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En Inde, une émission télévisée reçoit plus d’un million d’appels pour protester contre la loi anti-gay

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Screenshot of the Indian talk show "Satyamev Jayate" [1]

Capture d'écran de l'émission indienne « Satyamev Jayate » présentée par Aamir Khan

Le dernier épisode en date d’un talk-show indien a rassemblé plus de 100 millions de téléspectateurs et a eu une forte influence sur la perception [2] de la communauté LGBT dans le pays. Un numéro gratuit avait été mis en place et plus d’un million d’appels ont ainsi été recensés [3]. Tous visaient à dénoncer la section 377 du Code pénal indien qui criminalise l’homosexualité et, par conséquent, stigmatise la communauté LGBT.

Le 19 octobre, un épisode du talk-show indien « Satyamev Jayate [4] » (Seule la vérité triomphe) intituté « Accepting Alternative Sexualities [1] » (Accepter les autres orientations sexuelles) a tenté de rompre avec les idées reçues [5] qui stigmatisent la communauté LGBT, en apportant des réponses à de nombreuses questions entourant cette problématique. 

Parmi les invités, l’on trouvait Gazal Dhaliwal (@gazalstune [6]), une femme transgenre, accompagnée de ses parents, le psychologue de renom Deepak Kashyap, ainsi que d’autres militants LGBT. La scénariste Gazal Dhaliwal a décrit son enfance traumatisante [7], celle d’une petite fille emprisonnée dans le corps d’un garçon, jusqu’à la découverte de son « moi » et la décision de subir une opération pour changer de sexe.

Posez vos questions à Gazal pour savoir ce qui lui a donné la force d’accepter ce qu’elle était vraiment, avec le hashtag #MumkinHai #FreedomForLGBT

Dhaliwal a ensuite discuté en direct sur Twitter [13] avec les téléspectateurs.

Durant l’émission, il a également été question de la façon dont les familles en Inde gèrent la problématique LGBT. Une grand-mère a, par exemple, admis avoir dansé lors de la cérémonie des fiançailles de son petit-fils gay.

Le hashtag #FreedomForLGBT est rapidement apparu dans les principales tendances sur Twitter :

Qui aurait cru qu’un problème ne concernant qu’une « toute petite minorité » se retrouverait en tête de Twitter au niveau mondial.

C’est super de constater que la liberté pour les LGBT fait partie des tendances en Inde. C’est déjà un pas important pour cette cause.

La section 377 du Code pénal indien (intégré dans la Constitution indienne par l’Empire britannique en 1861) rend les relations homosexuelles illégales. Il y a quatre ans, la Haute Cour de Delhi a invalidé cette section dans un jugement historique mais, en décembre 2013, la Cour suprême a infirmé la décision de la Haute Cour de Delhi [17], jugeant que le dernier mot revenait au Parlement.

En Inde, les protestations contre la réintrodution de la section 377 se poursuivent et la question était au cœur des élections législatives de cette année. Le Bharatya Janata Party [18] (BJP), actuellement au pouvoir, a soutenu la loi lors des élections mais a toutefois indiqué [19] en août dernier que la Cour suprême étudiait une pétition et que le gouvernement n’avait pas l’intention d’amender la section 377 tant que la Cour suprême n’aurait pas rendu son verdict.

L’émission, présentée par la star de Bollywood Amir Khan [20], a eu l’audace d’exprimer la détresse de la communauté LGBT et de s’exprimer ouvertement contre la loi. Le communiqué [21] suivant était ainsi accessible sur le site de l’émission : 

Aujourd’hui, nous devons tous nous impliquer dans la lutte contre la discrimination et la torture vécues par la communauté LGBT. La loi est l’obstacle majeur empêchant la communauté LGBT d’accéder à l’égalité. Cela est une honte pour nous, mais la section 377 du Code pénal indien continue de considérer l’homosexualité comme un crime, même entre adultes consentants, et la décrit comme étant « contre nature ». Elle est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à dix ans. Cette loi nuit à l’image de l’Inde moderne et doit par conséquent être amendée.

« Satyamev Jayate », émission très populaire, s’est lancée à l’assaut de différents problèmes sociaux [22] souvent ignorés dans le passé par les cercles conservateurs du pays. La troisième saison est diffusée simultanément sur huit chaînes [23] et comprend un passage en direct intitulé « Mumkin Hai » sur deux autres chaînes, ce qui représente jusqu’à 126 millions de téléspectateurs. 

On pouvait également lire sur le site que, au-delà de la loi, le plus important était le comportement de la société vis-à-vis de la communauté LGBT ; la société doit changer et ce changement doit commencer dans la vie quotidienne. Une liste de vidéos et d’articles concernant d’autres aspects de la communauté LGBT en Inde était aussi disponible et traitait notamment du soutien parental, des mariages forces et du refus d’accès aux lieux de travail pour la communauté Hijra [24].

Nous sommes tous d'abord des êtres humains ! La reconnaissance est la première étape pour mettre fin à la discrimination.

Qui sommes-nous pour décider de ce qui est bien ou mal, autorisé ou non, accepté ou non.

Voyons comment le gouvernement réagit aux revendications de Liberté pour les LGBT Demandez à Rajnath Singh qui a dit que l’homosexualité était contre nature

Les placards sont pour les vêtements et non pour la sexualité de quelqu’un. Libérez-vous ! Ouvrez vos esprits placardisés.

Beaucoup ont apprécié la contribution d’Aamir Khan et ont envoyé des vidéos pour le remercier :

Bravo @aamirkhan pour ce grand pas en faveur du mouvement LGBT en Inde

Remercions #AmirKhan pour la campagne #MumkinHai en faveur de la liberté pour les LGBT. Enregistrez une vidéo comme celle-ci …

Bien sûr, tout le monde n’était pas du même avis. Nombreuses ont été les personnes à apporter leur soutien à la section 377 et à rejeter la communauté LGBT.

Les histoires racontées dans l’épisode étaient émouvantes. Reste à savoir si elles ont inspiré suffisamment de personnes pour lutter activement [5] pour les droits de la communauté LGBT en Inde.