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Ethiopie: Terres, Histoire et Justice à Gambella

Catégories: Afrique Sub-Saharienne, Ethiopie, Développement, Droits humains, Economie et entreprises, Médias citoyens, Politique

[Tous les liens sont en anglais sauf mention contraire]

Suite à la publication [1] en avril de la plus grande base de données publique [2] sur les transactions internationales de terres, le blog “Global Development” hébergé par le journal brittannique The Guardian continue [3] sa série de reportages sur l'accaparement de terres.

L'Ethiopie est parmi les pays mentionnés dans le rapport: les ruraux de la province de Gambella sont forcés de s'établir dans des villages assignés par l'Etat pour laisser le champ libre aux acquéreurs. Gambella est la région la plus pauvre d'Ethiopie.

The Reporter, un journal bihebdomadaire local en anglais, fait état [4]de l'amorçage par le gouvernement éthiopien d'un exercice d'évaluation des investisseurs ayant acquis de grandes étendues de terres pour en faire des exploitations agricoles à but commercial. Bien que cela puisse paraître une étape importante pour les activistes qui se battent contre l'accaparement des terres, la décision du gouvernement éthiopien d'évaluer les performances des investisseurs n'a reçu que peu d'attention de la part des médias traditionnels étrangers.

Des extraits [5] du dernier livre de Fred Pearce, The Land Grabbers: Africa's hidden revolution (Les accapareurs de terres: la révolution cachée de l'Afrique), montrent que les populations pauvres sont plus affectées par l'accaparement de terres que par le changement climatique. Dans une interview, Fred Peace explique [6] que les pauvres sont en train d'être dépossédés de leurs terres pratiquement sans tenir compte de leurs droits historiques et culturels.

Target countries of land deals from the Land Matrix Project

Pays visés par les acquisitions de terres. Source:Land Matrix Project

Cependant, un officiel du gouvernement éthiopien récuse [7] cet argument:

Il [un officiel du Ministère de l'Agriculture] aurait minimisé les critiques selon lesquelles les terres louées par bail avaient “affecté négativement les villages proches des exploitations agricoles”, affirmant que “les mesures nécessaires [avaient] été mises en place pour empêcher ces investissements d'avoir un effet délétère sur les habitants résidant à proximité et [que] celles-ci seraient reconduites et renforcées”.

Des activistes ont créé une pétition en ligne et mènent des campagnes de sensibilisation sur Facebook et Twitter. Voici le texte d'une pétition [8] destinée aux diplomates influents du Royaume-Uni et des Etats-Unis :

Je suis extrêmement préoccupé par les échos d'abus délibérés, continuels et  sévères des droits des Peuples Indigènes du sud-ouest de l'Ethiopie. Le programme de “villagisation” mis en place par le gouvernement est en passe de déloger au moins 200 000 personnes indigènes de leurs terres ancestrales dans la région de Gambella et de les placer dans des villages neufs construits par l'Etat. En dépit des promesses d'amélioration de l'accès à l'emploi, à l'éducation et aux services de santé dans ces villages, des chercheurs  de Human Rights Watch ont trouvé peu de traces de ces services, voire pas du tout. Au contraire, les personnes délogées craignent une famine car ils n'ont plus accès à leurs terres cultivées, aux forêts et aux rivières. Ceux qui ont dénoncé ces abus ont été régulièrement emprisonnés, torturés, violés et généralement intimidés par les forces de sécurité du gouvernement. Ceux qui ont essayé de retourner sur leurs terres ancestrales se sont rendu compte que le gouvernement les avait déjà louées par bail à des investisseurs étrangers qui ont hâtivement passé au bulldozer les forêts, les fermes et les zones humides pour y planter des cultures commerciales telles que des agrocarburants, du thé, des épices, du riz, de la canne à sucre, en grande partie destinées à l'export. La dégradation et même dévastation de l'environnement qui s'ensuivra va encore aggraver l'insécurité alimentaire des Peuples Indigènes.

Le groupe Facebook Stop Land Grabbing in Gambella, Ethiopia [9] (Stop à l'accaparement des terres à Gambella en Ethiopie) se définit comme suit:

Un espace où la communauté internationale peut exprimer ses inquiétudes quant aux abus des droits humains et à la destruction de l'environnement causés par l'accaparement des terres dans la région de Gambella en Ethiopie.

D'après Wikipedia [en français], l'accaparement des terres [10] est l'acquisition controversée de grandes étendues de terre aux pays en développement, par des entreprises transnationales et gouvernements.