- Global Voices en Français - https://fr.globalvoices.org -

Ebola dépouille les Africains de leurs valeurs culturelles et humaines

Catégories: Guinée, Libéria, Sierra Léone, Action humanitaire, Catastrophe naturelle/attentat, Gouvernance, Médias citoyens, Santé

L'anthropologue social et sociologue Ginny Moony explique [1] comment l'épidémie d'Ebola déshumanise les Africains :

 La façon dont les Africains de l'Ouest traiteraient leurs malades et leurs morts est censée différer significativement de celle du reste du monde. Rien de plus faux. Dans le monde entier, l'essence des soins aux malades est pratiquement identique : toucher les membres de la famille malades ou morts est un phénomène naturel. Dans le monde entier les morts sont lavés et le corps exposé avec soin pour que la famille et les connaissances puissent faire leurs adieux. Aux Pays-Bas, il nous est permis de garder nos proches décédés plusieurs jours dans notre salon. Il y aura des contacts physiques avec le corps de la personne décédée jusqu'à la fermeture du cercueil et son inhumation ou son transfert au crématorium.

Dans le cas des pays affectés par Ebola, les conduites humaines normales sont rejetées comme “pratiques démodées et indésirables” par l'Organisation Mondiale de la Santé et les spécialistes qui analysent l'épidémie Ebola. Personne ne se demande s'il est raisonnable de refuser aux gens le soin de leurs proches et le droit de prendre en charge la procédure de deuil. La solution pour empêcher la contamination est évidente : ne pas toucher, en aucun cas. Des solutions plus compatissantes, comme la fourniture d'équipements de protection aux membres de la famille pour leur permettre d'enterrer leurs proches eux-mêmes ou avec une assistance, ne sont pas envisagées. La population est prise au piège ; à défaut de coopération, la prison. Ces mesures rigoureuses aliènent encore plus les gens des autorités. Ebola est un châtiment. Ni pour la communauté internationale, ni pour le personnel politique, ni pour les élites, seulement pour les masses déshéritées. Les gens se sentent seuls. Désertés. L'argent afflue, et de plus en plus de renforts, pourtant l'épidémie gagne du terrain chaque jour….