- Global Voices en Français - https://fr.globalvoices.org -

Cameroun : Que promettent les candidats aux élections législatives et municipales du 30 septembre prochain ?

Catégories: Afrique Sub-Saharienne, Cameroun, Développement, Élections, Politique, Santé

Les élections, ou du moins les campagnes électorales, sont généralement l’occasion pour les hommes politiques de rivaliser d’adresse en termes de promesses. Et ceux du Cameroun, en lice pour les élections en vue du renouvellement des députés à l’assemblée nationale [1] et des conseillers municipaux (au niveau des communes [2] que compte le pays), du 30 septembre prochain, ne semblent pas échapper à la règle.

 

Les départements au Cameroun par région - Domaine public [3]

Les départements au Cameroun par région – Domaine public

Même si le plus souvent ces promesses ne sont pas toujours tenues, au moins elles donnent un aperçu des ambitions (supposées) des uns et des autres et, d’une certaine manière, nous donnent une idée des différents manquements du pays ou de la communauté concernée. Mais encore faudrait-il que les différents candidats aient des programmes bien définis et qu’ils les fassent connaitre.

Candidats, déclinez vos programmes !

Comme l’affirme Crescence Nyindi dans un article [4] paru sur le site Echos des Grands Lacs :

proposer des programmes cohérents n'est pas la chose la plus aisée pour certains partis politiques engagés dans la course.

Car, depuis le début de la campagne électorale [5] le 15 septembre dernier, nombreux sont les camerounais qui ne cessent de tendre l’oreille sans vraiment rien entendre de concret venant de la bouche de nombreux candidats en lice. C’est dire si ces candidats brillent par la qualité et la consistance de leurs programmes.

Comme un air de déjà vu

Cela va sans dire que tous les partis politiques en lice dans les différentes circonscriptions électorales ont des programmes, plus ou moins clairement définis. Cependant, le manque d’ambition et d’innovation dans la plupart  de ces plans d’actions laisse à désirer.

Dans un article [6] paru sur son blog, le blogueur Mathias Mouendé Ngamo, présente le programme du Cameroon People’s Party (CPP) d’Edith Kah Walla : « qui convoite 132 sièges à ces élections municipales » dans quelques circonscriptions administratives du pays dont celle de Douala 1er. Un programme qui se déclinerait en 3 axes (politique, économique et social). Ce parti entend par exemple [6] :

former par an 1000 jeunes en informatique, « afin de qu’ils correspondent au nouveau profil de l’emploi recherché par les entreprises.

Comme si le pays ne dispose pas déjà d’assez de jeunes formés et compétents dans ces domaines.

Idem pour ce candidat du Social Democratic Front qui promet [7] :

 du travail aux jeunes et une éducation plus accrue notamment.

Pour certains candidats du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC – parti du président Biya), l’heure n’est pas non plus à l’innovation. On préfère continuer dans la même lancée que celle du mandat précédent. C’est le cas notamment de la candidate de ce parti en lice pour la mairie de Yaoundé 4e [8], qui avoue vouloir continuer ses œuvres entamées lors de son précédent mandat.

Vue sur Yaoundé, Capitale du Caméroun -Domaine public [9]

Vue sur Yaoundé, Capitale du Cameroun -Domaine public

Mais de qui se moque-t-on au juste ?

Le pire, ce sont ces candidats qui usent de pratiques peu orthodoxes, frisant presque la corruption, pour s’attirer la sympathie des électeurs, préférant les séduire par la bière et la nourriture, à défaut de les séduire avec un plan d’action digne de ce nom et transforment ainsi leur pseudo meetings électoraux en des fêtes populaires, comme le relate Joseph Olinga dans cet article [10] repris par le site cameroun24.net :

Un candidat à un siège à la représentation nationale bien connu du bataillon, est en campagne dans un marché de la ville de Douala. Après un tour des installations sommaires sur fond de youyous, le candidat à la députation interpelle une vendeuse de mets de pistache et lui achète tout son plateau. Un exploit qu’on ne vit pas tous les jours. La vieille dame visiblement éberluée promet «solennellement» d’accorder son suffrage au candidat. Les mets achetés sont aussitôt distribués aux badauds qui ont envahi le théâtre. Et, puisque que la consommation du piment nécessite une bonne bière, notre candidat visiblement au fait des us locaux débloque, séance tenante, une centaine de mille pour l’achat du « précieux liquide». Youyous, valses d’applaudissements et fin du meeting. Le tout dans une ambiance de bénédictions au bénéfice du candidat que la clameur confie à Dieu.

Des scènes récurrentes en ces temps de campagnes, souligne [10]-t-il:

Un autre candidat bien connu de l’opposition gare son véhicule. Le « Messie » est aussitôt entouré par une horde de conducteurs de mototaxis, des vendeurs et quelques curieux. «J’espère que vous voterez pour nos listes aux municipales et aux législatives », leur lance-t-il (ndlr). Quelle question ? «Considérez que vous êtes déjà élu» scandent les populations. Une liasse de billets de banque est remise «au doyen». Distribution des affiches aux invités, salve d’applaudissements et fin de meeting. Le candidat se remet à bord de son véhicule escorté par une dizaine de mototaxis le tout sur une chanson populaire revue en l’honneur du désormais député.

Des scènes assez surréalistes, qui illustrent parfaitement la médiocrité de certains « politicards » assoiffés de pouvoir comme les nomme [11] le blogueur Franck William Batchou. Des comportements visant à masquer l’absence de programmes et qui, lorsqu’ils sont généralisés, pourraient laisser penser que les camerounais n’ont pas conscience de l’importance de ces élections et du sens que revêt leur vote. Heureusement, il y’en a qui ne sont pas dupes.

Quand les citoyens prennent les choses en main

Face à l’inconsistance de la plupart des programmes (pour ceux des candidats qui en ont), les populations semblent avoir décidé de prendre leur propre destin en main en interpellant les différents candidats sur des sujets qui leur tiennent à cœur. C’est le cas notamment de ces organisations de la société civile qui, à travers le projet « santé aux urnes », [12] veulent attirer l’attention des candidats sur les problèmes d’accès aux soins de santé auxquels sont confrontés de nombreux camerounais. Des appels qui nous l’espérons, ne tomberont pas dans des oreilles de sourds.

Quoiqu’il en soit, le dernier mot revient aux électeurs. Du moins, théoriquement.