Un regard d'artiste sur le mal du pays des exilés iraniens

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 “I'm Not There” de Saman Aghvami  est une exposition photographique au programme du festival Contact à Toronto.

De nombreux Iraniens de la diaspora se retrouvent confrontés à la nostalgie d'un pays natal où ils ne peuvent pas retourner, de peur d'être persécutés. Dans une récente allocution, le Président modéré Hassan Rouhani a sous-entendu que les Iraniens exilés devraient pouvoir venir dans leur pays d'origine sans avoir à craindre d'éventuelles sanctions. Cependant, un retour en Iran demeure risqué pour beaucoup. La seule option pour les personnes dans ce cas? Se remémorer leur pays natal depuis l'étranger.

Le photographe irano-canadien Saman Aghvami a tenté de retranscrire ce sentiment dans une exposition photo intitulée “I'm Not There” (“Je n'y suis pas”) et présentée dans le cadre du festival photographique Contact à Toronto.

“J'ai demandé aux participants: ‘Où iriez-vous si vous pouviez passer deux heures n'importe où en Iran ?’. Ces photos sont leurs réponses”, a déclaré Aghvami dans une interview accordée à Global Voices.

Aghvami, avant d'émigrer au Canada, était photographe pour l'Agence de presse des étudiants iraniens (Iranian Student News Agency ou ISNA), et a photographié des compatriotes dans leur résidence actuelle, puis a superposé à ces clichés des images d'endroits qui suscitent de la nostalgie chez eux. Les participants sont des activistes, des artistes, des membres de minorités, des journalistes ou des dissidents. Le sujet de l'exil et de la nostalgie semblait important à Aghvami de par sa propre expérience d'Iranien vivant au Canada.

Hand written notes by each of the subjects were included to explain the places in Iran they were nostalgic for. Photo by Semco Salehi.

Les notes manuscrites où les participants expliquent pourquoi ils ont la nostalgie de certains endroits en Iran. Photo de Semco Salehi. Utilisée avec permission.

Un des clichés, intitulé “Rouzbeh: réalisateur”, saisit son protagoniste en train de se rappeler le Bazar de Téhéran. “Il m'a dit que pour lui le Bazar avait toujours été une métaphore du monde et de la vie”, raconte Aghvami, qui inclut dans l'exposition des notes manuscrites où les participants expliquent leur choix.

La question du droit de retour des Iraniens en exil est au centre des discussions depuis que le Président Rouhani a demandé aux Ministères des Renseignements et des Affaires Étrangères d'autoriser les expatriés à entrer sur le territoire. En guise de réponse, Hassan Qashqavi, l'adjoint au Ministre des Affaires Étrangères chargé des Affaires Consulaires, Parlementaires et relatives aux Expatriés Iraniens, a encouragé les citoyens résidant en dehors du pays à envoyer un email à l'adresse iranianaffairs@mfa.gov.ir, afin de se renseigner sur leur statut actuel auprès du Ministère des Affaires Étrangères.

Cependant, le Procureur Général Gholamhossein Mohseni Ejehi a fait des déclarations qui n'inspirent que peu de confiance aux Iraniens vivant à l'étranger. Lors d'une conférence de presse en juillet 2013, il a en effet affirmé que tout le monde était autorisé à entrer sur le territoire iranien, mais pas forcément à en sortir. En outre, le journal Shargh a révélé le 12 mai dernier que beaucoup des requêtes envoyées au Ministère des Affaires Étrangères n'avaient pas encore été traitées:

@ShargDaily: 40% des personnes qui ont envoyé une requête sur leur retour en Iran n'ont pas eu de réponse du Ministère des Renseignements.

De plus, l'incarcération de l'ancien Marine américain Amir Hekmati et d'autres histoires similaires ont contribué au manque d'optimisme de ceux qui espèrent rentrer au pays en toute sécurité.

C'est à cause d'histoires comme celle-ci que les Iraniens ont peur de rentrer : on peut être instrumentalisé contre son gré.

Le 11 mai, la journaliste irano-américaine Negar Mortazavi a posté un tweet sur le droit de retour des Iraniens, et l'a adressé au cabinet du Président Rouhani. Le post a créé l'événement lorsque le compte de Rouhani l'a retweeté. De nombreux internautes y sont allés de leur commentaire, disant que Rouhani était d'accord sur le droit de retour des expatriés sans crainte de persécution, mais qu'il lui restait encore à faire appliquer ce principe dans son pays.

The right to return to our homeland without the fear of arrest. CC: @HassanRouhani — Negar Mortazavi نگار (@NegarMortazavi) May 11, 2014

Le droit de rentrer chez soi sans craindre une arrestation. CC: @HassanRouhani

L'équipe média d'Hassan Rouhani viendrait-elle de retweeter @NegarMortazavi? Espérons qu'ils agiront en conséquence.

L'exposition “Im Not There” se déroule du 1er au 24 mai à la I.M.A Gallery de Toronto.

 

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