- Global Voices en Français - https://fr.globalvoices.org -

Argentine : Derrière les murs des prisons, la violence contre les femmes est souvent ignorée

Catégories: Argentine, Bolivie, Droit, Droits humains, Femmes et genre, Médias citoyens, Politique
Photo by Flickr user Rock & Rejas: Sonidos de la Cárcel (Gira 2003). CC BY-NC-ND 2.0 [1]

Photo par l'utilisateur de Flickr Rock & Rejas: Sonidos de la Cárcel (Gira 2003). CC BY-NC-ND 2.0

Les droits des femmes dans les prisons argentines, où l'inégalité des sexes, la violence et l'exclusion peuvent proliférer, sont systématiquement violés. La violence de genre derrière les barreaux peut souvent entrainer des agressions sur le corps d'une femme.

Une étude réalisée par Procuración Penitenciaria de la Nacion en Argentine [2] a révélé que la violence institutionnelle est un problème croissant en prison, étant donné que le nombre de femmes en prison a augmenté. Plusieurs études [3] portant sur la situation dans laquelle elles vivent ont montré que très peu de mesures y ont été prises pour protéger les droits des femmes. 

Comunicar igualdad [4] est une organisation civile argentine qui vise à développer les questions de genre dans les médias comme une stratégie pour obtenir une société équitable. Dans un billet intitulé “Femme en prison [5]“, différents cas de violence à l'égard des femmes privées de liberté ont été analysés : 

La violencia es simbólicamente mayor cuando es ejercida por las instituciones. ¿Por qué no pensar entonces que la invisibilización hacia las mujeres es muchísimo más potente cuando hablamos de aquellas que se encuentran privadas de su libertad? El enfoque de género aplicado al sistema carcelario podría ser una herramienta eficaz que amplíe y diversifique la concepción vigente de derechos humanos y proponga un ámbito no tan recorrido por donde transitar hacia un estado cada vez más democrático.

La violence est symboliquement plus grande lorsqu'elle est exercée par les institutions. Pourquoi ne pas penser alors que l'invisibilité à l'égard des femmes est beaucoup plus forte lorsqu'il s'agit de celles qui sont privées de leur liberté ? L'approche genre appliquée au système pénitentiaire pourrait s'avérer un outil efficace pour développer et diversifier la conception actuelle des droits humains et proposer un cadre moins tracé qui permet une transition vers un État de plus en plus démocratique.

Selon le blog Femmes et prison [6], la prison affecte différemment les femmes par rapport aux hommes [7] — puisque le nombre de femmes en prison est largement inférieur à celui des hommes, les établissement pénitentiaires pour les femmes manquent d'aménagements collectifs pour les activités sportives ou de loisirs. Les femmes souffrent également d'un manque de contact avec leurs familles, de l'abandon de leur partenaire, et de soins médicaux médiocres.

Parallèlement, si elles sont étrangères, elles font face à des irrégularités telles que le paiement de pécule du fait de la situation fiscale [8]

Le manque d'interprètes est un autre problème auquel sont confrontées les femmes incarcérées en Argentine. Reyna Maraz, [9] une citoyenne bolivienne vivant dans le pays et qui ne parle pas l'espagnol, seulement le quéchua, a été condamnée à la prison à perpétuité pour le meurtre de son mari, après trois ans de prison [10] sans être autorisée à comparaître devant un juge ou avoir accès à un interprète.

Le Comité des Nations Unies contre la torture [11] est un organe composé de 10 experts [12]indépendants [12], qui surveille la mise en œuvre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [13] dans le monde entier. Un livre récent publié à l'Université nationale de La Plata [14] en Argentine, “Coup de pied au portail. Genre, incarcération et accès à la justice : femmes emprisonnées avec leurs enfants dans la province de Buenos Aires” a présenté le rapport du Comité [14] : 

Entre las conclusiones a las que arribó el equipo, subrayan que los jueces legitiman la violencia de género, que solo consideran a las mujeres en tanto madres, y que legitiman la presencia de niños y niñas encarcelados.

