Dans la soirée du 4 mars 2013, un incendie jugé criminel a détruit la “Cité des Sciences” [fr] à Bagnoli, un quartier de Naples.
Le projet a été réalisé entre 1989 et 1992 dans l'ancienne zone industrielle de Bagnoli, dans les locaux de l'ancienne entreprise ILVA-Italsider [en italien, comme tous les liens suivants, sauf indication contraire],fermée à cause de la crise de la sidérurgie et de la pollution qu'elle créait. La bonification de la zone a créé ce pôle scientifique sur le modèle de la Cité des sciences et de l'industrie [fr] à Paris, d'après une idée de Vittorio Silvestrini, président de la Fondazione IDIS science-Città della scienza. Au cours des 10 dernières années, le centre a eu environ 350 000 visiteurs par an, et a accueilli le musée interactif, un planétarium, un centre de congrès, un centre d'enseignement supérieur et un espace pour des expositions d'art.
La nouvelle a touché profondément beaucoup de Napolitains, qui l'ont commentée sur les réseaux sociaux (Twitter en particulier) ; certains n'ont pas fait mystère qu'ils considéraient cet incendie comme un acte criminel de la Camorra [fr] :
@sechi1964: Je suis allé à la Cité des sciences il y a quelques mois. Un lieu qui, à lui seul, pourrait représenter le rachat de Naples. Ce feu nous brûle nous tous.
@itsmeperp: La Camorra a brûlé la cité des science, et maintenant elle attend le flot d'argent pour la reconstruction. Et nous .. nous payons.
@MiguelCavalle: La Cité des Sciences de Naples brule et # RegioneCampania accourt pour reconstruire … Et pourquoi ne pas aller aux problèmes avant qu'ils ne brûlent …?
Marcello Signore raconte sur son blog :
Lorsque j'étais gamin, j'allais toujours à la “Cité des Sciences”: j'y ai vu des dinosaures, des expositions interactives, j'y ai suivi des conférences. J'y ai également reçu un prix, ma première récompense, le “prix de la poésie” je ne l'oublierai jamais. La “Cité des Sciences” était à 500 mètres de chez moi, mais il me paraissait beaucoup plus loin. Il représentait le changement, l'amélioration, l'évolution.
Le site ilmattino.it du quotidien de Naples Il Mattino (Le Matin) a reçu plusieurs interventions de citoyens à cet égard:
Natalia 13ful: vous êtes le cancer de notre terre. seulement à la pensée à ces 170 personnes qui vont être au chômage et à leurs familles, pour vos sales intérêts.
Pietro Treccagnoli : On comprendra, peut-être, les origines et les objectifs du mal. Mais quelque chose restera toujours inexpliqué, en particulier aux Napolitains: comment vivre dans une ville où la science ne produit pas de conscience.
Francesco Grillo: Malheureusement, ce feu est le signe que Naples ne peut pas encore se permettre le luxe d'être normal. On devra dépenser encore beaucoup d'argent – trois milliards d'euros environ – dans la recherche scientifique au cours des sept prochaines années à Naples par la volonté de la Commission européenne, mais avec le désastre d'hier soir l'espoir de profiter de cette dernière opportunité diminue.
Le célèbre écrivain Roberto Saviano [fr] auteur du livre à partir duquel a été fait le film de Gomorrhe [fr] a déclaré :
@robertosaviano: Intentionnel ou accidentel ? Depuis toujours les clans cherchent à construire à Bagnoli : les flammes de la Cité des sciences c'est l'échec de l'édification d'une autre Naples.
Le Fiasco Job Blog signale :
Naples aujourd'hui est faite de cendres – a écrit Roberto Saviano – 160 employés ne savent même pas si et quand il reprendront à travailler… un squelette devant la mer. Complètement détruit le Centre des sciences, le planétarium, six hangars de douze mille mètres carrés et des dégâts pour plus de vingt millions d'euros. Il ne reste que le théâtre, c'est à partir de là que nous devons repartir.
