La blogueuse, twitteuse et journaliste Mirelis Morales Tovar est une « Caracassienne pure souche ». Née dans la capitale vénézuélienne, elle dit que « même si c’est une ville épuisante à cause de la circulation et de l’insécurité », elle ne peut pas imaginer vivre ailleurs.
Mirelis s’occupe du blog Caracas Ciudad de la Furia [“Caracas, Ville de la furie”, en espagnol], un espace où elle invite ses lecteurs à découvrir le côté positif de Caracas : expériences, lieux, images, saveurs et sons que beaucoup ignorent pour ne pas sortir suffisamment à la découverte de leur ville.
Dans son blog, Mirelis se décrit comme une « citadine à pied, en moto, en bus, en métro et en véhicule à moteur ». Dans un entretien avec Global Voices, Mirelis nous raconte :
Amo la vista de El Avila y ese clima tan privilegiado. Aparte, a esta ciudad y a mi país, les debo todo. Mi familia, mis amigos, mis amores, mi trabajo, mis referencias… todo lo que soy. Asi que debo retribuirle de alguna manera.
J’adore la vue depuis El Avila et ce climat si privilégié. En plus, à cette ville et à ce pays, je leur dois tout. Ma famille, mes amis, mes amours, mon travail, mes références… tout ce que je suis. Je dois donc leur montrer ma gratitude d’une façon ou d’une autre.
Mirelis nous a accordé un peu de son temps bien occupé pour répondre à quelques questions à propos de son blog.
GV: Comment, quand et pourquoi est né Caracas Ciudad de la Furia ?
Mirelis Morales T.:
Au départ, le blog est né en septembre 2009 pour reproduire les travaux que je publiais à l’époque dans la rubrique sur Caracas du quotidien El Universal. Mais quand j’ai été virée du journal, le blog est devenu pour moi un moyen de continuer à exercer ma profession. J’ai choisi de me concentrer sur le thème de la ville parce que c’est un domaine dans lequel j’avais de l’expérience et aussi parce que très peu de gens parlent de Caracas de manière positive.
C’est pourquoi je me suis consacrée à écrire sur la ville d’un point de vue plus constructif, qui nous aide à montrer son potentiel et à réfléchir sur ce que l’on pourrait faire en tant que citoyens pour qu’elle soit plus agréable à vivre et moins hostile.
GV: Pourquoi ce nom, “Ciudad de la Furia”?
MMT: Je me suis prise de passion pour la musique de [Gustavo] Cerati [auteur de la chanson « Ciudad de la Furia »]. Et je crois qu’il n’existe pas de mots qui définissent mieux Caracas que la « Ville de la Furie ». Caracas est ainsi : furieuse, indomptable, chaotique, imprévisible. C’est la ville des contrastes et des contradictions. Mais malgré tout, elle refuse de mourir.
GV : Plusieurs blogs ont Caracas pour objet. Qu’est-ce qui fait que le tien est différent ? Quel est ton objectif avec ce blog ?
MMT: Moi j’essaie de donner une image de Caracas loin du chaos, des problèmes de circulation ou d’insécurité. Pourquoi ? Parce que je suis convaincue que l’on ne peut pas réduire Caracas à ces aspects. Ceux qui vivent la ville peuvent vous assurer qu’il en va ainsi. Dès lors que vous êtes capable de défier un peu les préjugés et que vous vous aventurez dans ses rues pour la connaître et pour découvrir ses curiosités, vous arrivez à vous réconcilier avec elle, à la voir dans une perspective différente. Et elle aussi devient plus tranquille et commence à montrer le meilleur d’elle-même.
Le seul moyen de créer un sentiment d’appartenance et d’identification avec sa ville, c’est de partir à sa découverte. Je crois que c’est là le grand problème des Caracassiens : ils ne connaissent pas leur ville. La peur les retient prisonniers. C’est pour cela que je me consacre à inviter mes lecteurs à sortir, à leur apporter différents choix, à leur raconter mon expérience dans tel ou tel lieu, pour qu’ils osent enfin vivre Caracas.
