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Syria Untold : la leçon de Raqqa, de la liberté à la créativité pour reconstruire l'état

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Syrie, Action humanitaire, Catastrophe naturelle/attentat, Cyber-activisme, Education, Gouvernance, Guerre/Conflit, Idées, Jeunesse, Manifestations, Média et journalisme, Médias citoyens, Réfugiés

Cet article est aussi publié par Syria Untold [1] et traduit en anglais par Global Voices Arabic [2].

Pour les Syriens, demander la liberté se traduit par lutter contre la dictature, affronter l'assassinat, la prison, la détention et la destruction des infrastructures, mais peut aussi se traduire par la mise en place de nouvelles bases pour construire le pays dont ils ont longtemps rêvé. Est-il vraiment possible de reconstruire sur les ruines de tout ce qui a été détruit ?

S'il y a quelqu'un capable de réaliser l'impossible, ce sont les syriens. Ils ont transformé le slogan des étudiants français “Soyez réalistes, demandez l'impossible” en “Soyez réalistes, faîtes l'impossible”.

Après le retrait de l'armée syrienne de Raqqa en mars 2013, la ville a souffert d'un vide administratif considérable, principalement en ce qui concerne les services publics. Les rues étaient couvertes d'ordures et des restes des barricades érigées par le régime.

Une discussion, initiée par un groupe de 35 activistes restés dans la ville, a mené à la création d'un rassemblement dénommé “Les jeunes de Raqqa”. L'un des activistes, le chirurgien Ayman al-Khalaf explique à Syria Untold :

“Une semaine après la libération, nous avons commencé à parler des solutions à apporter à la défaillance des services publics résultant du retrait du régime et du démantèlement de ses institutions. Nous en sommes venus à la création de ce rassemblement, institution civile sans lien avec un quelconque parti politique ou une religion et sans affiliation militaire.”
The poster reads [ar]: To people who love freedom, know that the factory of heroes is in Syria. Source: Syria Untold

Sur l'affiche on peut lire : Les gens qui aiment la liberté savent que c'est en Syrie que l'on fabrique les héros. Source: Syria Untold

Le rassemblement a joué le rôle de la municipalité, en nettoyant les rues, en débarrassant les ordures du centre ville et en démontant les barricades du régime. Selon les paroles d'Ayman :

“Nous avons rêvé pendant si longtemps de vivre sans ce régime. Maintenant le rêve est devenu réalité, et nous devons être responsables et faire de la ville un réel exemple de liberté”.

Forts de leur liberté nouvellement acquise, des campagnes ont été organisées, comme “Nos rues respirent la liberté”. Des activistes ont distribué des drapeaux de la révolution dans toutes les rues et les lieux publics, ont nettoyé la ville, quartier après quartier, et recouvert les murs des rues de dessins et graffiti créatifs.

Raqqa..:Lessons in state building [3]

Raqqa..: Leçons de création d'un état

Les activistes ont aussi lancé une campagne “Nettoyons l'hôpital Public”, qui a duré jusqu'à ce que l'hôpital soit débarrassé des débris des bombardements et des destructions; et une autre campagne “Je ne veux pas quitter mon école” afin de réhabiliter les école pour que les enfants puissent reprendre leurs études le plus rapidement possible.

Activists at the I will not leave my school campaign [4]

Des activistes lors de la campagne “je ne veux pas quitter mon école”

Les activistes n'ont pas non plus oublié les réfugiés syriens qui arrivaient de toute part. Un service de restauration d'urgence a été créé pour fournir environ 500 repas par jour aux réfugiés, malgré le manque de pain dû à la pénurie. Ce fut l'occasion de la “Campagne notre pain”, où des morceaux de pain étaient distribués dans des petits sacs sur lesquels il était écrit “mon morceau de pain est le tien” et la citation du Prophète Mahomet “Personne ne peut être considéré comme croyant s'il ne souhaite pas pour les autres ce qu'il souhaite pour lui-même”.

Le rassemblement des jeunes n'a pas oublié les enfants syriens, qui supportent une situation désespérée depuis le début des combats. Des campagnes telles que “Les enfants ont le droit de vivre” visent à défendre leurs droits et à les encourager à participer à des ateliers de théâtre et à des activités qui favorisent la solidarité, la coopération et l'esprit d'équipe, et forment les enfants à de vraies valeurs qui promeuvent un nouveau sens d'appartenance au pays.

D'autres campagnes attirent l'attention sur les prisonniers politiques syriens, comme la manifestation pacifique du 7 avril “Libres derrières les barreaux”.

The sign reads: Freedom for the prisoner we don't know [5]

Il est écrit: Liberté pour les prisonniers que nous ne connaissons pas

La solidarité avec d'autres villes syriennes est partie de Raqqa, grâce à des campagnes comme “Les bougies de la liberté de l'Euphrate”.

Grâce à leur travail, les jeunes de Raqqa font ce que les institutions de l'état devraient faire. Pour citer Ayman, le jeune médecin activiste:

“Nous resterons forts parce que Raqqa est la capitale de la libération et nous poursuivrons notre travail pour que la ville soit à la hauteur de sa renommée, indépendamment de la militarisation.”

Cet article est aussi publié par Syria Untold [1] et traduit en anglais par Global Voices Arabic [2].