Mise à jour : une version précédente de ce post comprenait une photo d'un site de pétitions que nous pensions représenter l'expulsion des Amharas en 2012. La photo a depuis été supprimée. Un de nos lecteurs nous a signalé que l'original de cette photo avait été publié dans un article de 2010, et les Amharas représentés sur la photo étaient réunis pour obtenir des crédits. Nous présentons nos excuses pour cette erreur.
Dans l'ouest de l'Ethiopie, des milliers de personnes appartenant à l'ethnie Amhara sont en cours d'expulsion de la région de Benishangul Gumuz, où beaucoup sont installées, au moyen de ce que certains condamnent comme une campagne de “nettoyage ethnique“.
L’Ethiopie est divisée ethniquement en neuf Etats-régions politiquement autonomes et deux villes-régions depuis 1996. Les populations Amhara, y compris les enfants, les femmes enceintes et les malades d'après certaines informations, sont relocalisées [anglais] vers une zone rurale de la région Amhara, leur terre historique d'origine.
Les défenseurs des droits de l'homme expliquent que cette déportation est illégale [anglais] au regard du droit éthiopien et international. Les autorités éthiopiennes soutiennent [anglais] quant à elles que ces déclarations sont infondées. Les membres du gouvernement affirment qu'ils relocalisent des autochtones et des agriculteurs locaux au nom des programmes de villagisation.
Ce n'est pas la première fois que des fonctionnaires éthiopiens forcent des populations Amhara à se déplacer dans une autre région. En 2012, 22 000 d'entre eux auraient été expulsés [anglais] du sud de l'Ethiopie et leurs logis confisqués [anglais].
Un reportage de la Télévision Satellite Ethopienne de mars 2013 mis en ligne sur Youtube [amharique] cite des dirigeants de partis de l'opposition condamnant cette procédure d'expulsion.
Beaucoup d'Ethiopiens sont opposés à la politique du gouvernement d'expulsion massive des populations rurales. Une pétition en ligne demandant au gouvernement d'arrêter la campagne illégale prenant pour cible la population Amhara avait recueilli 1 995 signatures au moment de la publication de ce billet le 12 avril 2013.
La pétition [anglais], adressée au Dr. Chaloka Beyani [anglais], Rapporteur Spécial sur les personnes déplacées dans leur propre pays, et à beaucoup d'autres hauts fonctionnaires du gouvernement éthiopiens, annonce :
D'après les informations en notre possession, l'expulsion est mal organisée et entachée de plusieurs cas de violation des droits de l'homme. La présente pétition s'insurge contre cette expulsion et entend porter à la connaissance du gouvernement éthiopien et des organisations internationales le calvaire que traversent ces Ethiopiens privés de moyens d'expression. Veuillez signer la pétition et inviter vos amis à le faire également. C'est la moindre des choses que nous puissions faire pour montrer notre solidarité avec les Ethiopiens qui sont victimes d'une politique malavisée et irresponsable.
Jawar Mohammed, analyste politique et blogueur a formalisé [anglais] sur sa page Facebook les raisons derrière l'expulsion massive des Amhara :
Mon opinion est que l'expulsion massive à cette date correspond à un agenda politique bien précis orchestré par les détenteurs réels du pouvoir. En instiguant des attaques à l'encontre de populations Amhara vulnérables qui résident en dehors de leur Etat-région, le régime souhaite créer les conditions d'une victimisation à base ethnique. Le but est de forcer les leaders politiques Amhara à voler à leur secours en tenant un discours partisan, ce qui affaiblirait leur discours pan-Ethiopien. Qu'est-ce que le régime y gagne ?
Depuis l'élection de 2005, le [Front de Libération du Peuple du Tigré] fait beaucoup d'efforts pour transformer son discours ethno-nationaliste en nationalisme étatique. C'est-à-dire qu'il cherche à justifier son règne continu en se présentant comme le garant de l'Etat éthiopien et de son héritage historique. Cependant, avant de pouvoir y arriver, il doit déplacer ceux qui avaient les mêmes ambitions précédemment – l'élite Amhara. Une telle attaque chirurgicale contre leurs frères d'ethnie pourrait ainsi forcer les élites Amhara à adopter une position ethno-nationaliste et à abandonner le trône du nationalisme éthiopien à son nouveau prétendant – l'élite tigréenne.
Ce qui est triste c'est que pendant que les dirigeants font l'essai de toutes sortes de subterfuges pour prolonger leur séjour au palais, des cultivateurs pauvres et innocents qui luttent pour survivre avec un dollar par jour de revenu sont traités sans ménagement. Faire de cultivateurs des sans-abris au moment où les gens ont à peine de quoi survivre en raison du coût exorbitant de la vie est un crime cruel qui établit un dangereux précédent, qui doit être condamné par tous, sans considération de statut social ou d'appartenance politique.
