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En Arabie Saoudite, on vous tire dessus et on vous condamne pour cela

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Arabie Saoudite, Droit, Droits humains, Liberté d'expression, Manifestations, Médias citoyens

La Cour criminelle d’Arabie Saoudite a condamné [1] [arabe] quatre jeunes hommes de Qatifi à des peines allant de 16 mois à quatre ans de prison. L'un d'eux, Jalal Al-Qattan, touché par balle au ventre par les forces de sécurité lors d’une manifestation, et en fuite pour échapper à une arrestation, a été condamné à une peine de trois ans. Le procès, mardi 17 septembre, était le quatrième et dernier épisode d'un feuilleton qui remonte à une manifestation dans la soirée du 8 juillet 2012.

The four Qatif young men. Al-Qattan is top right.

Les quatre jeunes hommes de Qatif. Al-Qattan est en haut à droite.

Ce soir-là, Al-Qattan était parmi de nombreux jeunes qui ont pris part à une manifestation contre l’arrestation du religieux chiite Sheikh Nimer Al-Nimer [2][anglais]. Deux personnes ont été martyrs [3] [arabe] cette nuit-là (Sayyed Akbar Al-Shakhouri [4] [arabe] et Sayyed Mohammed Al-Felfel), et Jalal Al-Qattan a été blessé d'une balle au ventre. Il a été amené dans une maison à Awwamiya, où on a essayé d’arrêter l’hémorragie. Quelqu’un a appelé le frère de Jalal, Ali, qui est venu et a emmené Jalal à leur maison. La famille de Jalal a essayé de le persuader de le transporter à l’hôpital, mais il a refusé craignant d’être arrêté. Deux activistes des 23 “personnes recherchées” – l’un est Morsi Al-Rebh qui a été abattu [5][anglais] à Awwamiya en juin dernier – ont suivi la situation de Jalal et ont tenté de lui obtenir une aide médicale. Ils ont trouvé une infirmière, mais elle leur a dit que son état était critique et qu’il devait être opéré. L’un des activistes a proposé de trouver un chirurgien, mais n’en a trouvé aucun alors ils ont fait venir un autre infirmier qui a répété les mêmes conseils. La famille a essayé de nouveau de convaincre Jalal de se faire soigner dans un hôpital, mais il a refusé. Donc, son oncle a suggéré de le faire sortir du pays. Le lendemain, Jalal Al-Qattan, son frère Ali, son oncle Mohammed Al-Mislab et son beau-frère Hussain Al-Areef ont été arrêtés au port de Khafji en route vers Koweït.

Parmi les charges retenues contre eux : la rupture d’allégeance au souverain, le non-signalement des autres manifestants, le non-signalement des deux personnes recherchées qui ont conduit Jalal en lieu sûr pour s’y faire soigner, le non-signalement des infirmiers qui ont tenté de venir en aide à Jalal en dehors du lieu assigné pour des traitements médicaux. Jalal a également été inculpé d’insolence envers ses parents parce que l’accusé lui-même s’est mis en danger en refusant d’aller à l’hôpital. Jalal et son oncle ont été reconnus coupables de toutes les accusations portées contre eux et Jalal a été condamné à trois ans de prison suivis d'une interdiction de voyager pendant trois ans, alors que son oncle a été condamné à quatre ans de prison et une interdiction de voyager pendant quatre ans. Le frère de Jalal, Ali, a été condamné à deux ans de prison et une interdiction de voyager pendant deux ans. Al-Areef n’a été retenu coupable que d’une tentative de “faire sortir clandestinement” son beau-frère du pays au lieu de le dénoncer  aux autorités. Il a été condamné à 16 mois de prison et une interdiction de voyager pendant 16 mois.

Les utilisateurs de Twitter ont commenté les verdicts :

A Qatif, nous avons beaucoup de Jalal Al-Qattans qui ne sont pas allés à l’hôpital craignant d’être arrêtés et le sort de Jalal. Certains ont échappé à la prison en devenant invalides.

Aujourd’hui, c’était le procès de Jalal Al-Qattan qui a été atteint d’une balle par les forces de sécurité.

Étrange ! Ils ont tiré sur lui, ensuite l’ont condamné à trois ans.

Dans le royaume de l’humanité, soigner les blessés est un crime puni par la loi, même si le blessé était un proche.