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Congo (RDC) : Un conflit aux origines anciennes, 50 ans d'affrontements

Catégories: Angola, Burundi, Ouganda, République Démocratique du Congo (RDC), Rwanda, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe, Droits humains, Gouvernance, Guerre/Conflit, Histoire, Politique, Réfugiés, Relations internationales

Le conflit actuel entre les rebelles du M23 et l'armée congolaise [1] ne peut être appréhendé dans sa totalité sans un rappel historique de la genèse des conflits dans la région des grands lacs. Voici une chronologie détaillée des 50 dernières années d'affrontements dans cette région.

Sur Congo Forum, Jacques MBOKANI écrit [2] :

Depuis son accession à l’indépendance la R.D.C. a toujours été en proie à des conflits de tous ordres. … L’exposé consiste essentiellement à identifier les causes des conflits en RDC. … Les causes des conflits en R.D.C. peuvent être regroupées en deux catégories majeures. … les causes externes … et d’autre part, les causes internes.

 

Le 30 juin 1963 est proclamée l'indépendance du Congo rebaptisé Congo-Léopoldville. Le pouvoir est partagé entre le chef de l'Etat, Joseph Kasa-Vubu [3], et le premier ministre Patrice Lumumba [4]. Le 25 novembre 1965 [5] appuyé par le gouvernement belge et les Etats-Unis, le général Joseph-Désiré Mobutu [6] destitue le président Kasa-Vubu [3], s'empare du pouvoir et se proclame président de la République démocratique du Congo. Il restera au pouvoir pendant 30 ans. Le pays sera rebaptisé Zaïre entre 1971 et 1997.

Cette vidéo retrace l'historique de l‘assassinat de Patrice Lumumba  [7]:

http://www.youtube.com/watch?v=cOYQjegItnM [7]

Une autre vidéo raconte l'arrivée au pouvoir de Mobutu: Roi Du Zaïre, La conquête du pouvoir  [8]:
http://www.youtube.com/watch?v=Tiz7egpUzUg [8]

Des enjeux économiques importants 

Jacques MBOKANI poursuit [2] :

Dans le film intitulé : « Blood Diamond » (le diamant du sang) un vieil homme soupirait en ces termes : « j’espère qu’ils ne vont pas trouver du pétrole… alors nous serons réellement en danger… ». Les propos de ce vieil homme, révèlent en réalité la question des ressources naturelles comme sources des conflits.

Sur le site Les cartes géographiques de la RDC [9] nous apprenons :

Qualifié de scandale géologique, le sous-sol de la RD du Congo regorge de plusieurs minerais et d'énormes réserves énergétiques. Les ressources minières les plus connues sont celles des groupes de l'Etain, du Nobium et du Cuivre, auxquels on peut ajouter le manganèse, l'or et le diamant. Concernant les richesses énergétiques, on peut citer le pétrole off-shore de l'Atlantique et d'importants gisements du nord-est, lesquels aiguisent déjà, beaucoup d'appétits de tous les milieux mafieux aussi bien congolais qu'internationaux, au mépris des populations locales. De même, l'uranium dans le sud-est pays, ainsi que le gaz méthane du lac Kivu, font partie des ressources énergétiques dont le pays ne semble pas maitriser la gestion présente ou future. Ce manque d'autorité et de contrôle de ses propres richesses, se traduit par un trafic sans précédent à l'EST du pays, opéré par des bandes armées avec, malheureusement souvent, la complicité des congolais eux-mêmes au détriment de leur propre pays.

Les causes internes des conflits en RDC datent de la dictature de Joseph-Désiré Mobutu [6] qui est resté au pouvoir jusqu'en 1997 :

La raison du plus fort était la meilleure, … médiocrité de la classe politique, … l’effondrement et le manque d’indépendance de l’appareil judiciaire …inexistence des services publics tant administratifs que sociaux. … Le recrutement des militaires que ce soit par le processus normal ou dans le cadre du brassage ou mixage, ce recrutement se fait sans tenir compte de la citoyenneté, de l’âge, de la moralité ou du passé judiciaire

La vidéo suivante illustre l'emprise que Mobutu avait sur la RDC durant cette période: Mobutu, Roi Du Zaïre 2 Le maitre du Jeu  [10]: http://www.youtube.com/watch?v=ZMElq6Pj580 [10]

Konexinfo [11] retrace comment plusieurs pays se retrouvent impliqués dans ce conflit :

La situation actuelle en RDC, dans la région du Kivu, découle de plusieurs conflits qui ont eu lieu depuis une vingtaine d’années dans la région des grands lacs africains [12]. Ces multiples conflits sont liés les uns aux autres. De nouveaux seigneurs de la guerre prennent la relève de ceux qui accèdent au pouvoir.

 

Sept pays en guerre sur le sol congolais  

Rencontre entre Kabila, Bush, Kagame et Annan à NYC en 2002 par Eric Draper - domaine public   [13]

Rencontre entre Kabila, Bush, Kagame et Annan à NYC en 2002 par Eric Draper – domaine public

L’Ougandais Yoweri Museveni [14], recrute et organise une force armée de 6.000 hommes aux frontières de la Tanzanie [15], du Rwanda [16] et de l’Ouganda [17] et renverse le président élu, de son pays, Milton Obote [18] en 1986.

