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Brésil : Une vidéo satirique censurée par la chaine Rede Globo

Catégories: Amérique latine, Brésil, Cyber-activisme, Film, Humour, Liberté d'expression, Média et journalisme, Médias citoyens
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Capture d”écran de la video satirique : le présentateur William Bonner et la fausse Patrícia “Correta” (“Patricia Correct”) sur la “vidéo que la Globo ne veut pas que vous voyiez”.

Tous les liens mènent à des pages en portugais.

L'activiste et vidéaste brésilien Rafucko [1] dénonce sur sa page Facebook le fait que Youtube ait supprimé une de ses vidéos à la demande de la Rede Globo [2] (NdT: La plus grande chaine de télévision brésilienne). En à peine huit heures, la satire avait attiré [3] plus de 40 000 visiteurs. 

Le montage vidéo, mis en ligne le 18 février, avait pour point de départ un éditorial du “Jornal Nacional” (NdT: l'équivalent du journal de 20h), émission phare du service d'information de la Globo. Il souhaitait exposer au grand jour la manipulation de l'information véhiculée par la chaine à propos des manifestations ayant lieu dans le pays depuis juin 2013. Sur cette vidéo, l'activiste se faisait passer pour la journaliste Patrícia Poeta, co-présentatrice du journal, (devenue ‘Patrícia Correta’, Patricia Correct, dans sa version humoristique) et corrigeait les commentaires de son collègue, le journaliste William Bonner, tous deux co-présentateurs du Journal Nacional.

Parmi les mises au point de l'humoriste :  le rôle du service d'information de la Globo dans la couverture de la mort du cinéaste Santiago Andrade durant les manifestations de Rio de Janeiro [4], ainsi que les accusations [5] émises par les Organisations Globo (par son bras imprimé, Le Globo) contre le député Marcelo Freixo – accusé de manière on ne peut plus désinvolte [6] d'être proche des manifestants soupçonnés du meurtre du cinéaste. L'insistance de la chaine à utiliser le terme “vandales” pour dénommer les manifestants, lié à sa partialité mettant au même niveau la violence défensive des manifestants et la violence de la Police Militaire, qui, selon [7] l'Abraji (Association brésilienne de journalisme d'investigation) est responsable de 75% des agressions contre les journalistes.

La dénonciation de Rafucko a été téléchargée par des milliers d'utilisateurs de Facebook qui ont répondu à la demande de l'humoriste en partageant la vidéo sur différentes plateforme telles que YouTube et Vimeo. Mais beaucoup de ces versions ont également été censurées à la demande de la Rede Globo, a dit  [3]l'activiste:

Quem baixou, pode repostar! Em breve reposto, com o slogan: “o vídeo que a Globo não quer que você veja”. Vai ser sucesso. Já é.

Ceux qui ont téléchargé, vous pouvez partager! Je vais bientôt la remettre en ligne avec le titre: La vidéo que la Globo ne veut pas que vous voyiez”. ça va être un succès. ça l'est déjà.

Le même jour, Rafucko a protesté [8] sur son blog contre ce qu'il assimile à de la censure:

Não é à toa que um dos gritos mais ouvidos nas manifestações diz “a verdade é dura, a Rede Globo apoiou a ditadura (e ainda apóia)!”

Na última semana vimos a emissora dedicar extensas reportagens e editorias para versar sobre a liberdade de expressão. Desde o início das manifestações, a Rede Globo utiliza sistematicamente imagens de coletivos de mídia independente sem dar créditos ou pedir prévia autorização.

Entretanto, meu vídeo satirizando o Jornal Nacional foi retirado do ar menos de 12h após sua publicação. O papo dos “direitos autorais” eu dispenso.

ça n'est pas pour rien que l'un des slogans les plus entendus dans les manifestations était “La vérité est dure, la Rede Globo a soutenu la dictature (et la soutient encore) !”

La semaine dernière, on a pu voir la chaine diffuser de longs reportages ainsi que des éditoriaux glosant sur la liberté d'expression. Depuis le début des manifestations, la Rede Globo utilise systématiquement des images de collectifs indépendants sans citer de noms et sans demander quelque autorisation que ce soit.

En attendant, ma vidéo brocardant le Jornal National a été supprimée moins de 12 h après sa mise en ligne. Et épargnez-moi le discours sur les “droits d'auteurs”.

