
Convocation à la manifestation du 8 février. Image du site de la Table ronde en défense de la Santé Publique
Le 1er janvier 2014 est entré en vigueur l'accord signé en décembre 2013 entre le gouvernement autonome de la Communauté de Madrid et la Croix Rouge. Celui-ci établissait le transfert de la collecte des dons de sang dans les unités mobiles, une responsabilité qui appartenait jusque là à un organisme public, le centre de transfusion de la Communauté de Madrid.
La Communauté de Madrid (CM) paiera 9,3 millions d'euros par an pour ce service à la Croix Rouge, c'est à dire, 67 € par poche de sang, pour une collecte estimée à 140 000 poches. Il faut ajouter à ce chiffre le matériel, que la région cédera à la Croix Rouge, d'une valeur estimée à 14 millons d'euros, en plus des véhicules utilisés pour les collectes.
Même si les autorités ont assuré que cet accord n'entrainerait aucune perte d'emploi dans le Centre de transfusion, comme l'explique le journal Publico,

Les travailleurs occupent le Centre de transfusion de la Communauté urbaine de Madrid pour « paralyser la privatisation du service ». Photographie du site de la Coordination, de Gregorio Marañón
Le 1er mars, la Croix Rouge emportera la moitié des unités mobiles dont dispose le Centre de transfusion, dans les rues comme dans les hôpitaux. Il restera huit unités composées d'un médecin, un ou deux infirmiers, d'un auxiliaire de soin, d'un auxiliaire intérimaire et d’ un chauffeur, en plus d'autres départements qui seront aussi touchés. Au total, 130 travailleurs seront licenciés ou mutés.
De nombreux citoyens voient en cet accord une privatisation du service public, car la santé est un service public universel en Espagne : la cession de compétence à un organisme privé -que ce soit une entreprise ou une ONG – n'a pas de sens si la santé publique peut la prendre en charge. Les travailleurs du Centre de transfusion ont occupé les locaux le 3 février, et une manifestation a eu lieu le 8 du même mois, soutenue par la Table ronde en défense de la santé publique de Madrid et des principaux syndicats. Cette vidéo de HispanTV sur YouTube expose les revendications des travailleurs affectés:
La Croix Rouge espagnole s'est défendue en publiant une note sur son site, dans laquelle elle explique les termes de l'accord:
Les tarifs des composants sanguins sont fixés par au bulletin officiel de chaque communauté autonome, avec un double objectif : que le sang ne fasse pas l'objet d'un commerce, et que les frais engagés soient récupérés, pour assurer son autofinancement. (…)
(…) Comme la Croix Rouge ne va pas fractionner et distribuer le sang à d'autres centres sanitaires, une estimation de la compensation des frais a été faite pour cette activité, avec pour résultat un coût de 67 euros par poche de sang.
Mais cette explication n'a pas touché ni convaincu les internautes, qui dans leur majorité se sont indignés de la nouvelle mesure des services de santé madrilènes, indignation compréhensible étant donné le bilan des autorités madrilènes en matière de santé. Juan+Manuel a raconté son expérience sur le site de la “cadena SER” :
Bonjour….Lors d'une de mes visites au bus de don de sang de la Communauté de Madrid, j'ai demandé à une auxiliaire la différence entre donner à la Croix Rouge ou à la Santé madrilène, et sa réponse a été plus ou moins la suivante : la Croix rouge vend le sang à des hôpitaux privés. Comme le sang ne peut pas se vendre, la transaction se fait avec le prix de la poche, et si le sang ne sert pas, on la vend à des entreprises de cosmétiques. Ses propos m'ont interpellé et depuis, j'ai décidé que je donnerai toujours mon sang aux hôpitaux publics. Après avoir lu cette nouvelle, je ne sais pas vraiment où arrivera le sang. C'est pourquoi je veux aussi en tirer profit et je veux que l'on me paye également, sinon je garderai mon sang pour moi. En bref, si je ne donne pas mon sang à l'hôpital, l'autobus de la Croix Rouge peut toujours attendre.
Sur Twitter, le débat s'est concentré autour de hashtags tels que #PorMiSanidadSangro (“je saigne pour mon sang”) et #DonarEsRegalar (“Donner c'est donner”). SíSePuede (“oui on peut”) et asambleaHTajo appellent à donner seulement aux centres publics de transfusion :
donnez votre sang toujours dans les centres publics et non à la Croix Rouge, qui le vend. Votre solidarité n'est pas leur profit. #DonarEsRegalar#PorMiSanidadSangro
— SíSePuede (@torbe_) February 6, 2014
donnez votre sang toujours dans les centres publics et non à la Croix Rouge, qui le vend. Votre solidarité n'est pas leur profit.
Comment peut-on démonter leur projet de vendre notre sang? En donnant aux hopitaux publics #DonarEsRegalar — asambleaHTajo (@asambleaHTajo) February 4, 2014
Comment peut-on démonter leur projet de vendre notre sang ? En donnant (notre sang) aux hôpitaux publics
Dans le même sens, la Confédération Pirate a tweeté :
Notre sang est CC BY-NC-SA, nous le donnons, mais nous ne voulons pas que l'on fasse du business avec #DonarEsRegalar Donnez seulement aux hôpitaux publics
— Confederación Pirata (@partidos_pirata) February 4, 2014
Notre sang est CC BY-NC-SA (Licence Créative Common), nous le donnons, mais nous ne voulons pas que l'on fasse du business avec #DonarEsRegalar Donnez seulement aux hôpitaux publics
La Croix Rouge de Madrid est intervenue avec ce tweet:
@HULPenlucha La Croix Rouge n'obtient aucun bénéfice pour l'extraction de sang. On couvre les frais, sans obtenir aucun bénéfice http://t.co/Qpf4341JnF — Cruz Roja Madrid (@CruzRojaMadrid) February 4, 2014
La Croix Rouge ne tire aucun bénéfice de la collecte de sang. On couvre les frais, sans faire aucun bénéfice
Ce à quoi MªEugenia a répondu :
@CruzRojaMadrid@HULPenlucha question bête: vous perdiez de l'argent avec les dons, avant? — MªEugenia (@meuenlucha) February 5, 2014
Question bête : vous perdiez de l'argent avec les dons, avant ?
@CruzRojaMadrid@HULPenlucha et une autre question bête: si on ne recollecte pas 140.000 poches, que fait-on avec le reste des 9,5 millions d'euros?
— MªEugenia (@meuenlucha) February 5, 2014
et une autre question bête : si on ne collecte pas 14 000 poches, que fait-on avec le reste des 9,5 millions d'euros ?

Manifestation contre la privatisation des dons devant le Centre de Transfusion de Madrid. Photographie publiée sur Twitter par Patusalud HIC
Nisio, sur le journal Público, a indiqué pourquoi, selon lui, une ONG ne doit pas se charger d'un service public, en rappelant à cette occasion certaines affaires un peu troubles qui ont éclaboussé la Croix Rouge de Madrid :
Les subventions sont une chose et PAYER une ONG en une autre, bien différente (qui choisit et nomme leur semployés ? Quels salaires se repartissent-ils ?) (…) Si c'est pour assumer une mission une mission publique, que l'administration publique elle-même s'en charge.
(…)
Les informations sur un certain Juan Mauel del Toro Rivero peuvent vous intéresser aussi. Juan Manuel Suárez del Toro, président de cette ONG depuis 1994, est bizarrement mis en examen dans l'affaire Bankia, pour être un de ses conseillers.
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