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Liban : un musée virtuel de la censure

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Liban, Arts et Culture, Cyber-activisme, Liberté d'expression, Médias citoyens, Politique, Religion

Le Liban se targue désormais d'un Musée Virtuel de la Censure [1], une base de données en ligne répertoriant les cas de censure au Liban depuis les années 1940. Le site a été lancé par l'organisaton libanaise MARCH [2]pour sensibiliser le public sur ce qu'on lui cache. Le 2 septembre, jour de lancement du Musée de la Censure, MARCH a annoncé : [3]

BIENVENUE AU MUSÉE VIRTUEL DE LA CENSURE AU LIBAN !

Vous êtes-vous déjà demandé ce qui est censuré au Liban, quand a eu lieu la censure et surtout pourquoi ? Vous êtes au bon endroit.

Ici, vous pourrez découvrir ce qui a fait l'objet de censure depuis les années 1940 !

Avez-vous connaissance de quoi que ce soit faisant l'objet de censure, étant menacé de censure ou ayant été censuré et qui nous a échappé ? N'hésitez pas à nous le signaler pour compléter la base de données.

[3]

Les internautes peuvent signaler [4] les films, la musique, les pièces de théâtre, les livres, le contenu imprimé et audiovisuel censurés depuis les années 1940 jusqu'à aujourd'hui. Il leur est demandé de fournir le nom de l'oeuvre censurée, ainsi que la date, l'auteur et la raison de la censure.

Par exemple, le film Le Dictateur [5] de Charlie Chaplin a été interdit [6] en 1940 pour son message anti-nazi. De la même façon, en 1990, le Conseil National de l'Audiovisuel a menacé [7] LBC International [8] de suspendre sa retransmission en raison de la diffusion d'une interview du premier ministre israélien de l'époque, David Levy. En 2012, le journaliste libanais Moustafa Geha a survécu à une tentative de meurtre [9], un caricaturiste ayant dessiné Hassan Nasrallah, le leader du Hezbollah, a reçu des menaces [10], et la bande-dessinée Persepolis de Marjane Satrapi a été bannie des librairies pour “offense à l'Islam et à l'Iran”.Qui censure au Liban ? Le Musée Virtuel de la Censure énumère [11] quatre principales entités libanaises gérant la censure.

La Sécurité Générale : autorise, surveille et censure les oeuvres de création.

Le Ministère de l'Information : interdit l'import d'une publication étrangère; en confisque les copies
Autorise la publication de périodiques
Peut suspendre une chaîne de télévision pour un maximum de 3 jours
Peut, avec la Sécurité Générale, censurer des oeuvres cinématographiques dès le début du processus de censure

Le comité administratif spécial : dans le cas où la Sécurité Générale trouve ce qu'elle considère suffisant pour empêcher une partie ou la totalité d'un film d'être projetée, une décision doit être prise par le comité selon un vote à la majorité de ses membres pour permettre au film d'être projeté tel quel, pour supprimer certaines parties du film, ou pour interdire la projection du film dans sa totalité. Officiellement, la décision finale est rendue par le seul Ministre de l'Intérieur

Le Conseil National de l'Audiovisuel : Le Conseil est devenu un “chien de garde des médias”. Il a été créé en tant que comité consultatif pour que le gouvernement régule la télévision et la radio ; l'autorité du Conseil s'étend maintenant jusqu'à inclure la régulation de sites internet et de blogs (il exerce une censure a posteriori sur la télé, la radio et Internet)

 

Motifs de censure

Au Liban, les motifs de censure sont d'ordre politique, religieux ou moral. Le Musée virtuel de la censure explique [12]:

Raisons politiques :concernant les relations du Liban avec ses alliés, le censeur fait très attention aux sensibilités politiques des régimes arabes et s'applique à entretenir de bonnes relations diplomatiques avec ces pays, ainsi qu'à interdire les attaques contre la cause palestinienne et les arabes en général. Les films sur la guerre civile ont systématiquement été censurés depuis les années 90 en se basant sur l'idée selon laquelle faire référence au conflit “menace la paix civile”.

Israël : quant aux relations avec les États ennemis, la censure est en premier lieu basée sur une loi nationale qui impose le boycott de tous les produits israéliens. De plus, toutes les formes de publicité ou de sympathie pour Israël sont censurées : ce boycott était initialement effectué par toute la Ligue arabe. Aujourd'hui, seul le Liban et la Syrie y adhèrent encore rigoureusement.

Si la Sécurité Générale pense que des oeuvres de création pourraient irriter les sensibilités religieuses, elle les enverra à leurs organes de direction respectifs (habituellement le Centre d'Information Catholique ou le Dar-al-Fatwa, la plus haute autorité sunnite). Les scènes ou sujets qui remettent en question la capacité de la religion à combattre le mal, et les scènes offensantes sont retirées.

Contenu obscène et immoral : sont strictement censurés le contenu qui porte atteinte à la morale, ainsi que les scènes de nudité, de sexe et de langage grossier. Le censeur détermine généralement l'étendue du film ou de l'oeuvre qui n'est pas offensant. Par ailleurs, les oeuvres qui font la promotion de l'homosexualité sont interdites, mais les scènes violentes ou qui montrent l'usage de drogue sont autorisées.

Réactions sur Twitter :
Sur Twitter, l'initiative a été bien accueillie :

@SultanAlQassemi [13] : Voici une idée brillante : le musée virtuel de la censure (Liban) censorshiplebanon.org [14] via @Sandmonkey [15] Il devrait y en avoir un dans chaque pays du Golfe.

@mirabaz [16]: C'est génial : qu'est-ce qui a été censuré, quand et pourquoi –> censorshiplebanon.org [17] v @SultanAlQassemi [18]

@ramseygeorge [19] : C'est fantastique