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La suspension pour dopage de Viktor Troicki va-t-elle trop loin ?

Catégories: Serbie, Dernière Heure, Droit, Droits humains, Médias citoyens, Sport
Viktor Troicki signing autographs at PTT Thailand Open 2009; photo courtesy of Government of Thailand, used under Creative Commons 2.0 License.

Viktor Toricki signant des autographes au PTT Thailand Open en 2009 ; photo du Gouvernement de Thaïlande, Creative Commons 2.0 License.

Un joueur de tennis serbe de classe mondiale a été suspendu par la Fédération Internationale de Tennis (ITF) pour avoir manqué un contrôle antidopage au cours de cette année. Il n'a ainsi pas eu l'autorisation de soutenir ses coéquipiers lors de la finale de la Coupe Davis, à Belgrade, une initiative qui a amené les fans à s'interroger sur l'équité du système antidopage du sport.

Dans un premier temps, Viktor Troicki a été condamné à 18 mois de suspension, mais a réfuté les charges pesant contre lui, arguant qu'il avait déjà donné un échantillon d'urine qui s'était révélé négatif. Sa peine fut finalement réduite à 12 mois début novembre, et le Tribunal Arbitral du Sport a déclaré qu'il n'y avait aucun signe [1] que Troicki “ait tenté d'éviter la détection d'une substance dopante dans son organisme”.

Le jeune joueur de tennis ne pouvait pas non plus assister aux matches, dont les demi-finales de Coupe Davis auxquelles prenait part la Serbie en septembre, tant que son appel était en cours d'examen.

Un article [2] du New York Times résumait les événements et ajoutait quelques anecdotes intéressantes :

Initialement suspendu pour 18 mois par la Fédération Internationale de Tennis, Troicki a vu sa peine réduite en appel à un an par le Tribunal Arbitral du Sport la semaine dernière. Mais ce qui apparaît comme une victoire ressemble davantage à une défaite. Son cas a généré diverses opinions de la part des meilleurs joueurs mondiaux, du soutien d'Andy Murray et Roger Federer au système antidopage à l'amertume de Novak Djokovic, coéquipier et ami proche de Troicki.

Cependant, bien que la suspension ait été réduite et que l'enquête contre lui soit officiellement terminée, Troicki a de nouveau été interdit de présence lors de la finale de Coupe Davis [3], qui avait lieu dans la Kombank Arena de Belgrade, le 15 novembre. La Fédération Serbe de Tennis (TSS) va ainsi dans le même sens que l'ITF en empêchant Troicki d'entrer dans un stade, même en tant que simple spectateur ayant payé son ticket, ce que le joueur avait prévu de faire afin de soutenir ses coéquipiers. Certains médias affirment même que la TSS aurait distribué des photos de Troicki au service de sécurité de la Kombank Arena afin de s'assurer que le joueur serait reconnu et ne pourrait pénétrer dans l'enceinte, avec ou sans ticket.

Indépendamment de la suspension et des allégations de dopage, ou des opinions personnelles des collègues de Troicki, les fans s'interrogent désormais sur le droit des Fédérations Serbe et Internationale à limiter les déplacements d'un joueur. Nombreux sont ceux qui, sur les réseaux sociaux, les forums de discussion et dans les commentaires sur des articles en ligne ayant trait à cette affaire, ont accusé l'ITF et la TSS de bafouer les droits civiques en interdisant la présence de Troicki dans les gradins en tant que spectateur, assis parmi les fans.

Dejan Nikolić [4], un journaliste et fondateur du site satirique serbe Njuz.net, a posté un commentaire public [5] sur son profil Facebook :

Fascinantna mi je ova situacija, ako je tacno, gde Troickom biva ograniceno kretanje kao gradjaninu zato sto ga je neka sportska organizacija suspendovala. Mislim da je to pitanje za ustavni sud, Strazbur i jos pokoju instituciju za ljudska i gradjanska prava.

Jedna je stvar ne dozvoliti da ucestvuje na turnirima, sasvim druga ogranicavati slobodu kretanja.

Si cela est vrai, le fait que la liberté de mouvement de Troicki soit limitée à cause d'une suspension émise par une organisation sportive est un cas fascinant. Cette affaire devrait être portée devant la Cour de Strasbourg, et d'autres institutions de défense des droits de l'homme.

C'est une chose de lui interdire la participation à des tournois, c'en est une autre de restreindre sa liberté de mouvement.

Parmi les 52 commentaires affichés sous l'article de Nikolić, certains appuyaient les règles de l'ITF, qui stipulent que les joueurs pénalisés par l'organisation sont également bannis de tous les tournois et événements connexes. La plupart des internautes ont cependant remis en question l'autorité dont dispose l'ITF ou toute autre organisation sportive d'interdire à tout personne d'acheter une place et d'assister à des événements sportifs.

Des commentaires similaires ont également été postés sous d'autres articles en ligne étrangers, où des fans, pas seulement serbes, faisaient les mêmes reproches. En réponse à un court article [6] sur le portail du site italien LiveTennis.it, qui se faisait l'écho de la mésaventure de Troicki à la Kombank Arena de Belgrade, un internaute, Francis, a posté ceci :

allora ne dico un’altra di scemenza ribattendoti che quanto dici mi pare molto strano… nel senso che l’atp o l’itf o la federazione serba possono non considerare valido il pass da addetto ai lavori e vietare l’accesso ai settori a loro destinati; vietare l’ingresso con regolare biglietto pagato vorrebbe dire una palese limitazione della libertà individuale.

Maintenant, ils disent encore plus d'inepties qu'avant – soit que l'ATP, l'ITF ou la Fédération Serbe pourraient invalider un ticket et prohiber l'accès aux zones correspondantes, ce qui signifie une restriction flagrante des liberté individuelles.

Un autre lecteur du même article, Andy86, ajoute :

Francamente mi pare una cosa veramente che non sta ne in cielo ne in terra… lui è squalificato piu o meno giustamente (non sta a me dirlo) per quello che riguarda la sua attività agonistica, ma che ora non lo facciano entrare allo stadio, mi pare veramente fuori dal mondo..

Honnêtement, la seule chose qui me perturbe n'est pas qu'il ait été disqualifié plus ou moins à juste titre (ce n'est pas à moi de le dire) pour des faits ayant trait à ses activités sportives. Ce qui me met hors de moi, c'est l'interdiction qui lui est faite de pénétrer dans un stade.

Ni l'ITF ni la Fédération Serbe n'ont répondu aux interrogations émises par le public, ni fait de déclaration justifiant leur pouvoir d'interdire à n'importe quel joueur d'acheter une place pour un événement tennistique, ni même d'y assister en tant que simple spectateur.