Guinée : Actes de tortures, symptômes d'un pays encore divisé

La transition de la Guinée du régime militaire tristement célèbre de Moussa Dadis Camara  vers un système politique démocratique avec le président élu Alpha Condé ne se fait pas sans heurts.  Le pays connait encore encore de fortes divisions internes comme le dénote la tentative de coup d'état contre le président le 18 Juillet 2011.  L'état de droit est encore un chantier en construction et les témoignages de tortures au sein de l'armée font légion.

ACAT- France, la section française de l'organisation internationale Action des chrétiens pour l'abolition de la torture et des exécutions capitales a lancé une pétition en ligne intitulée “Halte à la torture” adressée au Président Alpha Condé de Guinée. Cette pétition fait partie d'une campagne dont le but est:

de faire progresser l’état de droit en Guinée, d’infléchir l’impunité entourant la torture et les traitements inhumains et dégradants et d’obtenir que le président Alpha Condé mette en place les mesures nécessaires.

Cette campagne fait suite à une enquête sur le terrain en 2011 conduite conjointement par ACAT-France avec trois ONG  militantes pour les droits humains locales: AVIPA (l’Association des Victimes, Parents et Amis du 28 septembre 2009),  MDT (Les Mêmes Droits pour Tous) et OGDH (Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme et du Citoyen). Un rapport avait été publié en novembre 2011 révélant que:

la torture reste une pratique courante dans le pays, que ce soit à l’encontre de détenus de droit commun, à l’occasion de répressions de manifestations ou pour sanctionner les militaires suspectés de sédition.

La vidéo suivante de l’UFDG2010 témoigne des violences commises par les forces de l'ordre contre les manifestations de l'opposition:

De son coté, Human Right Watch, dans son rapport 2012 sur la Guinée, traite des conséquences d'une attaque contre la résidence du chef de l'état en juillet 2011 qui :

a donné lieu à l’arrestation d’au moins 38 personnes, dont 25 soldats. L’arrestation et la détention de certains membres du personnel militaire ont été accompagnées de mauvais traitements physiques et, dans quelques cas, d’actes de torture. Cette attaque a mis en lumière les divisions persistantes régnant au sein de l’armée en fonction des critères ethniques et régionaux, ainsi que la fragilité du processus politique.

Le rapport poursuit:

L’émergence d’une milice recrutée au sein du groupe ethnique du président a également suscité l’inquiétude.

Il s'agit des “Donzos“, des chasseurs traditionnels armés, originaires de la région du Président Alpha Condé. Dans un communiqué de presse publié sur infoguinee.com, le Collectif des partis politiques pour la finalisation de la transition a dénoncé leur utilisation dans la répression contre des membres civils de l'opposition:

Selon le collectif, lors de la marche pacifique du 27 septembre, des agents des forces de sécurité appuyés par les membres de la milice ”Donzos” ont tué cinq personnes, blessés des centaines dont certains gravement parmi  lesquels des femmes en grossesse et des mineurs.

Un autre rapport de HRW traite de l’aggravation des relations entre les principales ethnies, dont la mauvaise gouvernance porte une grande responsabilité [en anglais]:

These include the failure by the government to discipline members of security services for ethnic slurs against the Peul; discriminatory appointment practices which has resulted in the appointment by the president of a disproportionate number of individuals from the Malinké ethnic group; and the, at times, partisan use of the security services and judiciary to restrict and punish members of the political opposition for exercising their right to freedom of peaceful assembly.

Il s'agit notamment du non-respect par le gouvernement de discipliner les membres des services de sécurité pour les discriminations ethniques contre les Peuls, les pratiques discriminatoires dans le recrutement de personnel qui ont abouti à la nomination par le président d'un nombre disproportionné de personnes de l'ethnie des Malinkés, et quelquefois l'utilisation partisane des services de sécurité et le système judiciaire pour restreindre et punir les membres de l'opposition politique pour avoir exercé leur droit à la liberté de réunion pacifique.

