(Billet d'origine publié en anglais le 6 février 2013)
Cet article est le troisième d'une série qui présente les défis de la surveillance à l'échelle mondiale analysés lors du Surveillance Camp d'EFF à Rio de Janeiro, au Brésil. Les articles antérieurs sont disponibles ici et ici [en anglais].
Récemment, nous avons décrit comment les entreprises à travers le monde font face aux pressions grandissantes politiques et légales que les gouvernements exercent sur elles afin d'obtenir de l'aide dans leur politique de surveillance d'État et les nombreuses manières dont le secteur privé y joue un rôle croissant. En décembre 2012,
l’Atelier sur la Surveillance d'État et les Droits de l'Homme [en anglais] d'EFF (l'acronyme anglais pour la Fondation de la Frontière Électronique) au Brésil a développé ce débat et centré l'attention sur la privatisation de la sécurité publique, les initiatives de surveillance financées par les États et le manque de la recherche quantifiable sur les marchés de la sécurité en Amérique Latine. Voilà ce que nous avons appris.
Plusieurs pays, notamment en Amérique Centrale et l'Amérique du Sud ont connu [en anglais] une privatisation des fonctions de sécurité publique. Cela est particulièrement vrai dans les pays [en anglais] qui ont traversé des guerres civiles et des régimes militaires avant de marcher vers la démocratie. Dans ces contextes, les opérations de sécurité de l'État ont été parfois financées par les gouvernements (autant étrangers que nationaux) [en anglais] et déléguées aux entreprises du secteur privé.
Le chercheur en géopolitique Otto Aragueta, a fait valoir [en anglais] d'une façon convaincante qu'au Guatemala
La transition vers la démocratie a produit une réforme institutionnelle formelle du secteur de la sécurité, ce qui a permis aux anciens militaires de maintenir des mécanismes informels de contrôle par le biais du secteur privé.
C'est la raison pour laquelle la transition vers la démocratie et la réforme du secteur de la sécurité d'État ont été accompagnées d'une prolifération croissante des entreprises du secteur de la sécurité.
Lors de l'atelier de la EFF, l'avocate pour les droits de l'homme au Guatemala et auteure de Global Voices, Renata Avila, a fait remarquer que le problème n'était pas seulement la privatisation des services de sécurité, mais aussi le manque de réglementation de ces entreprises privées ou d'application des lois en vigueur :
Les entreprises privées de sécurité n'ont aucune responsabilité dans ce sens. Il n'y a aucun contrôle sur les données invasives qu'elles recueillent : dans n'importe quelle zone résidentielle ou n'importe quel édifice les gardiens privés peuvent demander vos papiers pour les examiner. Ils peuvent photographier votre voiture, essayer d'enregistrer où vous allez, qui vous visitez, et n'importe quelle autre donnée qu'ils peuvent obtenir. Avec un système obligatoire d'identification biométrique, comme celui du Guatemala, combiné aux centaines de caméras vidéo et plus de deux mille entreprises de sécurité privée qui accumulent et partagent des données, le futur de la vie privée pour des activistes et des citoyens en général se voit compromis.
Un autre danger est qu'il y a un certain niveau de soutien populaire, dû au niveau élevé de la criminalité dans plusieurs pays de l'Amérique Centrale. Les citoyens voient les technologies de surveillance comme un moyen de lutter contre la délinquance, leur raisonnement étant ‘ si tu n'as fait rien de mal, alors tu n'a rien à cacher de l'État’. Cependant, aucune recherche ne montre que les hauts niveaux de la surveillance conduisent à une diminution de la délinquance.
Cette demande croissante en services de sécurité privée a attiré [en anglais] vers la région des entreprises du secteur munies de nouvelles technologies de la surveillance et elle fait grandir [en anglais] l’industrie de la sécurité [en anglais] en Amérique Latine. Cependant, peu d'études ont été faites pour définir l'impact du marché de la sécurité, avec la façon dont les marchés de la sécurité de différents pays se comparent, la comparaison des quantités des produits vendus aux Etats et aux personnes privées et l'impact sur les libertés civiles. Les participants du Camp de la EFF ont signalé la nécessité de nouvelles enquêtes sur la privatisation de la sécurité publique et l'impact des marchés de la sécurité en Amérique Latine et dans d'autres pays.