Le blogueur Ephrem Eshete demande [amharique] aux Ethiopiens de dénoncer vivement les expulsions:
ሊወገዝ የሚገባው ተግባር መነሻው ምንም ይሁን ምን፣ የክልሉ ፓርቲ ከማንም ጋር ይስማማ አይስማማ በነዚህ ዜጎች ላይ የተደረገው ተገቢነት የሌለው ነገር ነው። የዜጎች በአገራቸው ውስጥ የመዘዋወር፣ የመኖር መብት እንዲህ በጥቂት የፓርቲ ሹመኞች መወሰኑ የሚያስጨንቅም የሚያስደነግጥም ምልክት
Cette mesure doit être dénoncée avec véhémence. Les partis administrant leurs Etats-régions respectifs se sont peut-être mis d'accord sur les conditions [des expulsions] mais c'est injuste quelles que soient les raisons derrière le déplacement forcé de ces citoyens de l'Ethiopie. Il est également alarmant de découvrir que le droit de circuler dans leur pays des citoyens éthiopiens est à la merci de responsables de partis politiques.
Abraha Desta, un activiste installé dans la capitale éthiopienne Addis Abeba, identifie [amharique] trois raisons pour les activistes de soutenir la population Amhara :
ሰዎች ከቀያቸው በሃይል (በግፍ በዘርሓረጋቸው እየተለዩ) ሲፈናቀሉ (ሲባረሩ) የከፋ የሰብኣዊ መብት ጥሰት ነው። ዜጎቻችን (ወገኖቻችን) ሲፈናቀሉ የሚደርሳቸው ኢኮኖሚያዊ፣ ማሕበራዊና ስነልቦናዊ ቀውስ (désespoir) መገመት ኣይከብድም። ሁሉም ኢትዮዽያ ሊተባበራቸው ይገባል፤ መንግስት ይህን ተግባሩ እንዲያቆም ተፅዕኖ ማድረግ ኣለብን። እኛም እየተፈናቀሉ ካሉ ሰዎች ጎን መሰለፍ ያለብን ይመስለኛል። ምክንያቱም (1) ወገኖቻችን ናቸው። እኛ ኢትዮዽያውያን ያልደረስንላቸው ማን መጥቶ ይረዳቸዋል? (2) ዛሬ በኣማራ ተወላጆች እየተፈፀመ ያለው ግፍ (ኣሁንኑ ካልቆመ) ነገ በእያንዳንዳችን እንደሚፈፀም ማወቅ ይኖርብናል። (3) የማፈናቀል ተግባሩ የብሄር ፖለቲካ ችግር ኣባብሶ የጥላቻ ፖለቲካ ስር ሰዶ የኢትዮዽያ ሀገራችን ኣንድነት የሚፈታተን ይሆናል።
Voici les raisons pour lesquelles nous devons rester solidaires de nos concitoyens : 1) Ce sont des Ethiopiens, donc si nous sommes pas à leur côté qui les soutiendra ? 2) A ce stade, si ce qui arrive à la population Amhara n'en reste pas là, nous devons prendre conscience que demain cela se produira pour tout le monde 3) Ces actes sont susceptibles d'aviver les tensions ethniques, qui pourraient se transformer en politique de la haine et menacer l'intégrité de l'Ethiopie.
Cependant, Mesfin Negash met en garde [amharique] contre l'idée de voir dans ces actes l'action d'un certain groupe ethnique contre un autre groupe ethnique plutôt que ceux de gens à qui tout sens de la décence fait défaut :
የዛሬ አፈናቃዮች በብሔረሰብ ካባ ለመደበቅ ቢሞክሩም ሕግ ፊት የሚቀርቡበት ቀን እንደሚመጣ አምናለሁ። ተፈናቃዮዩቹ በሙሉ የአማራ ብሔር ተወላጆች ቢሆኑም አፈናቃዩ ወገን ግን የየትኛውም ብሔር ወኪል እንዳልሆነ እናስታውስ፤ አደራ። ግፈኞቹ፣ መዝባሪዎቹ፣ ወሮበሎቹ፣ ሆድ አደሮቹና ዘረኞቹ አፈናቃዮች ብሔራቸው “ነውር” ነው። ነውረኞች።
Aujourd'hui les responsables de ces expulsions massives essaient de déguiser leurs actes et de se cacher derrière l'ethnicité, mais j'ai la conviction que le jour viendra où ces personnes feront face à un tribunal. Bien que les expulsés soient des Amharas, nous devons garder la conviction que les responsables ne représentent pas un groupe ethnique particulier. N'oubliez surtout pas que l'ethnie d'origine des fauteurs de trouble, des pillards et des racistes, c'est l'indécence !