Après le massacre qui a eu lieu au stade du 28 septembre 2009, aucun des responsables des forces de sécurité ou auteurs matériels inclus dans les listes des personnes soupçonnées d'avoir commis des crimes contre l'humanité établies par les enquêtes de HRW et la Commission de l'ONU n'a été inquiété, mais ils ont été promus:

Deux ans après, aucun des responsables supposés n'a été arrêté et “nous assistons impuissants à la promotion de certains présumés auteurs de la barbarie à de hautes fonctions civiles et militaires”, déplore l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'Homme (OGDH).

L'organisation Human Rights Watch (HRW) affirme que parmi les promus figurent le “lieutenant-colonel Claude Pivi comme ministre à la Sécurité présidentielle” et le “lieutenant-colonel Moussa Tiégboro Camara comme directeur de l'Agence nationale de lutte contre la drogue, le crime organisé et le terrorisme”.

Dans un environnement favorable à l'impunité, faisant preuve d'un courage salué par 10 ONG de défense des droits humains, des juges de Conakry ont osé inculper, en février 2012, le lieutenant-colonel Moussa Tiégboro Camara pour ses responsabilités dans la sanglante répression des évènements du 28 septembre 2009 au stade du même nom à Conakry:

Nos organisations se félicitent de l’inculpation le 1er février 2012 du Lieutenant-Colonel Moussa Tiegboro CAMARA pour son rôle présumé dans les graves violations des droits de l’Homme perpétrées le 28 septembre 2009 dans le stade de Conakry. Moussa Tiegboro CAMARA, qui a rang de ministre et qui est actuellement directeur de l’Agence nationale chargée de la lutte contre le trafic de drogue, la criminalité organisée et le terrorisme, a été longuement auditionné aujourd’hui par les juges d’instruction en charge de l’affaire.

Mais preuve de l'impunité qui prévaut en Guinée ce personnage puissant occupe toujours les mêmes fonctions en toute impunité.

Le site guinee58.com a publié un billet de Naby Laye Camara traitant des conséquences du recrutement de personnel basé sur l'appartenance ethnique dans une zone minière en Guinée forestière:

Après les violences policières de la nuit de vendredi à samedi qui ont fait cinq morts dans le sud-est du pays, lors d’une manifestation de villageois contestant la politique de recrutement de la société minière brésilienne Vale, la Guinée a été mardi 7 août le théâtre de nouveaux heurts à Siguiri, dans le nord-est.

Des représentants du Commissariat aux Droits de l’Homme (HCDH) de l'ONU à Conakry, de l'ONG Avocats Sans Frontières Guinée (ASF-Guinée), de PACEM IN TERRIS, de l‘Eglise catholique de N’Zérékoré et d’un journaliste de la radio Renaissance ont produit un rapport conjoint après une visite au village disant que:

Ceux qui soutiendraient l’argument du maintien d’ordre et de l’arrestation des grévistes,
doivent savoir que le moment choisi (minuit et trois jours après la grève), les moyens
utilisés (12 véhicules, la nature des armes, le nombre élevé de militaires, de gendarmes
et de policiers) et les méthodes employées (tirs à balles réelles sur les habitations et les
personnes, incendie d’habitations et de hangars, injures publiques et grossières,
exécutions sommaires et extrajudiciaires…) interdisent à toute personne respectueuse
des droits humains de soutenir une telle thèse.

Le 27 aout 2012, pour empêcher une manifestation non autorisée de l'opposition, des contre-manifestants ont lancé des pierres et les forces de sécurité ont attaqué les sièges des partis d'opposition et les domiciles de leurs leaders. Des attaques contre les médias provenant de militants des partis au pouvoir ont aussi été signalées.

Vidéo de l'intervention du général de brigade Ibrahima Baldé suite aux manifestations de l'opposition.

1 commentaire

  • […] In Guinea bracht de  staatsgreep van december 2008 kapitein Moussa Dadis Camara aan de macht. De eerste democratische verkiezingen in het land in 2010 maakten een einde aan zijn regiem, maar niet zonder dat daar eerst in 2009 een bloedige repressie aan was voorafgegaan, waarbij tijdens een anti-junta demonstratie  meer dan duizend doden vielen. De interne verdeeldheid in het leger is nog voelbaar met betrekking tot de huidige spanningen. […]

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