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Le chanteur Akon soutient le développement en Afrique sans campagnes caritatives

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Akon in West Africa for his electrify project with permission [1]

Akon en Afrique de l'ouest pour son projet d'électrification – Photo utilisée avec autorisation

Depuis la première initiative Live Aid organisée par Bob Geldof et une bande d'amis célèbres au milieu des années 80, l'Afrique a connu beaucoup de célébrités mondiales désireuses d'aider le continent. La plupart de ces initiatives, cependant, sont bien loin [2] d'atteindre leurs objectifs déclarés.

Pour beaucoup de gens en Afrique, l'épidémie Ebola a clairement mis à jour l'écart existant entre les campagnes de sensibilisation des célébrités et les réalités de terrain ; terrain sur lequel les “initiatives parachutées” par les stars occidentales échouent après de courts communiqués dans l'actualité internationale. Jusqu'à présent, les limites du travail humanitaire de telles célébrités [3]— le travail humanitaire des occidentaux en général—ont été bien documentées [4].

Le remake du tube de “Band Aid 30″, “Do They Know It's Christmas [est-ce qu'ils savent que c'est Noël],” par exemple, fait peu pour faire connaître — ni même reconnaître— le rôle des Africains dans la lutte contre Ebola.

Comparée à la chanson “Africa, Stop Ebola,” créée par des artistes africains, notamment Tiken Jah Fakoly, Amadou et Mariam ainsi que Salif Keita, il est difficile de nier la différence de ton. 

En dépit des bonnes intentions de Band Aid 30, les africains ont longtemps été offensés par le ton paternaliste de l'adaptation de la chanson “Do They Know It's Christmas” [est-ce qu'ils savent que c'est Noël]. (La version réactualisée de la chanson inclut des paroles comme, “Là où un baiser donné avec amour peut vous tuer et là où la mort se trouve dans chaque larme,” “Eh bien ce soir, à notre tour, nous nous tournons vers vous et nous vous touchons” et ainsi de suite.) D'autre part, les paroles de la chanson Africa Stop Ebola mettent l'accent sur ce que les habitants dans la région affectée peuvent faire pour stopper la propagation d’ Ebola. La chanson est interprétée en français et dans les langues vernaculaires (Haoussa, Peul, etc.) largement parlées à travers la région pour s'assurer que le message est compris par la majorité de la population de la région affectée.

Au milieu de la campagne de Band Aid 30 et de ses critiques à rebrousse-poil en Afrique, une initiative bien moins connue fait son chemin : un projet du chanteur américain Akon [5], qui a des attaches familiales au Sénégal, pour aider l'électrification [6] en Afrique de l'ouest.

Akon, dont le nom complet est Alioune Damala Bouga Time Bongo Puru Nacka Lu Lu Lu Badara Akon Thiam, a passé la plus grande partie de son enfance au Sénégal et a été classé cinquième personnalité la plus influente en Afrique [7] en 2011 (sur une liste de 40 noms). Dans une vidéo sur Vimeo, Akon explique son projet d'électrification :

Il ajoute [8] :

Le manque d'électricité est actuellement un problème majeur en Afrique. Un nombre conséquent de foyers en zones rurales et même urbaines n'a pas accès à l'électricité. C'est un réel obstacle au développement durable de l'Afrique.

Dans cette perspective et dans le cadre d'un partenariat public-privé, une alliance a été signée entre des sociétés privés et les gouvernements de plusieurs pays africains pour soutenir l'initiative. Le projet consistera à installer des équipements solaires dans les foyers et à favoriser l'autonomie énergétique, ce qui permettra aussi à des millions d'enfants d'avoir accès à l'électricité et d'améliorer leur éducation en rallongeant les heures consacrées à l'étude.  

Le projet d'Akon est planifié pour du long terme, ce qui le distingue des soutiens ponctuels réalisés en Afrique qui, habituellement, nécessitent de grandes campagnes de publicité. Le travail d'Akon n'est pas orienté vers un public occidental et ce n'est pas une campagne de sensibilisation. Il effectue actuellement un long voyage à travers l'Afrique de l'ouest, où il rencontre des entrepreneurs locaux et des décideurs politiques. Il visitera neuf pays différents : le Sénégal, le Mali, la Guinée Conakry, la Gambie, le Burkina Faso, la Guinée équatoriale, le Gabon, le Congo et la Côte d'Ivoire.

En Guinée, Akon a rencontré des étudiants à l'université Gamal Abdel Nasser à Conakry et a indiqué [9]:

Je suis aussi un homme d'affaires mais je veux faire des affaires qui profitent à l'Afrique [..] toutes les ressources nécessaires au développement de l'Afrique sont à la disposition du continent, et tout ce que les africains doivent faire c'est de prendre les commandes. 

A Cotonou, au Bénin, Arnaud Dounhmanmoun écrit [10]:

Au Bénin, une phase expérimentale a déjà eu lieu et c’est le village Avlo à Grand Popo qui a été retenu.L’artiste procèdera à la réception des matériels, Il s’agit des kits solaires pour les ménages ainsi que les lampadaires solaires pour l’éclairage public.

Au Mali, Modibo Fofana, dans le Journal du Mali, indique qu'Akon contribue également au changement de l'image de l'Afrique [11]auprès des investisseurs, malgré la crise Ebola :

Après une visite en Guinée, Akon est arrivé au moment où le Mali a connu le premier cas. Selon Akon, la médiatisation à outrance de cette maladie en Afrique contribue à ternir son image. “C’est à nous de changer l’image de l’Afrique. Quand les gens voient que je suis au Mali malgré l’annonce d’Ebola, cela va rassurer les autres.”

Bien qu'il soit trop tôt pour dire si l'approche d'Akon portera plus de fruits que la surenchère de l'initiative Band Aid, au moins il s'est focalisé sur le potentiel de l'Afrique pour assurer son développement de manière autonome plutôt que d'attendre les hypothétiques sauveurs occidentaux.