L'ombre des “expulsions olympiques” plane sur Tokyo

反五輪の会のフェイスブックページに投稿された写真。ロシア政府は、19世紀にアレクサンドル2世によってチェルケシア人口のおよそ90パーセントが殺害されたか土地を追われたチェルケシア虐殺についていまだ認めていない。

Photos d'un groupe anti-Jeux olympiques à Tokyo, postées sur Facebook. Des bannières expriment des messages d'opposition à l'organisation des Jeux Olympiques à Sotchi, lieu de génocide, et à ceux de 2020, au Japon. (photo de 反五輪の会[han-gorin-no-kai] utilisée avec autorisation)

[Tous les liens sont en japonais, sauf indication contraire]

Ayumu Hirano, plus jeune médaillé de snowboard half-pipe ; Yuzuru Hanyu, premier champion olympique japonais de patinage artistique : ces symboles de la réussite des sportifs nippons aux Jeux Olympiques d'hiver de Sotchi ravissent actuellement les Japonais. Mais d'autres n'hésitent pas à s'exprimer contre l'événement olympique, présent et futur. 

Compte tenu des dizaines de milliards investis pour accueillir cet événement sportif international, les Jeux ne pouvaient échapper aux critiques. Ainsi, le président américain Barack Obama, le premier ministre britannique David Cameron et la chancelière allemande Angela Merkel ont boycotté [anglais] la cérémonie d'ouverture des JO de Sotchi qui viennent de se clore, en raison de la loi “anti-propagande homosexuelle” adoptée l'an dernier par la Russie. Human Rights Watch a exhorté le Comité International Olympique [anglais] à enquêter sur les non-paiements de salaires des ouvriers ayant travaillé sur les chantiers olympiques. Les groupes de défense des droits des animaux se sont inquiété quant à eux du sort funeste [anglais] réservé aux chiens errants.

Mais le premier ministre japonais Shinzo Abe a assisté à la cérémonie d'ouverture. Yuji Kitamaru, chroniqueur japonais à New York, souhaite sensibiliser non seulement le ministre, mais également les citoyens quant au bafouement des droits de l'Homme:

L’histoire de Sotchi [anglais] demeure le problème le moins abordé et le moins connu. Le peuple circassien souhaite [anglais] la reconnaissance du Muhajir [anglais] (génocide circassien) par le gouvernement russe, durant lequel près de 90% de la population locale fut tuée ou déplacée, sous le règne du tsar Alexandre II, au XIXème siècle. Le site web “NoSochi2014” a ainsi été crée pour accentuer la pression sur le gouvernement russe et manifester son soutien à cette cause.

Le groupe japonais anti-Olympique “Hangorin-no-kai” a exprimé sa solidarité avec NoSochi2014 et publié un message sur Facebook [anglais/japonais], où il déclare son refus d'accueillir les Jeux Olympiques de 2020 à Tokyo pour cause de potentielles expulsions forcées:

A tous ceux qui protestent contre les Jeux Olympiques de Sotchi, sachez que nous vous soutenons depuis Tokyo, la ville organisatrice des Jeux Olympiques d'été de 2020.

Nous comprenons que Sotchi 2014 a lieu dans une région où les Circassiens ont été massacrés par l'Empire Russe, et désormais la Russie organise les Jeux grâce au plus gros budget de l'histoire des Jeux Olympiques.

Nous constatons également qu'au nom du développement des Jeux, plus de 2000 personnes ont été expulsées et de hauts niveaux de destruction environnementale ont été observés dans la région.

[…]

Ici à Tokyo, le réaménagement inutile en vue des Jeux de 2020 a déjà débuté avec les évictions des populations à faibles revenus. 

La contamination radioactive causée par le désastre nucléaire de Fukushima est loin d'être stabilisée, et encore moins sous contrôle, comme l'a annoncé fièrement le Premier Ministre Abe au CIO.

Tokyo se berce d'illusions, alors que les habitants de Fukushima et de nombreux travailleurs de la centrale nucléaire, exposés aux radiations, sont abandonnés par l'Etat, qui ne les soutient pas suffisamment.

Les Jeux Olympiques ne sont rien d'autre qu'un cauchemar.

Ce qui se passe actuellement à Sotchi pourrait également nous arriver dans 6 ans.

Les préoccupations du groupe concernent les expulsions, pratiques courantes avant l'organisation d'événements internationaux. Certains sans-abris séjournant dans des parcs publics ont ainsi été évincés de leurs tentes à mesure que de grands événements approchaient.

Voici quelques exemples mentionnés sur Twitter: avant la Coupe du Monde de Football en 2002 et les championnats du monde d'athlétisme en 2007, des sans-abris occupant le parc Nagai d'Osaka ont été expulsés. Avant l'Exposition Internationale d'Aichi, les tentes de sans-abris du parc Shirokawa de Nagoya ont été déplacés. A Tokyo, des actions semblables ont commencé début mars 2013 lorsque le groupe d'inspection du Comité International Olympique visita la capitale japonaise.