Beaucoup de lecteurs du blog ont accepté cette invitation, et pour partager leurs propres expériences de Caracas, ils ont participé à Ciudad Positiva, un concours photographique que Mirelis organise depuis 2010. Le 4 novembre 2010 Mirelis écrivait :
El reto que nos propusimos fue centrar la mirada –tan sólo por un minuto- en el lado amable de la ciudad. En aquello -natural o construido- que nos caracteriza como urbe o que haga diferente a Caracas del resto de las ciudades del mundo.
Le défi que nous nous sommes lancés a été de se focaliser – ne serait-ce que pour une minute – sur le côté sympathique de la ville. Sur ces choses – naturelles ou construites – qui nous caractérisent comme agglomération ou qui font de Caracas une ville différente des autres, unique au monde.
Les photos des éditions 2010 et 2011 sont à découvrir sur Flickr.
GV: Dis-nous en un peu plus sur le concours de photographies Ciudad Positiva.
MMT:
Je ne suis pas seulement blogueuse, je suis aussi twitteuse. En parcourant Twitter, je me suis rendue compte que les gens adorent y poster des photos de Caracas. J’ai alors pensé que je pourrais peut-être promouvoir sur mon blog un concours afin de sélectionner les meilleures photos et leur donner vie sous un autre format. C’est ainsi qu’est née l’idée de créer des petits livres sur Caracas avec les images lauréates. Pourquoi des livres ? Parce que cela me semblait un bon moyen d’emmener la ville avec soi ou de l’échanger avec d’autres.
Le concours a déjà connu trois éditions. Et chaque année, il propose une thématique différente. La première année, on a montré ce qui caractérise Caracas, la deuxième, ses habitants, et la troisième, ses couleurs. À chaque nouvelle édition, de nouvelles personnes sont venues rejoindre les rangs de ceux qui croient en une Ville Positive (traduction du nom du concours « Ciudad Positiva ») et nous espérons pouvoir faire une exposition en plein air pour partager notre vision de la ville.
GV: Quels sont les projets pour Caracas Ciudad de la Furia en 2013 ?
MMT: J’adorerais pouvoir changer l’aspect du blog. J’ai même déjà commencé à le passer sur WordPress. Je veux aussi lui créer un logo. Bref, le rendre plus professionnel. Je veux y ajouter des informations utiles pour les gens qui visitent Caracas, car la ville n’a pas suffisamment de cartes ou de guides. Grâce au blog, j’ai créé des liens avec des gens d’Argentine, d’Espagne, du Costa Rica et du Chili qui m’ont écrit et m’écrivent pour me demander conseil sur la ville. C’est pour cela que je voudrais rendre le blog un peu plus formel et offrir plus de choix.
GV: As-tu des conseils pour les blogueurs et blogueuses qui écrivent sur des villes ?
MMT: Garder les yeux grands ouverts. Une ville, c’est un être vivant qui a toujours quelque chose à offrir. Il faut la regarder sans préjugés, être ouvert à toutes les expériences. Je crois que toute ville a de bonnes choses à offrir. Et c’est bien d’être critique, mais toujours dans une perspective constructive. Être blogueur, c’est aussi être au service de la chose publique.
Mirelis a reçu plusieurs prix pour son blog. En 2010, elle a reçu le Prix Arturo Uslar Pietri du Colegio Nacional de Periodistas (École nationale de journalistes) pour le meilleur site internet (“mejor sitio en Internet“) et le prix “Caracas a través de la mirada del periodista” (Caracas a travers le regard du journaliste) – mention numérique – remis par la Chambre de commerce de Caracas. Cette année, la Alcadía de Baruta (équivalent d'une mairie d’arrondissement de Caracas) lui a remis la distinction “Valores Ciudadanos” (Valeurs citoyennes) pour sa promotion du vivre-ensemble des citoyens.
Vous pouvez suivre Mirelis et son blog sur Twitter (@mi_mo_to).