L'activiste Pedro Ekman a critiqué [9] la Rede Globo et parlé de cette question des droits d'auteurs :

A Globo é a maior censora da internet brasileira. A Globo retira conteúdos alegando ter direito autoral sobre eles. A Lei de Direito Autoral determina que é LIVRE o uso de pequenos trechos de obras protegidas por direito autoral para fins de crítica e sátira. Mas respeitar leis nunca foi muito a prática da Globo, vide 1964.

La Globo est le plus grand censeur de l'internet brésilien. La Globo supprime des contenus en alléguant en posséder les droits d'auteurs. La loi sur les droits d'auteurs autorise le LIBRE usage de courts extraits d'oeuvres protégées à des fins de critiques ou de satires. Mais respecter les lois n'a jamais été la tasse de thé de la Globo, voir 1964 (NdT: et l'engagement de la chaine au côté de la dictature et du coup d'état de 1964).

Le  journaliste Bruno Natal ajoute [10], sur son blog :

Nos EUA, por exemplo, essa alegação mambembe de violação de direitos autorais não colaria, porque lá existe uma lei chamada Fair Use (Uso Justo) [11], que permite a reprodução de qualquer material protegido desde que dentro de um contexto pertinente, o que claramente é o caso aqui. Afinal, como o Rafucko pode criticar o editorial sem mostrá-lo?

Isso pra não entrar no âmbito da liberdade artística, antes que alguém venha dizer que ele não precisava mostrar o vídeo, mas bastaria citá-lo (quem escolhe a forma é o artista).

Só tem um nome pra isso e vc sabe qual é.

Aux USA par exemple, ces allégations à deux balles de violations des droits d'auteur ne tiendraient pas, parce que là-bas, il existe une loi appelée Fair Use (Utilisation Juste) [11], qui permet la reproduction de n'importe quel contenu protégé si l'utilisation en est pertinente, ce qui est clairement le cas ici. Au final, comment Rafucko peut-il critiquer l'éditorial sans le montrer?

Sans même entrer dans le cadre de la liberté artistique, et avant que quiconque ne viennent dire qu'il n'avait pas besoin de montrer les images du journal, qu'il suffisait d'en parler (c'est l'artiste qui choisit la forme).

Il n'y a qu'un seul nom pour cela et tout le monde sait lequel.

Le jour suivant, le 19, Rafucko a remercié [12] ses abonnés d'avoir partager la vidéo en annonçant qu'avant d'être censurée, elle avait atteint les 500 000 visualisations, devenant ainsi la vidéo la plus vue sur sa chaine YouTube et il a ajouté:

Quando se fala pela liberdade, toda tentativa de repressão e censura amplifica nossa voz.

Quand on s'exprime pour la liberté, toute les tentatives de répression et de censure amplifient notre voix.

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Vidéo originale censurée

Tatiane Rosset, sur le blog Youpix, commente [13]:

Como a internet não é boba nem nada, existem outros meios para assistir o viral, onde Rafucko interpreta Patrícia Correta (piadinha) corrigindo o colega de bancada durante o editorial. Um deles são as várias repostagens feitas no próprio YouTube [14] (uma já tinha mais de 400 mil views quando foi retirada, e outra está em 190 mil).

A outra, é claro, é através do Vimeo. Porque, por algum motivo, todos as pessoas com o ~~rabo preso~~ no país esquecem que o YouTube é o principal, mas não o único meio de veicular vídeos online

A censura, pedida pela Rede Globo por “infringir direitos autorais”, levanta o questionamento: Até onde a liberdade de expressão rola online? O universo digital é realmente livre?

Comme sur internet on n'est pas bête, loin de là, il existe d'autres moyens pour voir la vidéo dans laquelle Rafucko interprète Patrícia Correta (petite blague) corrigeant le collègue présentateur pendant sa chronique édoriale. L'un d'eux est la multiplicité des partages sur YouTube même [14] (l'un d'entre eux avait déjà été vu plus de 400 000 fois lorsqu'il a été supprimé, et un autre en est à 190 000 vues).

L'autre, bien sûr, est sur Viméo. Parce qu'on ne sait pour quelle obscure raison, tout ceux qui ~~rencontrent des problèmes de liberté d'expression~~ dans ce pays, oublient que YouTube est le principal, mais certainement pas le seul moyen de diffuser des vidéos en ligne.

La censure, demandée par la Rede Globo pour “infractions aux droits d'auteur”, amène la question : jusqu'où va la liberté d'expression en ligne ? L'univers digital est-il réellement libre ?

 La vidéo peut encore être vue sur d'autres comptes Youtube et sur [15]Vimeo [16].