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2012 : année de la rébellion et des évolutions sociétales dans les pays francophones

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2012 n'est plus et pour la région francophone, une année 2013 apportant plus de sérénité serait plus que bienvenue.

L'année 2012 fut marquée par des conflits armées au Mali [1], en République Démocratique du Congo [2] (RDC) et en République Centrafricaine [3] (RCA), des élections disputées au Sénégal [4], au Québec [5] et en France [6], des manifestations pour des changements au Tchad [7], à Madagascar [8] et au Togo [9] mais aussi des débats de société sur l‘immigration [10], la crise économique [11] et le mariage pour tous [12]; tout ceci sur fond de transformation profonde du mode de partage de l'information.

Pour revivre une année riche en évènements,  voici la première partie d'un retour sur l'année 2012 dans les pays francophones par les contributeurs de Global Voices :

L'avenir du Mali  (par Marc-André Boisvert [13]

Une longue réaction en chaine a complètement ruiné le Mali en 2012: une rébellion touarègue [14], un coup d’État [15], la chute du Nord du Mali et la conquête de ce territoire par des groupes islamistes [16], des soubresauts politico-militaires à n’en plus finir. En une année, l’image internationale bien polie de modèle de démocratie et de développement du Mali a été complètement souillée, laissant un État déstabilisé, défaillant, délaissé.

Mali begins Touareg dialogue. Image by Flickr user Magharebia (CC BY 2.0). [17]

Mali : un début de dialogue avec les Touaregs. Photo sur Flickr de Magharebia (CC BY 2.0).

Il y a un an, au Mali, les twits, les facebook et les blogues étaient personnels. Pas de polémique, mis à part les candidats aux élections présidentielles, qui devaient se tenir en mars, aiguisant leur stratégie à sens unique.

En 2012, les Maliens ont pris d’assaut les réseaux sociaux. Plus efficacement que les médias, les citoyens du web ont partagé les images des amputations commises par les Islamistes sur le hashtag #Mali [18] et ont échangé sur le nouveau pouvoir, notamment sur la liste de messagerie malilink.

Le Collectif des Ressortissants du Nord (COREN) [19] et  le Cri de Cœur [20] ont mobilisé les Maliens et leurs alliés pour envoyer une aide humanitaire dans les régions occupées. Les réseaux sociaux, ce n’est plus un outil pour partager son inaction devant les atrocités de l’actualité, c’est l’occasion de s’organiser, de se lever et de refuser à sa façon [21].

Non, les Maliens n’attendent pas béatement une intervention étrangère. Le web en est la preuve.

Crise passagère ou transformation sociétale ? 

La crise économique aura été le thème central des élections présidentielles en France en 2012.  Après maintenant presque 4 ans de crise, la question se pose si au lieu d'une crise temporaire, nous n'assistons pas à une transformation structurelle de la société et de son mode de fonctionnement.

Des idées innovatrices ont émergé en 2012 sur les évolutions que pourraient prendre la société au regard du contexte économique actuel. Stanislas Jourdan nous éclaire sur les idées échangées sur les approches qui pourraient transformer les paradigmes existants. L'initiative de dispositif de démocratie direct pour un revenu minimum inconditionnel en Suisse [11] en fait partie :

L'initiative populaire « pour un revenu de base inconditionnel » propose d'inscrire dans la constitution fédérale « l'instauration d'une allocation universelle versée sans conditions » devant «permettre à l'ensemble de la population de mener une existence digne et de participer à la vie publique ». La loi réglerait le financement et fixerait le montant de cette allocation. Le revenu de base est inconditionnel : il n'est subordonné à aucune contre-prestation. [..] Comment le financer? Par l'impôt direct sur le revenu et la fortune, par l'impôt indirect sur la consommation (la TVA), par un impôt sur les transactions financières, et surtout par le transfert des ressources consacrées au financement de l'AVS, de l'AI, de l'aide sociale et des autres revenus de substitution inférieurs au montant du revenu de base.

[22]

Motivation au travail, adapté par Martouf et publié avec sa permission

Un autre projet initié en Amérique du nord consiste à éponger les dettes des familles et des étudiants [23] par le crowdfunding, a l'instar de l'aide des états aux banques lors de la crise des subprimes [24] :

[Il] consisterait à créer de la monnaie papier de la même manière que les politiques d'assouplissement quantitatif, sauf que cet argent irait directement dans les comptes bancaires du grand public, avec pour seule condition que le premier usage de cet argent soit de diminuer ses dettes. Les débiteurs dont les dettes excèdent cette injection verront leurs dettes diminuées mais pas effacées, alors qu'à l'autre extrême, ceux qui n'ont pas de dettes recevront du cash directement

 

Rebelles Without a Cause ?  

Que ce soit les rebelles du M23 en RDC, ceux de Séléka en RCA ou les groupes islamistes au Mali, il semble que les groupes rebelles revendiquent rarement une idéologie politique claire ou une homogénéité de fonctionnement entre les divers groupes qui composent leurs alliances. Force est de constater que ces groupes armés ont fortement élargi leurs sphères d'influence en 2012 et ont maintenant établi un levier de négociation incontournable pour le processus de stabilisation de leurs régions respectives. Comme le note Julie Owono, le timing de la progression des attaques en RCA [3] laisse à penser que les enjeux financiers ont changé la donne en terme d'objectifs à court termes des rebelles de Séléka. En RDC, Anna Gueye illustre en détails la complexité du contexte historique de la rébellion [2] du M23 et son évolution récente [25]. Les enjeux financiers dans les régions du Kivu et du Katanga ne sont plus à présenter. La nouveauté tragique en 2012 se trouve dans l'expansion du conflit et de la catastrophe humanitaire vers des territoires [26] à fort potentiel d'intensification de la violence. Des initiatives remarquables de la population civile se font fort de protéger la santé et  la cohésion sociale [27] des populations fragilisées par ce conflit.

 

La deuxième partie du retour sur l'année 2012 dans les pays francophones sera publiée très prochainement.

Anna Gueye [28], Julie Owono [29], Abdoulaye Bah [30], Marc-André Boisvert [13] et Stanislas Jourdan [31] ont contribué à la rédaction de cet article.