Au Rwanda [16] entre 1990 et 1993 le FPR avec à sa tête Paul Kagamé [19] se bat contre le régime du parti unique du président Juvénal Habyarimana [20].

En 1994, le génocide [21] au Rwanda [16] (qui a une frontière commune avec la RDC) pousse environ 2 millions de personnes à s’installer dans l’est du pays.

Du Zaïre à la République Démocratique du Congo [22] et au chaos actuel :

En 1996, dans le Sud-Kivu, début de la rébellion des Banyamulenge [23], des Congolais Tutsi d'origine rwandaise (qui pour fuir les violences du Rwanda [16] sont installés dans la région depuis 1959), soutenus militairement par le Rwanda [16], l’Ouganda [17] et le Burundi [24]. Avec d'autres opposants au président zaïrois le maréchal Mobutu [6], ils se regroupent dans l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Zaïre (AFDL) dirigée par Laurent-Désiré Kabila [25].

Après 30 ans de pouvoir, le président Mobutu [6] part en exil avant la victoire des rebelles. Laurent-Désiré Kabila [25] s'autoproclame président de la République démocratique du Congo (RDC), nouvelle dénomination du Zaïre. Les rebelles investissent la capitale Kinshasa le 17 mai 1997.

Démantèlement les camps de réfugiés rwandais infiltrés par les ex-Forces armées rwandaises et les milices de Hutu extrémistes -les Interahamwe [26]- responsables du génocide [21] de 1994 au Rwanda [16].

Laurent-Désiré Kabila [25] rompt ses alliances avec le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi.

En 1998, une nouvelle rébellion de Tutsi Banyamulenge [23] éclate au Kivu contre les troupes gouvernementales de Laurent-Désiré Kabila [25], soutenue par ses ex-alliés, le Rwanda [16] et l’Ouganda [17]. Elle forme une coalition politico-militaire, le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), dirigée par Ernest Wamba dia Wamba [27].

Sept pays en guerre sur le sol congolais : les rebelles congolais soutenus par le Rwanda [16], l’Ouganda [17] et le Burundi [24]… s’emparent de Kisangani [28] (capitale de la Province orientale), troisième ville du pays. Ils seront stoppés dans leur avancée vers Kinshasa par l'intervention des troupes venues d’Angola [29], de Namibie [30] et du Zimbabwe [31].

C’est la partition du pays : les Nord et Sud-Kivu tombent sous le contrôle du RC ; l'ouest reste sous le contrôle de Laurent-Désiré Kabila [25] et de ses alliés (Angola [29], Namibie [30] et Zimbabwe [31]).

Toujours en 1998, une autre rébellion dirigée par Jean-Pierre Bemba [32] dans la province de l'Equateur, le Mouvement pour la libération du Congo (MLC) prend le contrôle de la région, soutenu par l’Ouganda [17] ils s'emparent de la ville de Kindu des régions minières du Kasaï et du Katanga.

17 mai 1999, le RCD d’Ernest Wamba dia Wamba [27] se scinde en deux mouvements : RCD-Goma dirigée par Émile Ilunga Kalambo [33] et appuyée par le Rwanda et RCD-Kisangani [28] qui reste sous le contrôle de Ernest Wamba dia Wamba [27] soutenue par l’Ouganda [17] qui soutient aussi le MLC de Jean-Pierre Bemba [32].

Le gouvernement de Laurent-Désiré Kabila [25] ne contrôle plus que la moitié ouest du pays.

Les accords de Lusaka [34] (Zambie) qui sont signés en juillet 1999 ne changent rien aux massacres : l'armée rwandaise occupe une partie de la Province orientale, le Nord et le Sud-Kivu ainsi que le Nord-Katanga. L'armée ougandaise contrôle la partie nord de la province de l'Equateur et de la Province orientale. Malgré l'accord, combats et massacres continuent et les deux pays se disputent le contrôle de la ville de Kisangani [28], plaque tournante du marché du diamant, causant la morts de deux cents civils.

En 2001 du président Laurent-Désiré Kabila [25] est assassiné, son fils Joseph Kabila [35] est nommé chef de l'Etat le 17 janvier.

 

Les pays impliqués plus ou moins directement dans les conflits au Congo

Les pays impliqués plus ou moins directement dans les conflits au Congo par Jaro7788 -domaine public

 

Depuis la succession de résolutions des Nations Unies [36], d’accords [37] entre belligérants et de tentatives [38] de démocratisation [39] rythment les massacres, les viols de guerre [40] en RDC permettant ainsi aux puissances étrangères et aux compagnies de garder l’accès aux minerais précieux indispensables aux téléphones portables [41].

Jacques MBOKANI conclut [2] :

En résumé, la cause centrale réside dans la faillite de l’Etat congolais qu’il faut reconstruire. C’est parce que l’Etat n’existe plus que les Etats voisins pillent, violent et font ce qu’ils font. C’est parce que l’Etat n’existe plus qu’il y a la prolifération des seigneurs de guerre et la prolifération des armes légères.