2013年12月15日(日)反五輪の会が主催したデモの模様。写真:mkimpo.comより許可を得て掲載

Des protestataires défilent dans le cadre d'une manifestation organisée par un groupe anti-olympique à Tokyo, le 15 décembre 2013. Photo de mkimpo.com. Utilisée avec autorisation

Mais les expulsions ne touchent pas seulement les sans-abris. Selon l’AFP [japonais], environ 2000 ménages vivant dans une résidence à Shinjuku, un arrondissement de Tokyo, sont menacés d'expulsion. La majorité de ces résidents sont âgés.

Un blogueur nommé “定年おじさんのつぶやき” – que l'on pourrait traduire par “Commérages d'un vieux retraité” – écrit à propos des dessous des Jeux Olympiques :

日本での最初の五輪開催は、まさに日本が経済成長を遂げ先進国の仲間入りを果たしたことを世界に誇示する最高の舞台だった。
だが晴れの舞台の陰には多くの人々の犠牲がついて回る。
昔から「開発」という行為には必ず自然や環境の「破壊」ということばがついて回った。

戦争は何も生み出さない最大・最悪の「破壊」行為であるが、五輪開催という大義名分には中々反対の声は上げにくい。

とりわけ立場の弱い人たちは、「お上」の命令には逆らうことができない。
54年前、アジアで初めての五輪開催を控えて都は老朽化住宅の建て替えを始めた。

当時は建て替えられた新しいアパートに再び入居することができたが、そのアパートも逐50年も経ち高齢になった住民は、2020年の五輪に向けて追い出されることになった。

Quand Tokyo a accueilli pour la première fois les Jeux Olympiques [en 1964], ce fut une étape importante pour montrer au monde entier le développement du Japon grâce à sa croissance économique.

Mais on ne peut espérer être sous les feux des projecteurs sans quelques sacrifices.

A travers les siècles, un acte de développement a toujours été suivi d'une destruction de la nature et de l'environnement.

La guerre est le plus grand et le pire exemple de destruction qui ne génère absolument rien de bon, mais lorsqu'une bonne raison comme les Jeux Olympiques est évoquée, il est difficile de protester contre sa tenue.

En particulier pour les personne marginalisées qui ne peuvent jamais s'opposer aux ordres des autorités.

Il y a 55 ans, Tokyo a débuté la reconstruction de logements anciens afin d'organiser les Jeux en 1964. Les habitants auxquels il a été demandé de quitter leurs anciennes demeures ont été relogées dans des appartements flambants neufs.

50 ans plus tard, cette même résidence d'appartements et ses anciens locataires doivent de nouveau faire face à une nouvelle expulsion dans le cadre des Jeux Olympiques de 2020.

Pour Kohei Jinno, un résident de 79 ans vivant dans un immeuble de Kasumigaoka, il s'agit de sa seconde expulsion pour cause de Jeux Olympiques. Selon le Japan Times [anglais], sa maison et son commerce ont été détruits pour faire place à un parc olympique entourant le stade olympique des Jeux de Tokyo, en 1964. Dorénavant, il doit de nouveau déménager pour faire place au réaménagement du stade et à son agrandissement d'ici 2020.

La plupart des Japonais ne s'opposent pas à la tenue des Jeux – contrairement au groupe anti-olympique “Hangorin-no kai” – mais certains contestent la démolition du stade actuel pour faire place à l'aménagement d'un autre, plus grand.

Une vidéo sur Youtube, réalisée par l'architecte Ken Aoki via Google Earth, montre un modèle en 3D du nouveau stade national, conçu à partir des informations rendues publiques en mars 2013:

Edward Suzuki, un architecte japonais, suggère sur son blog de rénover le stade national pré-existant plutôt que la construction d'un autre, et appelle les gens à signer une pétition mise en ligne sur la plateforme Change.org. Nommée “Sauvons Meijijingu Gaien et le Stade National pour les Générations Futures” (nom officieux), la pétition affirme que la multiplication d'impôts pour permettre la construction d'un nouveau stade géant, qui serait trop grand, et soulèverait des questions quant à la gestion des risques en cas de catastrophe, ne ferait qu'empêcher les efforts de reconstruction dans les zones touchées par le séisme de Tohoku et le tsunami de 2011, et détruirait le paysage de la ville (comme les arbres Ginkgo et le ciel bleu). Tout ceci, prévient cette pétition, va devenir un fardeau pour les générations futures.

Alors que la ville subit un développement rapide en vue des Jeux Olympiques, l'utilisateur de Twitter Twitter Nakajimayuki commente quant au rôle des citoyens:

Les résidents de Tokyo, comme les acteurs majeurs de la ville, doivent rester forts et prêter attention au changement massif que traverse Tokyo “en vue des Jeux Olympiques de 2020″, et pas seulement au plan de reconstruction du stade, de telle sorte que ce développement ne s'exerce pas de manière opaque.

La photo thumbnail est issue de la page Facebook de Hangorin-no-kai
 

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