Le Kirghizistan a-t-il besoin de l'Union Douanière russe ?

Sauf indication contraire les liens dirigent vers des pages en anglais.

Les polémiques qui tournent autour de la candidature potentielle du Kirghizistan à l'Union douanière [fr-français] qui regroupe la Biélorussie, la Russie et le Kazakhstan, ne sont par nouvelles. L'union est née en juillet 2011 et a pour objet de rassembler ses membres dans une zone économique commune et de créer une plateforme hors taxe pour le commerce de la région.

C'est la Russie qui est à l'origine de l'Union Douanière, et le projet fait partie intégrante de l’Union Eurasiatique [fr-français], projet géopolitique présenté par le Président Russe Vladimir Poutine lors de sa campagne électorale de 2011. Mais tandis que les états autoritaires du Kazakhstan et de la Biélorussie se sont faufilés en douce, la candidature potentielle du Kirghizistan reste un sujet d'âpres discussions.

Jusqu'à présent, les fonctionnaires du gouvernement n'ont cessé de dire que le Kirghizistan était volontaire et prêt à rejoindre l'union.

Customs Union censor net ua

'28 jours après l'entrée dans l'Union Douanière’, un “démotivateur” qui est devenu viral, avec l'autorisation de censor.net.ua, un site ukrainien. L'Ukraine réfléchit elle aussi à son entrée dans l'union. Traduction du titre: “Bienvenue à l'Union Douanière avec la Russie!”

Les partisans de l'entrée dans l'union pensent que l'Union Douanière est  nécessaire au développement économique, que c'est une chance unique pour les hommes d'affaires locaux d'exporter en Russie et d'encourager la productivité intérieure.

Par contre, pour ceux qui n'ont pas les yeux rivés sur la Russie, la candidature à l'Union Douanière provoquerait une perte énorme, car, le Kirghizistan et la Chine étant tous deux membres de l'Organisation Mondiale du Commerce, les importations chinoises connaîtraient une flambée des prix.

Au Kirghizistan, beaucoup pensent que “quand on n'a rien on n'a rien à perdre”. Mirlan, qui intervient en russe sur le site Vecherni Bishkek met en avant [ru-russe] la faible économie, principalement agricole:

У нас так и так ничего нету, нам нечего терять, а вот пользы можно найти при вступлении в ТС.

Nous n'avons pas grand-chose, nous n'avons rien à perdre, mais en adhérant à l'Union Douanière, nous avons tout à gagner.

A la suite de ce même article, qui illustre les difficultés du voisin du nord du Kirghizistan, le Kazakhstan, qui tarde probablement à voir les bénéfices de sa candidature à l'Union Douanière, les appréciations sont plus positives. Un autre lecteur, agriculteur d'Issyk-Kul confirme [ru-russe]:

У России – газ, у Казахстан – нефть, а у Кыргызстана – ничего. Так что вместе мы сила ))

La Russie a le gaz, le Kazakhstan a le pétrole et le Kirghizistan n'a rien. Ensemble nous sommes forts!

Mais ces appréciations ne tiennent pas compte du fait que l'économie du pays reste extrêmement dépendante des biens de consommation chinois. Les taxes prélevées sur ces biens sont en général d'environ 5%. Elles pourraient être doublées avec l'entrée dans l'Union Douanière. La Chine, en tant que membre de l'Organisation Mondiale du Commerce pourrait demander une compensation:

Comme le fait remarquer @m_asanaly sur Twitter [ru-russe] lors de Kloop Live Debates [ru-russe], une émission de débats en direct sur la plateforme de medias citoyens Kloop.kg:

Кыргызстан зависит от настроения Китая.

Le Kirghizistan dépend de l'humeur de la Chine.

Les opposants pensent que l'Union Douanière va ruiner l'économie du Kirghizistan. grâce à son adhésion à l’OMC [fr-français] depuis 1998 le Kirghizistan s'est constitué une source de revenus importante en ré-exportant les marchandises chinoises vers le Kazakhstan et l’Ouzbékistan voisins grâce au plus grand marché d'Asie Centrale – Dordoi. A lui seul le marché, de Dordoi rapporte plus de 400 millions de $ par an, soit 20% du PIB du pays. Une hausse des taxes sur les importations rendrait ce commerce insignifiant, supprimerait le travail des commerçants et Dordoi perdrait son essor.

Mais le Kirghizistan, petit pays enclavé, est face au choix d'Hobson: soit il décide de se débarrasser de la dépendance des importations chinoises bon marché qui étouffe sa production intérieure, soit il accepte les augmentations de prix et la domination russe.

Comme le dit [ru-russe] ‘Idiocy':

Вообще с нашими правителями лучше стать федерацией РФ. или районом КНР

Avec les législateurs que nous avons il serait préférable de devenir une fédération russe ou une région chinoise.

Le 14 mai, l'émission Kloop Live Debate sur le problème de l'entrée dans l'Union Douanière, émission qui fait partie d'une série de débats organisés par Kloop media pour traiter des problèmes controversés dans le pays, a opposé Sabyrbek Zheentaev à Borubek Kudayarov. Zheentaev, qui est favorable à [ru-russe] l'entrée du Kirghizistan dans l'union, dit que l'état devrait prendre la responsabilité de développer sa propre industrie :

Le Kirghizistan n'aura jamais accès au marché du commerce global s'il persiste à revendre des voiture chinoises. Même nos enfants continueront à vende des voitures chinoises et se trouveront face aux mêmes problèmes que les nôtres. Il faut que cela cesse.

 

Kudayarov, qui insiste sur l'importance des relations économiques du Kirghizistan avec la Chine, répond [ru-russe]:

La Russie ne s'intéressera toujours qu'à son propre marché, elle ne prendra jamais en compte les intérêts du Kazakhstan, de la Biélorussie et du Kirghizistan. Même le montant des taxes est fixé par la Russie. L'économie du Kirghizistan mourra sans le commerce avec la Chine!

 

Les abonnés des médias sociaux qui ont suivi le débat en direct ont partagé leurs opinions en utilisant le mot-clic #kloopdebates.

@AJamilya tweete [ru-russe] :

 Всё будет зависеть от интересов РФ 

Tout va dépendre des intérêts de la Russie.

Alors que @Azat25 dit [ru-russe]

В случае не вступления в Таможенный союз, инфляция будет каждым годом только расти 

Si le Kirghizistan ne rejoint pas l'Union Douanière, nous allons connaître une inflation croissante chaque année.

Il est clair que l'entrée dans l'Union Douanière est un sujet qui divise et les agricullteurs, les producteurs d'alcool, les commerçants qui revendent les produits chinois et les internautes ordinaires ne sont pas d'accord sur les mesures économiques à prendre. Mais comme le note [ru-russe] l'économiste kazakh Mukhtar Taizhan, contrairement à la Biélorussie et au Kazakhstan, le régime politique relativement libéral du pays nous donne au moins l'avantage de pouvoir discuter du sujet. Le peulple espère seulement que le gouvernement tiendra compte des discussions.

Ce billet fait partie du projet Global Voices en Asie Centrale, à l'Université Américaine d'Asie Centrale de Bishkek, Kirghiztan.

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