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La “guerre sur Twitter” pour le pouvoir prend fin en Ouzbékistan

Catégories: Asie Centrale et Caucase, Ouzbékistan, Médias citoyens, Politique

[Liens en anglais et russe] Gulnara Karimova, la flamboyante fille du président d'Ouzbékistan [1] [anglais], a déçu plus de 50 000 followers en désactivant [2] son compte Twitter (@GulnaraKarimova). Au cours des dernières semaines, ses tweets ont fourni un rare aperçu des luttes de pouvoir se jouant dans l'un des pays les plus fermés au monde.

La disgrâce de la “princesse”

Gulnara Karimova [3], 41 ans, est l'une des personnes les plus riches et les plus influentes d'Ouzbékistan. Elle a longtemps figuré parmi les potentiels successeurs à son père, qui dirige cette nation d'Asie Centrale depuis 1989. Diplômée d'Harvard, Gulnara a été ambassadrice aux Nations Unies et en Espagne. Depuis, elle est devenue une pop star et une créatrice de mode. Elle a également bâti un vaste réseau d'organismes de bienfaisance et de médias, et s'investit dans les affaires et les projets culturels en Ouzbékistan.

Il y a quelques semaines, les projets de Karimova ont été menacés par les services de sécurité. Plusieurs de ses collaborateurs et quelques-uns de ses gardes du corps ont été arrêtés sur la base de charges qu'elle juge inventées de toutes pièces.

Gulnara Karimova. Image from Wikimedia Commons. [4]

Gulnara Karimova. Image de Wikimedia Commons.

Une “Twitter-guerre”

De façon surprenante, Karimova a expliqué sur Twitter [5]être victime d'un complot orchestré par le puissant ministre de la sécurité afin de limiter son influence politique. Au cours des dernières semaines, elle a ainsi rapporté via Twitter les attaques intensives des services de sécurité ouzbèkes qui menacent ses intérêts politiques et commerciaux. Elle a également accusé [6] les services de sécurité de recourir à la torture pour extorquer des aveux.

Le nombre de ses followers a augmenté au fur et à mesure qu'apparaissaient ses tweets. Nombre d'entre eux incluaient des journalistes étrangers et des universitaires. Les tweets de Gulnara ont fourni un aperçu inédit des luttes de pouvoir se jouant dans l'un des pays les plus fermés du monde. BBC a décrit [5] l'utilisation faite du réseau social par Gulnara comme une “Twitter-guerre”.

Il semble que Gulnara pouvait compter sur de nombreux internautes, retweetant des centaines de messages d'autres utilisateurs ouzbèkes qui exprimaient leur soutien. Parmi ses followers se trouvaient également des citoyens de pays frontaliers, qui attendaient des enfants d'hommes de pouvoir qu'ils utilisent Twitter. Le 20 novembre, un follower tadjikistanais a posté :

Je commence et termine ma journée en regardant sur Twitter le feuilleton sur le padichah [9] (roi) ouzbèke, sa fille @GulnaraKarimova et le diabolique vizir [10] (ministre) de la sécurité

Quel dommage qu'ils ne fassent pas ce genre de films au Tadjikistan.

Un autre utilisateur de Twitter a également écrit :

L'histoire de Gulnara Karimova est peut-être la première lutte pour le pouvoir que l'on peut suivre sur Twitter.

Gulnara quitte Twitter

La “Twitter-guerre” de Gulnara s'est intensifiée à la mi-novembre lorsqu'elle a accusé le ministre de la sécurité d'Ouzbékistan d'utiliser des méthodes coercitives dignes de Staline pour renforcer son emprise sur le pouvoir. Puis, le 20 novembre, elle a imputé [2]sa disgrâce à sa mère, Tatyana Karimova. Gulnara prétend [13] que sa mère “a promis de détruire tout ce qui se rapporte à [Gulnara]” si celle-ci ne cesse son “intrusion” dans ses intérêts commerciaux. Environ un mois plus tôt, Gulnara a également accusé [14] sa mère de pratiquer des rituels occultes et voire le “satanisme”.

Après avoir passé un certain temps à “rendre public le linge sale de sa famille [13]“, Gulnara a désactivé son compte Twitter.

Après une journée mémorable à rendre public le linge sale familial, le compte Twitter de Gulnara Karimova disparaît (de nouveau, pour le moment)

De nombreux internautes sont aujourd'hui déçus de perdre le rare aperçu de la vie politique et de ses querelles au sein de la famille régnante d'Ouzbékistan :

Gulnara Karimova a supprimé son compte Twitter. Quel dommage, la petite page était intéressante.

Diable ! où est Karimova ? Rendez-nous Karimova ! Comment vais-je me tenir au courant des dernières nouvelles d'Ouzbékistan ? 

Comment se termine le feuilleton entre le padichah ouzbèke et sa fille ? Happy end ou non ? J'exige que le feuilleton se poursuive !

Le feuilleton pourrait reprendre prochainement. En effet, alors que Gulnara avait déjà disparu [21] de Twitter par le passé, elle y était rapidement revenue, assouvissant sa passion de plus en plus forte pour le réseau social.