanité pour juger. Ou est-ce que c'est juste moi ? #HamzaKashgari @SalmaanTaseer

La saoudienne-américaine Bint Talal, qui se décrit comme une “poètesse”, fait part de son inquiétude pour le sort de Hamza Kashgari. Elle écrit :

@majda72 [7]: Je voudrais dormir, mais je suis dévorée de peur pour #HamzaKashgari je n'arrête pas de consulter Twitter et de craindre le pire.

@RFatani [8] est indigné par les réactions sur les médias sociaux saoudiens, et tweete :

@RFatani [9]: des milliers de twiteurs demandent que la tête de #HamzaKashgari roule par terre ! Ils devraient être interdits de séjour dans les pays qui ont des lois contre “l'incitation à la haine”.

Les tweets de l'écrivain Khaled Almaeena [10] expriment un sentiment répandu, que les sanctions prévues sont disproportionnées par rapport au “crime” en question :

@khaledalmaeena [11]: ان الله غفور رحيم ولو كان حبيبنا سيدنا محمد صلى الله عليه وسلم بيننا وسمع اعتداره وشهادته لسامحه ‎#hamzakashgari‏ ‎#saudi‏ ‎#ksa

@khaledalmaeena [11]: Dieu est magnanime, et si Mohammed (que la paix soit avec lui) était encore vivant, il aurait entendu ses excuses et lui aurait pardonné.

Parmi ceux, en Arabie Saoudite, qui étaient heureux d'apprendre que Hamza Kashgari allait peut-être être extradé, il y avait  @AboTamem, qui a tweeté :

@AboTamem [12]: @nsurendrann Notre frère HAMZA est sur le chemin du pays …Il ne répond pas à vos lois !! #hamzakashgari

@mkabmr [13] pense aussi que  Hamza Kashgari est allé trop loin :

@mkambr [14]: Pour moi, toute personne qui tourne en ridicule le prophète Mohammed (la paix soit avec lui) est persona non grata #HamzaKashgari

Le tweet @ArabRevolution est plus représentatif de l'opinion générale sur Twitter :

@ArabRevolution [15]: Je dis juste cela, ni moi, ni des millions d'autres musulmans ne sommes d'accord avec ce que l'Arabie saoudite décide de faire avec #HamzaKashgari #freehamza