Cité des Sciences, vue aérienne après l'incendie. Photo de Mattino.it reproduite avec autorisation
Le feu a été éteint après 13 heures et l’enquête suggère que les incendiaires étaient expérimentés, en agissant juste après la fermeture pour ne pas avoir de témoins. Le feu et parti de 12 points différents des hangars, ce qui laisse penser que les auteurs de l'acte criminel voulaient, sans doute, détruire toute la structure. Un jour, peut-être le pouvoir judiciaire et l'enquête vont révéler les véritables causes (politiques, économiques ou les liens avec la Camorra) de cette horreur.
En ce qui concerne la reconstruction, les institutions italiennes ont réagi, d'abord avec le Ministre de la Cohésion territoriale, Fabrizio Barca, qui a annoncé le 7 mars qu'il avait déjà débloqué une allocation de 5 millions d'euros, qui atteindra un total de 20 millions d'Euros pour le réaménagement des zones industrielles. Ensuite, le lendemain, est arrivée la promesse ambitieuse de Francesco Profumo, ministre de l’Éducation, de l'Université et de la Recherche, qui prévoit de reconstruire la Cité en 18 mois environ. Le gouverneur de Campanie Stefano Caldoro a fait une importante précision, qui rassure en ce qui concerne le lieu de la reconstruction: “Nul ne songe à déplacer la Cité des Sciences dans une autre partie de la ville que Bagnoli. Je peux vous assurer. “
Pendant ce temps, les autorités locales, des visages familiers et de simples citoyens ont lancé plusieurs initiatives pour aider à la reconstruction. Le groupe Reconstruisons la Cité des Sciences est né sur Facebook tandis que la première campagne de collecte de fonds (crowdfunding) sur le site Derev a déjà dépassé 10000 € [le 12 mars à 20 heures on atteignait € 51.021]. MADRE (Musée d'Art Contemporain DonnaREgina) de Naples a annoncé qu‘il fera un don de 10% de la recette du mois prochain pour la reconstruction de la Cité des sciences. Et le prix Nobel de physique Carlo Rubbia propose la création d’un comité ad hoc pour la reconstruction.
Il y a aussi des réactions sur les médias en ligne à l'étranger – comme le site français CetteSemaine [fr] :
Un des cent pôles d’excellence italiens”, “un des meilleurs incubateurs de nouvelles entreprises”, ex-“meilleur musée des sciences en Europe”, à la fois “centre de congrès, centre de formation et pépinière d’entreprises”, etc. voilà ce qu’était la Cité des Sciences de Naples. En respirant un peu plus la cendre, la suie et la lance à incendie, elle pue désormais un peu moins l’ode à la recherche technologique qui sème partout la mort…
Alors que le site anglais Ecsite [en], qui est celui du réseau européen des centres et musées de sciences, donne des détails sur la collecte de fonds :
Hier soir, un grand incendie a totalement détruit notre Centre des sciences de Naples. Nos rêves, 20 ans de travail, tout ce que nous avons investis dans ce projet a pris feu en quelques heures pendant la nuit. Nous avons besoin de l'appui de tout le monde, partout où vous êtes, pour croire en un nouveau départ “Toute contribution à la reconstruction de la Cité des Sciences peut se faire par l'intermédiaire du compte bancaire :
IBAN BIC IT41X0101003497100000003256 IBSPTINA
Ecsite, le Réseau européen des centres et musées de sciences, étend sa détermination à soutenir la Cité des Sciences en ce moment difficile. Le Centre est un membre fondateur de Ecsite et était un membre actif et essentiel dans l'organisation et la tenue d'une conférence d'Ecsite ainsi qu'en assumant la présidence de 2007 à 2009.
Enfin, les étudiants napolitains se sont faits entendre en organisant des événements publics, y compris une marche de protestation dans le centre-ville le 8 mars, suivie par un autre événement le lendemain, puis une Flash-mob qui a enregistré une forte participation, a été organisée le matin du 10 mars devant le lieu de l'incendie – à partir de laquelle a été prise la photo ci-dessous.