Parmi les conclusions de l'équipe, ils soulignent que les juges légitiment la violence de genre, qu'ils considèrent uniquement les femmes comme mères, et légitiment la présence d'enfants emprisonnés.

Le blog Atrapamuros [15] a décrit la situation réelle des femmes privées de liberté [16] : 

La violencia de género es posible dentro de lo que conocemos como sistema patriarcal. Entender políticamente al sistema patriarcal nos permite examinar con mayor profundidad el rol que ha venido jugando el Estado ante los casos de violencia de género que terminan en actos ilegales perpetuados por las mujeres. Siempre ausente en las políticas de prevención y detención de la violencia de género, el Estado hace su entrada en la vida de las mujeres cuando puede juzgarlas y castigarlas. 

La violence de genre est possible dans ce qu'on appelle système patriarcal. Comprendre le système politique patriarcal nous permet d'examiner plus en avant le rôle que l’État a joué dans les cas de violence de genre se terminant par des actes illégaux perpétrés par des femmes. Toujours absent dans les politiques de prévention et la lutte contre la violence, l’État fait son entrée dans les vies des femmes quand il peut les juger et les punir.

Le Bureau du Procureur de la Nation [17], une institution qui vise à protéger les droits fondamentaux des personnes privées de liberté en Argentine, a écrit dans son rapport annuel de 2012, [2] au sujet des pratiques violentes menées au cours des fouilles humiliantes: 

varias detenidas se vieron obligadas a “sacarse su ropa interior, voltearse y abrirse las nalgas con ambas manos para que el personal penitenciario las observe”. Ello sucedió momentos previos a que las detenidas concurriesen a una actividad académica en la Universidad de Buenos Aires. Varias detenidas desistieron de la salida para evitar este tipo de medidas ultrajantes, incluso una de ellas fue sancionada por negarse a ser revisada en el modo anteriormente mencionado.

plusieurs détenues ont été contraintes d’ “enlever leurs sous-vêtements, se retourner et s'écarter les fesses avec les deux mains pour que le personnel pénitentiaire observe.” C'est ce qui s'est passé avant que les détenues allaient participer à une activité académique à l'Université de Buenos Aires. Plusieurs détenues ont renoncé à leur sortie pour éviter ce genre de mesures outrageantes ; une a été punie pour avoir refusé de se faire examiner dans les conditions ci-dessus.

Dans son enquête sur les femmes en prison [18], le Centre d'études juridiques et sociales [19] (CELS) analyse non seulement les conditions que subissent les femmes détenues en Argentine, mais également les violations constantes violentes de leurs droits, telle que racontées par les condamnées. Il incombe à l’État d'assumer la responsabilité politique et étique des conséquences :  

La investigación describe minuciosamente todas las violencias, abusos y vulneración de derechos que sufren las presas, así como las gravísimas consecuencias que su encierro provoca en cuanto al desmembramiento de sus hogares y al desamparo de sus hijos. Ello, con el objetivo de abrir un debate que involucre tanto al poder legislativo como al judicial y al ejecutivo, en el marco del cual se evalúen alternativas menos nocivas que el encierro carcelario. Si pese a todo deciden no revertir la situación, ya no podrán alegar desconocimiento de la situación para no asumir la responsabilidad política y ética de sus consecuencias.

L'enquête décrit en détails toutes les violences, abus et violations des droits subis par les prisonnières et les conséquences dramatiques que cette incarcération entraîne avec le démembrement de leurs foyers et l'impuissance de leurs enfants. Ceci, dans le but d'ouvrir un débat impliquant à la fois le législatif, le judiciaire et l'exécutif, dans le cadre de l'évaluation des alternatives moins nocives à l'emprisonnement. S'ils choisissent néanmoins de ne pas remédier à la situation, ils ne peuvent plus prétendre ignorer la situation pour ne pas assumer la responsabilité politique et éthique de ses conséquences.

Voir la couverture spéciale de Global Voices: 16 jours pour mettre fin aux violences à la maison et dans le monde [20]