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Galia Borisenko a disparu l'année dernière à la mi-juillet en chemin pour une consultation médicale. A 23 ans, elle était enceinte de 3 mois et c'était le lendemain de son mariage. Personne n'a revu Borisenko jusqu'au 4 janvier 2014, quand elle est arrivée chez sa grand-mère, amaigrie, sans enfant, et désorientée. Elle affirmait avoir survécu à près de six mois d'esclavage sexuel, attachée à un radiateur dans la cave d'un immeuble. Borisenko dit que les hommes qui l'ont enlevée sont des Russes du Nord Caucase, et des renseignements ont pu identifier un “homme de 50 ans du Daguestan”, dont on ne connaît pas le nom, comme étant le propriétaire de la maison où elle dit avoir été emprisonnée.
La police a informé le journal Komsomolskaia Pravda que l'état mental de Borisenko était altéré par la drogue. (De fait, elle a été incapable de leur situer la cave où elle avait été détenue, bien que les enquêteurs l'aient accompagnée sur différents lieux qu'ils soupçonnaient possibles.) Selon Borinsenko, ses ravisseurs l'ont obligée à se droguer pour la neutraliser.
A son retour, la famille de Borisenko a décidé de ne pas la faire hospitaliser, ce qui a été une grave erreur. Par la suite, dans la nuit du 5 janvier, Galia Borisenko s'est jetée du 5ème étage de son immeuble. On ne sait pas si elle a été victime d'une crise psychotique ou si elle a délibérément choisi de se donner la mort. Elle n'a pas laissé de message.
La disparition puis le suicide de Borisenko sont devenus le sujet de discussions intenses sur les enlèvements à Astrakhan, dont les habitants accusent les immigrants du Nord Caucase. Des groupes comme l’Initiative Nationaliste Socialiste et le Mouvement Contre l'Immigration Illégale se sont saisis de l'histoire et ont pris l'exemple de la disparition de Borisendo pour dénoncer les crimes racistes commis contre les Russes blancs et le refus des autorités de régler le problème. (Borisenko est de sang tatar et ukrainien.)
Les enquêteurs d'Astrakhan semblent avoir aggravé les tensions ethniques en publiant le 6 janvier un communiqué de presse qui réfute la plainte de Borisenko pour enlèvement. Les enquêteurs disent maintenant avoir des témoins et des enregistrements de caméras de sécurité qui accréditent la thèse selon laquelle elle aurait été vue circulant librement dans les rues d'Astrakhan lors de sa prétendue détention. Sans entrer dans les détails, le communiqué de presse explique que la longue disparition de Borisenko est due aux “circonstances de sa vie personnelle”, insinuant qu'elle aurait fui sa famille par peur ou pour rechercher de la drogue.
Les blogueurs d'Astrakhan sont très sceptiques sur la versions des faits avancée par le Comité d'Enquête [la police criminelle fédérale russe]. Selon Alexandr Alymov, un activiste local, des fonctionnaires municipaux l'ont contacté quelques heures après qu'il a publié un premier article sur la disparition et le suicide de Borisenko pour lui demander de retirer l'histoire de son blog sur LiveJournal. D'autres blogueurs ont ridiculisé le Gouverneur d'Astrakhan, Aleksandr Jilkine, qui fait appel aux citoyens en leur demandant de ne pas attiser la haine ethnique. “Continuons à pratiquer la tolérance mes chers concitoyens”, écrit ironiquement le blogueur Andrei Egorovon, sur LiveJournal, le 6 janvier, en donnant un lien vers le communiqué de presse des enquêteurs qu'il commente ainsi “Voici la version tolérante du Comité d'Enquête [sic]. Personnellement je n'y crois pas.”
L'Initiative Nationaliste Socialiste (un groupe d'extrême droite, au cas où vous n'auriez pas deviné) prétend que le refus de la police de reconnaître la véracité de l'histoire de Borisenko fait partie d’une tendance générale à dissimuler les crimes ethniques des Nord-Caucasiens contre les Russes. Selon l'Initiative Nationaliste Socialiste, la mise en application de la loi russe “rend les victimes responsables” afin de ne pas faire état des crimes commis par certaines minorités ethniques. L'Initiative Nationaliste Socialiste dit que la police et les journalistes sont impliqués dans la diffamation d'individus et de communautés russes victimisés par les Nord-Caucasiens, et ce depuis les émeutes raciales de Kondopoga.
Bien sûr, tout le monde ne pense pas que la tragédie de Borisenko est une conspiration contre les Blancs. hren_morjov, utilisateur de LiveJournal et habitant d'Astrakhan, s'en tient à la conclusion des enquêteurs qu'il n'y a jamais eu d'enlèvement. Il relève plusieurs incohérences dans l'histoire de Borisenko. Pourquoi est-t-elle réapparue à Rastopulovka, le “trou du cul du monde” (un village très loin d'Astrakhan) chez sa grand-mère, plutôt que chez ses parents ou son mari (qui n'habitent qu'à deux heures du centre ville) ? hren_morjov trouve aussi bizarre que la famille de Borisenko ne l'ait pas amenée à l'hôpital après avoir soi-disant passé cinq mois droguée, battue et affamée. “N'importe quel mari ou parents normaux ” argumente-t-il “aurait amené sa femme ou sa fille à l'hôpital et aurait attendu les résultats des examens.”
Pas plus tard que l'automne dernier, le Comité d'Enquête d'Astrakhan a mis en garde contre la diffusion sur internet d'histoires d'enlèvements horribles commis par des Nord-Caucasiens. Dans un communiqué de presse du 3 août 2013, les enquêteurs ont même émis des réserves contre l'attribution de la disparition de Borisenki à un réseau secret d'esclavage sexuel. A cette époque, les enquêteurs attribuaient les rumeurs à des “adolescentes qui n'avaient pas d'informations fiables”, et qui “semaient la panique” en essayant de mettre en garde les femmes d'Astrakhan sur l'existence de monstres venus du sud.
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