- Global Voices en Français - https://fr.globalvoices.org -

Moscou ferme 4 McDonald's pour ‘défaut d'hygiène’, mais que dire des toilettes des hôpitaux russes ?

Catégories: Europe Centrale et de l'Est, Russie, Alimentation, Cyber-activisme, Dernière Heure, Droits humains, Economie et entreprises, Liberté d'expression, Manifestations, Médias citoyens, Politique, Santé, RuNet Echo
Ronald McDonald would probably be horrified at this dysfunctional bathroom at a Russian hospital. Images mixed by author.

Ronald McDonald serait probablement horrifié par ces toilettes d'un hôpital russe. Montage photos de l'auteur .

Conséquence de ‘la guerre des sanctions’ qui a lieu actuellement, quatre Mc Donald's ont été fermés en Russie pour ‘atteintes aux règles d'hygiène’. La blogosphère russe a explosé de commentaires incrédules. Et de photos de toilettes bien russes.

L'Occidental moyen peut ne pas considérer les toilettes d'un McDonald's comme un endroit propre et accueillant. Les menus n'ont rien d'extraordinaire et la propreté des toilettes laisse souvent à désirer. Mais pas en Russie, où la plupart des restaurants McDonald's sont immaculés, et attirent les foules, souvent d'ailleurs en raison de l'accès gratuit aux toilettes. Les toilettes publiques sont encore rares en Russie, même dans les grandes villes, et les habitants sont reconnaissants envers McDonald's de leur avoir offert ‘des années de toilettes’, gratuitement. Quand les autorités russes de la protection du consommateur ont inspecté et immédiatement fermé [1] quatre restaurants McDonald's de Moscou, dont le premier à avoir ouvert en Russie, les Russes ont donc protesté sur les médias sociaux.  

Le compte parodique Fake_MIDRF [2] rappelle [3] a ses lecteurs que le premier McDonald's s'est ouvert à Moscou en 1990, quand l'URSS étaient encore (en grande partie) intact :

Nous avons fermé le premier McDonald's. Et nous avons reconstitué l'URSS aussi!

On trouve beaucoup de plaisanteries sur la qualité de la nourriture et sur les sanctions (TJournal en propose une jolie collection [5], en russe), mais certaines des conversations en ligne ont pris un tour plus sérieux. Puisque les internautes exprimaient leur incrédulité devant les sanctions appliquées en raison des toilettes habituellement impeccables de McDonald's, d'autres ont commencé à poster des photos des toilettes et salles de bain des hôpitaux de leur ville. Sur Twitter, @jamchronicle [6] a lancé cette mode depuis Ekaterinbourg:

A Moscou, 4 restaurants McDonald's ont été fermés pour manque d”hygiène. Ce n'est certainement rien en comparaison avec l'hopital 23 de la ville d Ekaterinenbourg.

 Le tweet d'origine a été retweeté des centaines de fois, provoquant une cascade de réactions. Les internautes ont commencé à partager leurs propres histoires sur l'état consternant des hôpitaux dans différentes régions de Russie. 

 Алла [9] a tweeté une photo depuis Saint Pétersbourg : 

Ou l'hôpital Filatov de Peter (Saint Petersbourg)

Un autre, vlad [14] de Saratov, a ajouté d'autres photos choquantes de toilettes : 

Ou à Saratov.

5strike5 [17], sur Twitter, a ajouté cette photo d'un sinistre corridor d'hôpital dans une banlieue moscovite, Balachikha :

Cela ne battra pas le service de dermatologie et des maladies vénériennes de Balachikha.

Ca fait vraiment peur, vous pouvez filmer un film d'horreur par ici, pas besoin d'accessoires :) Et c'est dans une banlieue proche de Moscou….

Tandis que les internautes s'échangeaient leurs histoires sur l'état désastreux des hôpitaux, qui ne choquent personne, semble-t-il. Викси [22] a rappelé que ces hôpitaux sont supposé fonctionner et être entretenus par l'Etat, avec l'argent des taxes que paient les Russes ordinaires.

Regardez tout ceci et réfléchissez : où va l'argent des contribuables ?

Que la fermeture d'un McDonald's puisse avoir provoqué ces histoires d'horreur de toilettes dégradées, et que ces témoignages soient devenus un genre de cyberactivisme n'est pas surprenant : la Russie semble avoir une longue histoire d'hôpitaux sous-financés, problème qui n'a jamais été résolu. En mars de cette année, dans un geste de bonne volonté envers le nouveau territoire annexé de Crimée, le gouverneur du Grand Moscou a promis de verser 40 millions de roubles [25] pour la rénovation d'un hôpital pour enfants de Sudak, en Crimée. Les internautes russes se sont moqués de la décision, et ont supposé que le gouverneur ne s'est sans doute jamais donné la peine de visiter les hôpitaux dans sa propre circonscription : ils tombent en ruines.

Irina Filippova [26] a retweeté une photo [27] d'un hôpital local près de Moscou, qui se passe de commentaires : 

Le gouverneur du Grand Moscou donne 40 millions de roubles sur le budget régional pour rénover un hopital en Crimée. Est-ce qu'il est allé dans les hôpitaux du grand Moscou ? 

Deni88 [30] a posté une autre photo [31] d'une salle pleine d'enfants dans l'hôpital Korolevo, dont les murs ont connu des jours meilleurs :

La photo est celle d'un hopital de Korolevo, dans la région de Moscou. La même région dont le gouverneur envoie 40 millions de roubles pour rénover un hôpital en Crimée. 

Au final, fermer les restaurants McDonald's ne portera pas tort à la chaine (qui a des centaines d'autres restaurants en Russie), ou à ses habitués (ils peuvent aller chez Burger King). Mais cela a déjà permis de lancer un débat necessaire sur le deux poids deux mesures des autorités russes pour ce qui est de   “l'hygiène” dans les institutions d'état, et sur la corruption rampante dans les administrations locales. Des toilettes gratuites en centre-ville, c'est bien, mais des toilettes en état de marche et propres dans un hopital pour enfants, c'est une nécessité.

Un goût curieux pour les témoignages en photos est en train d'émerger comme une pratique courante chez les Russes, quand leur colère face aux décisions de leur gouvernement déborde. Se pourrait-il que le Kremlin ait justement peur de ce type de discussions en ligne, alors qu'il impose de nouvelles restrictions aux internautes russes? Si c'est le cas, il se prépare des moments difficiles car les Russes adorent passer leurs nerfs sur les réseaux sociaux.