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La vidéo-bourde de la Commission Européenne pour l'élargissement de l'UE

Catégories: Europe Centrale et de l'Est, Europe de l'ouest, Ethnicité et racisme, Médias citoyens, Relations internationales

Une vidéo mise en ligne le 2 mars 2012 et parodiant le film Kill Bill [1] pour promouvoir l'élargissement de l'Union Européenne auprès des jeunes a fait trois petits tours sur l'Internet avant d'être retirée quatre jours après du site de la Commmission européenne par les communicants apprentis-sorciers, sous les virulentes accusations de racisme. Trop tard pour que la polémique n'enflamme pas blogs et réseaux sociaux. Le clip est toujours visible sur Daily Motion [2] et YouTube [3] :

http://youtu.be/ErJHJDURubc [3]

Le site d'information 24heures.ch [4] a détaillé le scénario :

Une jeune femme blanche de peau dans une combinaison qui fait penser à celle d’Uma Turman dans le film Kill Bill de Tarantino, fait face à chaque adversaire mâle arrivant dans l’entrepôt où elle se trouve. L’un est visiblement originaire d’Asie, l’autre d’Inde et le dernier, du Brésil. L’Europe face aux puissances émergentes? Leur attitude est agressive quand la jeune femme ferme les yeux et se dédouble plusieurs fois pour former un cercle autour des combattants, tout à coup doux comme des agneaux.

La symbolique lourdingue du clip se termine par un slogan affirmant: «Plus nous serons nombreux, plus nous serons forts». Juste avant, le cercle de femmes vu d’en haut s’est transformé en un drapeau étoilé de l’UE.

avant de commenter :

L’incroyable de cette histoire, c’est qu’il y a eu probablement plusieurs hauts-fonctionnaires bruxellois qui n’ont simplement rien vu d’offensant dans ces images. En ligne hier sur quelques sites d’information, ce clip-vidéo a été retiré en début d’après-midi et la campagne annulée.

La page Facebook du Parti des indigènes de la République [5] cite l'article de Regards.fr [6], le “mensuel anticapitaliste” :

Ce stupéfiant petit film, bourré de stéréotypes racistes et essentialistes a été pensé, réalisé puis mis en ligne le vendredi 2 mars par les communicants de la délégation générale de l’élargissement de l’Union européenne de la Commission de Bruxelles. Face au tollé soulevé, il en a été retiré le mardi suivant, 6 mars. Le temps de faire un petit buzz sur Internet mais sans que la presse, en tout cas française, n’en fasse vraiment ses choux gras.

A l'autre bout du spectre politique, la lecture est différente, comme celle de Jean-Patrick Grumberg, pour dreuz.info [7] :

Je trouve cette vidéo mensongère, mais pas raciste. Mensongère car je ne vois pas ce que l’Europe fait pour se protéger de l’invasion islamiste, mais je vois, au contraire, ce qu’elle fait pour la favoriser. Je ne vois pas ce que l’Europe fait pour se protéger contre l’immigration d’Africains, mais je vois ce qu’elle fait pour la favoriser, et je ne vois pas en quoi la Chine, que les dirigeants Européens ne cessent d’appeler au secours pour renflouer leurs caisses, représente un danger.

Arrêt sur images de la vidéo controversée de la Commission Européenne

Sur Twitter les réactions ont été variées et souvent passionnées :

@LauraLardy [8]: L'UE fait la promotion de la guerre des civilisations et du racisme…

@sergiomarx [9]: La video de la Commission est-elle vraiment raciste ? Ou est-ce que le racisme ne serait pas plutôt dans l'oeil du spectateur ?

L'affaire deviendra-t-elle un cas d'école pour apprentis communicants ? Le blog Décrypter la communication européenne [10], tout en listant les articles de presse sur l'affaire, explique les aspects techniques d'un “conflit d'interprétation” :

Le communiqué officiel signé par le Directeur général de la DG Élargissement [11] justifie la diffusion de la vidéo en expliquant que la cible a laquelle la vidéo était destinée avait réagi positivement lors des tests de pré-lancement :
C’était un clip viral, ciblant à travers les réseaux sociaux, un public jeune (16-24) qui comprend l’intrigue et les thèmes des films d’arts martiaux et de jeux vidéo. Les réactions de ces publics ciblés ont en effet été positives, tout comme celles des focus groupes sur lesquels le concept avait été testé.

La conclusion du blog, rejoint celles de l'internaute ordinaire :

Quoique la Commission européenne ait reconnu qu’il y avait un problème avec la vidéo controversée en choisissant de la retirer ; la divergence d’interprétation avec les médias sur la raison du retrait montre que la Commission reste sourde à l’accusation d’absence de clairvoyance quant à la potentielle lecture raciste de la vidéo.